Manifestations anti obligation vaccinale à Bordeaux et Périgueux : le désarroi des soignants

Le passe sanitaire pour les personnels soignants entre en vigueur demain. Aujourd'hui, les opposants manifestaient. Pas forcément contre la vaccination elle-même, mais plutôt pour l'atteinte à la liberté individuelle, l'incohérence du calendrier, et l'inhumanité de la méthode.

À Périgueux depuis plus d'un mois, on se prépare à l'échéance. La médecine du travail a déjà recensé les certificats de vaccination des agents du centre hospitalier. Des informations médicales qui seront communiquées dès demain aux services du personnel de l'hôpital. Sur cette base, la direction va convoquer les agents non vaccinés pour un "entretien". S'il s'avère que les personnes convoquées sont bel et bien non-vaccinées sans raison valable, l'hôpital optera pour deux solutions : si l'agent souhaite régulariser la situation, il lui sera proposé de le faire en prenant des congés. Dans le cas contraire, l'agent peut être suspendu immédiatement.

Chacun a le droit à ses convictions. Je ne fais pas de commentaire sur les manifestations ou sur les positions des uns et des autres. Notre position c'est d'appliquer la loi, mais de le faire avec discernement et humanité par rapport aux situations individuelles des agents.

Mathieu Labat, responsable des Ressources Humaines, Hôpital de Périgueux

À Périgueux, 50 non-vaccinés

Il y aurait une cinquantaine d'agents n'ayant toujours pas reçu la première dose, sur 2850 salariés, selon la direction. Pas seulement des soignants, mais aussi des personnels techniques ou administratifs. À priori, pas de quoi désorganiser les services, même si les "réfractaires" décidaient de maintenir leur position. Mais la direction reconnaît toutefois avoir prévu cette éventualité en organisant des remplacements si nécessaire. 

Des départs liés au passe obligatoire ?

Alors que l'hôpital est déjà en manque de médecins et de personnels, il serait malvenu d'admettre que l'obligation du passe sanitaire a fait partir d'autres soignants. Ne reste pas moins qu' "un certain nombre de personnes" ont effectivement quitté l'hôpital avant la mise en œuvre du passe vaccinal, reconnaît la direction.  "C'est difficile pour nous d'en avoir la connaissance parfaite, puisqu'ils ne disent pas forcément les motifs qui les ont conduits à quitter l'établissement." explique Mathieu Labat, Directeur des Ressources Humaines. 

Si le 15 septembre est la date retenue pour la mise en application du passe sanitaire pour les soignants, le 15 octobre est la date butoir après laquelle aucune exception à la double vaccination ne sera tolérée. Le 16 octobre au matin, il faudra présenter un shéma vaccinal complet martèle la direction.

Des guerriers sans fusil

Pendant ce temps, sur le rond-point de l'hôpital, les manifestants livrent leur sentiments sur la place publique. Ils ne comprennent pas pourquoi eux, soignants, ont aujourd'hui l'obligation vaccinale alors qu'hier ils étaient les premiers à aller au front sans masque. "Des guerriers sans fusil", ajoutent-ils. Depuis, on les a soumis aux gestes barrière en leur affirmant qu'ils suffisaient. Un an et demi plus tard, changement de cap, c'est la vaccination... ou la suspension.

Ça fait un an et demi qu'on tient, mais là c'est un coup de massue, parce que tout le monde parle du vaccin, mais est-ce qu'on pense aux risques psycho-sociaux qu'il y a derrière ? On nous enlève notre métier alors que c'est une vocation. On est là pour le soin de qualité, et derrière, ce qui se passe, c'est qu'on nous met dans la précarité. On a déjà laissé nos vies de famille pendant un an et demi, là on ne va même pas pouvoir leur donner à manger parce qu'on ne pourra même pas exercer ailleurs.

Marietta Mary, syndicaliste CGT, Hôpital Périgueux

Sentiment partagé

À Bordeaux, même sentiment d'injustice pour la poignée de manifestants anti passe sanitaire réunis devant le Centre Hospitalier Charles Perrin. À l'image de Fanny, infirmière. Comme les autres elle ne serait pas opposée au vaccin "au contraire" affirme-t-elle. Ce qui lui pose problème, c'est la méthode et la contrainte.

Ma problématique à moi, c'est que je risque la suspension parce que je n'ai pas voulu me faire vacciner. Cette notion de temps où on doit être vacciné très rapidement m'inspirait pas du tout confiance. Et surtout depuis le début de la crise on a eu beaucoup de discours tellement contradictoires, même au sein des hôpitaux, que c'est compliqué d'avoir confiance !

Fanny Bécart, infirmière hôpital d'Arcachon

Fanny regrette la violation du droit fondamental de pouvoir choisir de se faire injecter quelque chose. Elle aurait voulu pouvoir prendre sa décision calmement et en ayant eu le temps de voir arriver les nouveaux vaccins.

Je pense en fait qu'on a le temps de se faire vacciner. On ne devrait pas être soumis à cette obligation en terme de temps, où on n'a même pas le temps de se retourner et où on nous met une aiguille dans le bras.

Fanny Bécart

Sans compter le quotidien de ceux qui ne se plient pas à la règle. Fanny n'hésite pas à parler de harcèlement et de dénigrement de la part de ses collègues simplement parce qu'elle ne se range pas à leur avis. Du coup, elle affirme vouloir aller au bout de sa démarche, pour dire que l'on a le droit de réfléchir autrement et pour défendre ses droits individuels personnels et au travail. Face à cette revendication légitime, la menace de perdre son salaire lui paraît démesurément injuste.

Quand même, être capables de suspendre son personnel ! La suspension c'est quelque chose ! On va avoir une suspension, c'est à dire on a plus de salaire, on ne peut pas travailler ailleurs et en gros, c'est "Vous ne pensez pas pareil, vous voulez pas, bah vous avez qu'à sortir du circuit ! Vous avez plus de salaire, vous mangerez pas, et puis réfléchissez, ça vous fera les pieds !"

Fanny Bécart

 

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