La chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne est dans le viseur de la Cour des comptes. Dans un rapport publié vendredi 19 janvier, elle pointe de nombreuses irrégularités dans le fonctionnement de la chambre, longtemps contrôlée par la Coordination rurale.
La chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne continue de faire des vagues, après la construction d’une réserve d’eau, le lac de Caussade, il y a cinq ans. La Cour des comptes dénonce, dans un rapport publié vendredi 19 janvier, “de nombreuses irrégularités” et appelle l’État à renforcer sa tutelle.
"Procédure budgétaire défaillante"
La liste que déroule la Cour des comptes est accablante. "Gouvernance non conforme", activités hors cadre, "procédure budgétaire défaillante", voire "insincère". Dans son rapport, qui porte sur la période 2015-2023, elle a ainsi adressé huit rappels au droit à la chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne, dirigé par Serge Bousquet-Cassagne, figure de la coordination rurale dans le département.
La Cour a relevé de nombreuses irrégularités dans la gestion et les activités de la chambre départementale d'agriculture et le fonctionnement de ses instances.
Cour des comptesCompte-rendu du 19 janvier
Parmi ses griefs, elle note la “prédominance d’un bureau dont la composition est floue et laisse une place importante à des personnalités non élues” ou encore un règlement “incomplet” : "Le règlement intérieur est par ailleurs insuffisamment précis en ce qui concerne la prévention des risques de conflit d’intérêts et les obligations en matière de communication et de représentation."
Côté ressources humaines et financier, la Cour des comptes évoque aussi “une absence de dialogue social formel et des augmentations de rémunération et des gratifications concentrées sur quelques agents”.
Des accusations qui relèvent du "népotisme" selon la Chambre d'agriculture, dans sa réponse à la Cour des comptes. "'Aucune malversation financière n'a été identifiée… Pas d'enrichissement personnel, pas de subventions déguisées au syndicalisme agricole, pas de faux frais de déplacement… Actions pour lesquelles certains Présidents et agents comptables de chambres d'agriculture ont été condamnés", rappelle-t-elle.
L’absence d’un directeur général, de 2020 à 2023, avant la prise du poste par Agnès Chabrillanges, est également relevée, "ce qui est irrégulier". Elle accuse, par ailleurs, la chambre d’être sortie de ses compétences en créant un “conseil en ressources humaines pour des collectivités locales”.
"Nous sommes incontournables"
Point positif du rapport, la Cour reconnaît le “dynamisme” de la chambre d’Agriculture "en matière de soutien" à l’élevage ou encore de promotion des filières locales. Un bonus rapidement contrebalancé par un zèle moins visible en matière de bien-être animal ou de maîtrise phytosanitaire, "qui font pourtant partie des missions qui lui sont assignées".
"Le gouvernement vient de nous donner raison avec la publication d'un décret le 28 décembre 2023 qui instaure une période transitoire pendant laquelle les utilisateurs professionnels de pesticides disposent d'un délai de douze mois, non renouvelable, pour fournir l'attestation de conseil stratégique (CSP) lors d'une demande de renouvellement du Certiphyto", répond la Chambre d'agriculture.
La cour revient, par ailleurs, sur la retenue d'eau de Caussade. Elle "déplore" que celle-ci "continue d'être exploitée". Serge Bousquet-Cassagne avait été condamné en appel, en 2022, à dix mois d'emprisonnement avec sursis pour cette réalisation. La chambre d’agriculture avait écopé d’une amende.
Face à ces conclusions, elle a également demandé à l’État de renforcer son contrôle et intervenir “si les irrégularités devaient perdurer”.
Que les autres prennent exemple sur nous : nous sommes incontournables dans le Lot-et-Garonne alors que partout ailleurs, elles sont inaudibles et invisibles.
Serge Bousquet-Cassagneprésident de la chambre d'agriculture du Lot-et-Garonne
Du côté de la chambre d’agriculture, le rapport passe mal. Dans sa réponse à la Cour des comptes, Serge Bousquet-Cassagne dénonce un travail “orienté politiquement, voire syndicalement”. Contacté par téléphone, Serge Bousquet-Cassagne se veut rassurant. "C'est une tempête dans un verre d'eau. Quand je vois les rapports sur les autres chambres d'agriculture, je me rassure", indique-t-il. La coordination rurale, très présent en Lot-et-Garonne, est le deuxième syndicat agricole en France.