L’agence Homies Holidays et sa gérante ont été condamnées à trois mois de prison avec sursis et 3000 euros d’amende pour pratique de baux frauduleux par le tribunal judiciaire de Bayonne, dans les Pyrénées-Atlantiques. L’agence avait en effet proposé des contrats de moins d’un an, avec signature de préavis de départ post-datés. Cette condamnation est une première.
C’est un procès “hautement symbolique”, confie le collectif Alda. Ce mardi 29 octobre, le tribunal judiciaire de Bayonne a condamné l’agence immobilière Homies Holidays et sa gérante pour pratique de baux frauduleux. Cette agence, la première à avoir été dénoncée par le collectif Alda, avait en effet proposé à ses locataires de signer un préavis de départ postdaté, “un faux”, une pratique illégale qui permettait au loueur de proposer le logement à des touristes durant l’été.
Préavis postdaté
L’affaire remonte à 2021. Des locataires font appel au collectif Alda, qui lutte contre les pratiques frauduleuses dans le domaine du logement. Ces locataires ont signé un bail, pour un logement meublé. Cependant, à leur entrée dans le logement, en octobre, l’agence, qui propose des locations à Biarritz et Bidart, leur demande également de signer un préavis de départ, en date d’avril, pour un départ en juin.
Un document postdaté illégal que dénonçaient le collectif et les avocats des victimes. “L’acte délictuel a été reconnu. C’est un délit en matière commerciale, mais rapporté au droit commun, c'est une escroquerie”, indique Me Xantiana Cachenaut, l’avocate des victimes.
Le professionnel s’est joué de leur vulnérabilité et de leur situation de fragilité par rapport au marché locatif.
Me Xantiana Cachenaut,avocate des victimes
Pire, excepté lorsqu’il s’agit d’étudiants ou de mobilité spécifique, les baux ne peuvent pas être inférieurs à un an. Celui de ces locataires était de six mois.
"Un signal fort"
À la sortie du tribunal, le collectif Alda s’est félicité pour un procès “dans le sens du droit de vivre et de se loger au Pays basque”. “Les faits sont graves, les peines en sont à la hauteur. Ça envoie aussi un signal à tous les propriétaires et les agences qui voudraient avoir des pratiques frauduleuses", indique Malika Peyraut, coprésident d’Alda.
Il n’y a plus d'impunité et que ça peut même passer par la case prison.
Malika Peyraut,coprésidente du collectif Alda.
Ce mardi 29 octobre, le tribunal est en effet allé au-delà des réquisitions du parquet en condamnant à 3 mois de sursis et 3000 euros d’amende l’agence et sa gérante. “Les parties civiles ont été entendues et la justice a pris la mesure de cette affaire et de la problématique des logements. C’est un signal fort adressé par la justice”, indique Me Xantiana Cachenaut, l’avocate des victimes.
"Peine pour l'exemple"
De son côté, la gérante reconnaît une “faute professionnelle” tout en avançant un “manque d’expérience” et l’absence d’enrichissement professionnel. Face aux sanctions prononcées par le tribunal, son avocat “envisage fortement de faire appel”. “Elle n’est pas une multirécidiviste, n’a jamais été condamnée et il y a un certain nombre de circonstances qui n’ont pas été prises en compte par le tribunal. Sa décision est critiquable tant sur les faits que sur la personnalisation de la peine ”, indique Me Pierre-André Truttmann, l’avocat de l’accusée.
Lui, dénonce d’ailleurs une “peine pour l’exemple”. “Ce type d’affaire est particulièrement scruté et médiatisé avec un activisme d’un nouveau genre. Les tribunaux veulent faire jurisprudence sur ces sujets-là. J’ai une difficulté de sévérité ", estime l'avocat de la gérante immobilière.
J'ai l’impression qu’elle a été jugée plus pour l’exemple que pour ce qu’elle a réellement fait.
Me Pierre-André Truttmann,avocat de la gérante immobilière
Un an après ces révélations, un comité de lutte contre les baux frauduleux, inédit, a été créé, en 2022, pour lutter contre ces pratiques. “Depuis la mise ne place du comité, on n’a plus de bail frauduleux par une agence même s’il reste encore des propriétaires. On voit que les choses sont en train de changer ”, confie Xebax Christy, coprésident de l’association Alda. Depuis, 33 signalements ont été faits, selon la préfecture des Pyrénées-Atlantiques.
La problématique du logement au Pays basque a même été le point de départ du projet de loi du député Inaki Echaniz. Elle était examinée en commission mixte paritaire, après adoption par le Sénat et l'Assemblée nationale, ce lundi 28 octobre. Ce projet de loi vise à davantage réguler la location de meublés de tourisme en réduisant notamment l'avantage fiscal de la location touristique.