La population d'ours des Pyrénées s'est agrandie cette année de deux nouveaux venus. Ils viennent d'être repérés côté espagnol. Les défenseurs du plantigrade peuvent espérer une dynamique favorable de peuplement.
Ce sont les équipes espagnoles qui les ont observés. Leurs appareils à déclenchement automatique ont capturé le 27 août des images assez remarquables de la femelle Hvala, l'ourse slovène lâchée dans le massif en 2006, et de ses deux oursons. Ils pèsent peut-être huit ou dix kilos. Ils sont probablement nés en janvier ou février, et même s'ils restent fragiles (aux maladies, aux accidents, voire aux mâles dominants), ils sont en bonne santé a indiqué François Arcangeli, président de l'association Pays de l'ours-Adet. Ils escaladent joyeusement un conifère du Val d'Aran espagnol sous la surveillance de leur mère.
Des images à découvrir sur le site du conseil général d'Aran
Hvala super maman ours
Hvala (prononcez ouala, en slovène) se confirme, elle, en génitrice et mère "idéale", dit un autre pro-ours, Alain Reynes : celle qui eut pour marraine Carla Bruni a eu deux petits en 2007, 2009, 2011 et 2013, et elle leur a tous fait passer le cap de la première année décisive pour leur survie.
Ses deux derniers rejetons sont les premiers nouveau-nés détectés en vie en 2013 dans les Pyrénées. Un autre ourson de l'année a été retrouvé mort au printemps côté espagnol.
"On a de gros espoirs d'en avoir d'autres, a indiqué M. Arcangeli : on a plusieurs femelles particulièrement discrètes depuis le printemps et, habituellement, des femelles discrètes ce sont des femelles suitées (suivies de leurs petits) qui se tiennent loin des mâles".
Le mâle peut, en effet, tuer des petits pour s'accoupler avec une femelle qui se refusera à lui tant qu'elle veillera sur sa progéniture.
la querelle passionnelle entre les pro et les anti-ours
L'ours ne subsiste plus en France à l'état sauvage que dans les Pyrénées. Au dernier recensement officiel, ilsétaient au moins 22 côté français ou espagnol. C'est bien trop peu pour assurer la survie de l'espèce, disent les partisans du plantigrade. C'est beaucoup trop pour ses détracteurs, au premier rang desquels les éleveurs pour lesquels la présence de l'ours est incompatible avec l'économie montagnarde.
La querelle est passionnelle entre les deux camps et épineuse pour le gouvernement.
Huit ours slovènes ont été introduits dans le massif depuis 1996. En 2006, les derniers lâchers ont mobilisé des milliers d'opposants, parfois violemment.
Les pro-ours se sont vivement émus quand l'ancien gouvernement a renoncé en 2011 à l'engagement de lâcher une femelle, avec l'apparente intention de ne pas exciter les passions. En janvier, l'actuel exécutif, et sa ministre de l'Écologie de l'époque Delphine Batho, ont prolongé le moratoire de fait. La population grandit à un rythme satisfaisant, ont-ils justifié.
Une dynamique "intéressante" mais pas "suffisante"
Les pro-ours n'en sont pas à partager cet avis. Les deux nouvelles naissances donnent cependant à M. Arcangeli des raisons d'employer un ton moins alarmiste qu'à l'habitude.Certes, l'ours est dangereusement menacé d'extinction dans l'ouest du massif. Certes aussi, des ours ont pu mourir
sans qu'on le sache encore.
Mais les femelles en âge théorique de se reproduire étaient au moins cinq cette année. La population est maintenant rassemblée dans les Pyrénées centrales, à deux individus près, ce qui est favorable aux rencontres. Et la terreur du massif, Pyros, le père de tous les ours conçus dans les Pyrénées et peut-être encore des deux derniers, ne semble plus le grand mâle dominant d'antan, qui faisait fuir tous ses rivaux.
Des lâchers homéopathiques
Ainsi M. Arcangeli imagine que la population pourrait atteindre une trentaine d'individus. Une dynamique "intéressante", mais vraiment insuffisante, nuance-t-il.Des lâchers, homéopathiques, restent nécessaires, dit-il, et il ne faut surtout pas entretenir chez les opposants à l'ours l'idée que l'on pourrait revenir en arrière, comme l'a fait, selon lui, le président du conseil général de l'Ariège Augustin Bonrepaux (PS) récemment en appelant au président François Hollande.
Quant au nouveau ministre de l'Écologie, "je ne peux pas imaginer qu'un homme qui s'appelle Martin soit défavorable à l'ours : c'est le nom que donnaient les Pyrénéens à l'ours autrefois".