À mesure que le "lac" de Caussade se remplit, les tensions se ravivent. La préfecture du Lot-et-Garonne réclame la vidange de la rétenue, invoquant des risques en cas de rupture de l'ouvrage. Mais la Chambre d'Agriculture refuse de faire machine arrière.
Construite illégalement par la Chambre d'Agriculture du Lot-et-Garonne entre 2018 et 2019, la retenue d'eau de Caussade se remplit peu à peu.
Et les tensions autour de cet ouvrage, qui vise à assurer l'approvisionnement en eau des agriculteurs, se ravivent.
Selon le dernier contrôle réalisé à la demande de la préfecture, la hauteur d'eau atteint désormais les 5 mètres le 12 février, contre 3 mètres le 18 décembre 2019.
Par un courrier en date du 26 février adressée à tous les élus du département, la préfète du Lot-et-Garonne Béatrice Lagarde annonce qu'elle entame une procédure pour obliger la Chambre à faire vidanger l'ouvrage.Cet ouvrage n'a pas été réalisé dans les risques de l'art et le risque de rupture est avéré
→ lire le courrier de la préfète du Lot-et-Garonne
Pourquoi ? Car il présente des risques de rupture, selon deux rapports cités par la préfecture. "Cet ouvrage n'a pas été réalisé dans les risques de l'art et le risque de rupture est avéré", retient la préfète.
Le rapport d'Anthea Group pointe plusieurs problèmes, dont un "défaut dans la réalisation du drainage vertical avec remise en cause de l'ouvrage à moyen et long termes, ([et des] coefficients de sécurité nettement plus faibles qu'initialement prévus et insuffisants".
Une autre étude, réalisée par l'IRSTEA, indique qu'en cas de "crue décamillenale", c'est-à-dire qui survient tous les 10 000 ans, "70 habitations pourraient être impactées en cas de rupture de la retenue pleine (920 000 m3)."
Si la Chambre d'agriculture ne fait pas procéder aux travaux sous huit jours, "des travaux d'office sont susceptibles d'être engagés sur site sous ma responsabilité, pour le compte et aux frais de la Chambre d'Agriculture".
Vers une "guérilla rurale" ?
"Ce sera une guérilla rurale qui durera 100 ans, mais je vous garantis que ce lac restera plein" réagit Patrick Franken, président de l'ASA Caussade,à la procédure enclenchée par la préfecture.
Bien informés, le présidents de la chambre d'agriculture Serge Bousquet-Cassagne et Caussade Patrick Franken ont écrit la veille du courrier préfectoral, le 25 février, à tous les élus.
→ Lire le courrier de la Chambre d'agriculture
"Nous avons fait la démonstration par de nombreuses mesures [...] que le risque de rupture était non pas MINEUR mais INEXISTANT", argumentent-ils. "Et quand bien même la digue péterait, l'eau "inonderait" des champs, des taupes et des vers de terre".
Toujours dans ce courrier, les représentants des agriculteurs indiquent craindre, en cas de vidange forcée, "des drames totalement injustifiés."
Compte-tenu des positions des deux parties, la confrontation directe entre agriculteurs et autorités semble inéluctable.
Regardez le reportage de José Sousa et Marc Lasbarrère :