C'est une expérimentation unique en son genre. À Casseneuil en Lot-et-Garonne, une classe spéciale a été créée au sein du Collège Gaston-Carrère. Douze adolescents qui risquaient le décrochage scolaire bénéficient d'un programme adapté pour leur permettre de prendre confiance et renouer avec l'enseignement.
"Je suis hyperactif, j'ai du mal à rester sur ma chaise", raconte Timéo. Cet élève de quatrième fait partie des douze jeunes qui ont intégré le programme du micro-collège de Casseneuil, en Lot-et-Garonne. Aujourd'hui, il a l'air apaisé et confiant. "Par rapport à mon ancien collège, on peut faire des pauses, on peut jouer un peu, marcher et même faire du vélo... Ça nous permet, après, de se reconcentrer".
Ce collège dans le collège, c'est un peu l'école de la seconde chance pour ces jeunes qui ont quitté le système scolaire classique. Des "décrocheurs" qui ont trouvé ici d'autres façons d'apprendre. Grâce à un effectif réduit, mais aussi de nombreuses disciplines scolaires et extrascolaires transversales, ils renouent aussi avec le collectif, le lien éducatif.
"Les aider au maximum individuellement"
"Dans mon ancien collège, les professeurs s'en fichaient un peu de moi", se souvient Maxence, élève de troisième scolarisé depuis septembre."Une fois, je bricolais et un prof m'a pris ma trousse. Du coup, j'avais du mal à me concentrer". Dans cette nouvelle structure, le jeune garçon semble avoir retrouvé un rythme qui lui convient. "J'adore ce collège. Ici, on prend le temps de m'expliquer", se réjouit-il.
Le programme permet de s'adapter à chacun et surtout, avec un effectif réduit de douze élèves, les professeurs font du sur-mesure pour des enfants de la 5ᵉ à la 3ᵉ. "On essaie de les aider au maximum individuellement", explique Ghislaine Sauvaget, la coordinatrice du micro collège."La temporalité n'est pas la même à 8 élèves qu'à 32...On a créé beaucoup d'outils pour qu'ils travaillent en autonomie".
Ici, c'est l'école qui s'adapte aux élèves. Dans cette classe aménagée spécialement pour les accueillir, il est possible pour un élève de quitter le cours collectif s'il en ressent le besoin. Une salle de repos est attenante à la salle de cours. Le mobilier également tient compte des besoins de chacun : Timéo, par exemple, utilise une table équipée d'un vélo qui lui permet de bouger ses jambes tout en suivant le cours.
Problème d'intégration
Parmi la dizaine de ces programmes en France, celui de Casseneuil est le seul en Nouvelle-Aquitaine. Il comprend un internat pour accueillir les adolescents en semaine. L'idée, c'est de créer une "bulle" sur mesure, au sein même du collège de Casseneuil et ses 225 élèves. Ce qui leur permet de rester socialement en phase avec d'autres jeunes de l'établissement.
Ces douze adolescents ont été sélectionnés par une commission interne, selon leur profil et surtout leur motivation, comme celle de leur famille. Un projet "pour les élèves qui veulent s'en sortir" qui n'est pas là pour "pallier un problème de comportements", précise Cyrille Desco, le principal du collège.
Le chef d'établissement insiste sur le fait que ce sont des jeunes "qui ont des difficultés avec la scolarité". Il peut s'agir d'élèves avec un bon niveau scolaire, des fois même des enfants à haut potentiel, mais qui "n'arrivent pas à s'intégrer à un groupe classique". Quelles que soient les raisons de leur décrochage, troubles de l'attention, phobie scolaire, problèmes de harcèlement ou accident de la vie, "le micro collège sert vraiment à leur redonner le goût de l'école".
"Un sport qui aide à me canaliser"
Coté pédagogie, en plus des matières principales (Français, mathématiques, histoire-géographie, EPS,...), d'autres matières moins scolaires viennent les instruire autrement comme des ateliers théâtre, cuisine, médiation équine, sophrologie ou encore des cours d'escrime.
Justement, l'escrime, Timéo rêvait d'en faire et, derrière son casque et son équipement blanc, le jeune garçon semble très appliqué. "C'est un sport qui m'aide à me canaliser", explique-t-il simplement. C'est aussi l'occasion sans doute pour l'adolescent de mieux gérer son hyperactivité en nourrissant aussi de nouvelles passions.
Au-delà du beau costume, c'est le partage de moment où il faut respecter l'autre et l'arbitre.
Frédéric Ducreuxépéiste encadrant
"Là, on voit un petit qui gère l'arbitrage avec beaucoup de fermeté, de bienveillance et de compétence", constate Frédéric Ducreux. Convaincu de l'apport des valeurs physiques, mentales et morales de cette discipline, l'épéiste encadre ce cours auprès des jeunes.
Près de 17 intervenants participent au programme pour ces activités alternatives. Autant de facettes qui permettent à ces jeunes de s'ouvrir et de retrouver l'envie d'apprendre.
► Reportage d'Ingrid Gallou et José Sousa.
Ce modèle de micro-collège est pour l'heure expérimental, "mais pourrait faire des petits", sourit Cyrille Desco. Ces programmes font l'objet de financement à part par l'État, le département et la Fondation de France.