Jessica Guennec, la trentaine, tente l'aventure de la terre après une vie professionnelle très différente. Un choix, une quête de sens qui accompagne un mouvement général dans la société pour mieux manger. Novice, elle se lance au sein d'une structure qui aide à mettre le pied à l'étrier.
Jessica Guennec a laissé tomber les talons aiguilles et la boutique de lunettes pour la paire de bottes et la terre. Un choix. Sous sa serre, des semis de carottes, déjà des petits pois bien accrochés à leur tuteur, des salades, du fenouil, du persil, des betteraves rouges. Le tout en culture bio forcément.
La toute jeune maraîchère vend sa production sur le marché en fin de semaine à Marmande, dans le Lot-et-Garonne, entre autres.
Une envie qui a mûri ces dernières années et qui a connu un grand coup d'accélérateur avec le premier confinement et la crise sanitaire. Car il est bien question d'un changement de vie radical pour cette mère de famille qui a deux jeunes enfants. Elle a exercé comme opticienne pendant 13 ans avant de changer de cap.
A Marmande, terre agricole de l'ouest du Lot-et-Garonne, elle a saisi sa chance. Et surtout une belle opportunité. Jessica Guennec a postulé pour occuper l'une des places de la couveuse agricole. Une pépinière pour entrepreneurs maraîchers bio.
Une conversion toute récente. Après avoir fait la saison chez Victorin, l'autre maraîcher de la couveuse agricole, Jessica s'est lancée. " Depuis le 4 janvier, je suis maraîchère. " dit-elle fièrement.
C'est venu petit à petit, l'envie de changement. Je ne savais pas trop dans quoi me lancer, et puis ma vie personnelle, l'arrivée de mes enfants, ont fait que je me suis tournée vers le bio, manger mieux et manger de bons produits locaux. Voilà pourquoi je suis aujourd'hui maraîchère.
VIDEO >> Un changement de cap radical que nous explique Jessica
L'apprentissage de la terre
Il faut tout apprendre. La culture de la terre, les bons choix de plantes, les bons gestes au bon moment. Victorin, son collègue de la couveuse agricole, est une aide précieuse. Jessica écoute, se renseigne dans les livres. Bientôt un stage court en vue aussi pour compléter le savoir incontournable.
Pour tout ce qui est irrigation, tracteur, ce sont des choses que je ne connais pas. Je découvre, c'est un autre monde. Dans ma famille, il n'y a pas d'agriculteur. Là, il n'y a pas de secret, il faut faire.
Plus dur pour une femme reconnaît Jessica. " La technique qui marche pour les attelages, c'est avec le pied ! " s'amuse-t-elle avec un sourire. Le travail ne lui fait pas peur, même par tous les temps. Quand il fait froid ou quand il pleut sous le plastique tendu de la serre. Travailler la terre, créer des parcelles pour planter, mettre en place l'irrigation " Je débute donc je mets du temps à le faire."
Planter, cultiver, récolter. Faire des tests pour voir ce qui marche, ce qui plaît aussi, quelle est la tendance pour répondre aux recherches des consommateurs. C'est ce qui intéresse la jeune femme dans sa conversion.
Le co-working en mode agricole
Une aventure rendue possible sans trop de risques grâce à un dispositif particulier sur la communauté de communes de Marmande. Ce coin du Lot-et-Garonne connu pour sa fameuse tomate du même nom.
L'intérêt de cette couveuse agricole qui accueille Jessica, c'est qu'elle permet aux jeunes pousses comme elle, nouvelle dans l'activité, de louer l'espace et le matériel indispensable à un prix accessible. Donc pas de prise de risque financier, pas besoin d'aller frapper aux portes des banques avec souvent pour seule réponse un refus : novice, vous n'êtes pas vraiment pris au sérieux. " On ne mobilise pas d'argent, on n'achète rien, on ne s'engage pas. Si ça marche tant mieux, on pourra continuer à investir, si ça ne marche pas, on passe à autre chose, ou revenir à son ancien métier par exemple comme pour moi."
Les jeunes exploitants ont trois ans pour tester leurs envies, leur capacité à s'adapter au métier, bref pour faire leur preuve. Charge à eux de poursuivre en s'installant sur des terres à louer ou à vendre. Leur démarche est déjà vue comme plus crédible par les banques. Le territoire de Marmande compte ainsi pérenniser une activité indispensable pour nourrir la population, alors que la profession vieillit, le secteur perd des agriculteurs. Et que donc, la relève doit être encouragée.
Produire pour nourrir sainement
Marmande est un territoire qui a toujours nourri la grande capitale régionale située à 100 km , Bordeaux. Forcément, les débouchés sont là, plutôt bien assurées. La demande en bio est en pleine croissance là-bas comme aux alentours. Donc pas vraiment d'inquiétudes pour trouver les clients. La vente directe et les paniers pré-commandés sur place à la couveuse ou encore les marchés sont autant d'occasion de proposer sa production.
J'espère pouvoir vivre de ma production après je ne suis pas le principal revenu de mon couple donc je peux me permettre au départ de tester et de perdre un peu de revenus. Au bout de deux ans, il faudra que je me sorte au moins un petit salaire car on ne sait pas de quoi est fait la vie.
"Je pense qu'aujourd'hui un métier qui dure une vie, ce n'est peut-être plus ça. On est peut-être amené à changer de vie régulièrement en raison du stress ou autre chose." Le pari de Jessica est aussi de réussir à s'adapter aux mutations du monde agricole. De plus en plus de professionnels de la terre vendent par exemple eux-mêmes et en direct le résultat de leur travail, en tous cas c'est ce qu'elle observe et ce qui la motive.
Son entourage a bien sûr été surpris de ce changement radical de trajectoire professionnelle quand ils l'ont vue troquer ses talons aiguilles contre les bottes. " Je les remet dès que je quitte le travail !! Ils sont ravis de me voir heureuse dans ce que je fais. "
Encore du chemin à parcourir pour savoir si ce nouveau cap est le bon pour Jessica. Mais elle avance tranquillement mais sûrement avec des idées en tête. Produire des légumes originaux, qui correspondent aussi au bon goût du moment, s'amuser à faire plaisir en travaillant en somme.
Quels sont les visages de l’agriculture d’aujourd’hui ? Pour les découvrir, cliquez sur un point, zoomez sur le territoire qui vous intéresse ou chercher la commune de votre choix avec la petite loupe. Bonnes balades au cœur du monde paysan.
La couveuse bio de Marmande >
La couveuse agricole de Val de Garonne Agglomération, située à Marmande, s’adresse à des personnes qui ont le projet de devenir maraîcher bio.
Les personnes intéressées doivent contacter la chargée de mission agriculture de Val de Garonne Agglomération au 05.64.63.00.07, mail: croller@vg-agglo.com