La France a remis à l'Espagne ses archives judiciaires sur l'ETA et près de 300 armes et pièces d'armement qui seront examinées dans l'espoir de résoudre des crimes attribués à l'organisation séparatiste basque, a annoncé le ministère de l'Intérieur espagnol vendredi.
Cette remise "est inédite en Europe" et marque "une avancée sans précédent des mécanismes de coopération policière et judiciaire", s'est félicité le ministère.
Des camions sous escorte de la Garde civile
La remise, qui avait commencé en 2016, s'est achevée entre les 5 et 6 février.
Un convoi de camions de la garde civile espagnole a été nécessaire pour transporter entre Paris et Madrid ces archives représentant cinquante dossiers d'enquête sur l'organisation séparatiste.
La précieuse cargaison était escortée par une unité d'élite de la Garde civile et une patrouille de la gendarmerie française, assure le ministère dans un communiqué.
El “archivo de ETA” de Francia, con miles de documentos de las operaciones antiterroristas más relevantes, ya está en España con 2 objetivos: potenciar la investigación de los crímenes sin resolver judicialmente y contribuir a dignificar la memoria de las víctimas del terrorismo pic.twitter.com/bF99W4LwuL
— Ministerio Interior (@interiorgob) 9 février 2018
Une collaboration de plus en plus marquée entre France et Espagne
L'ETA, à laquelle on attribue des attentats ayant coûté la vie à au moins 829 personnes entre les années 1960 et 2010, agissait principalement en Espagne, mais également en France, où elle avait ses bases arrières et des caches d'armes, en particulier au Pays basque français.
A partir du milieu des années 1980, la France a étroitement coopéré avec l'Espagne dans la lutte contre l'ETA.
"Il s'agit précisemment des instructions les plus importantes de ces dernières années portant sur les opérations antiterroristes de la police française en collaboration avec les services de renseignement espagnols", explique le ministère.
La plupart de ces enquêtes ont été orchestrées par la juge antiterroriste Laurence Le Vert, spécialisée dans les affaires basques, qui avait plaidé pour cette remise.
La juge, qui figura sur la liste des cibles de l'ETA, l'a aussi connue de près, interrogeant pendant des heures dans son bureau de la galerie Saint Eloi du Palais de justice de Paris des dizaines de ses membres.
Les 300 armes et pièces d'armement remises à l'Espagne (pistolets, revolvers, armes dissimulées dans des objets, lance-grenades...) feront l'objet d'expertises balistiques pour tenter de résoudre des attentats n'ayant pas été éclaircis.
En 2016, le président du Tribunal de grande instance de Paris, Jean-Michel Hayat, avait déjà remis au ministre de l'Intérieur de l'époque Jorge Fernandez Diaz un inventaire de documents et autres effets -- y compris des armes - saisis à l'ETA dans le cadre d'enquêtes menées en France sur l'organisation clandestine.
L'ETA a renoncé en octobre 2011 à la violence, sans pour autant se dissoudre. Elle pourrait s'y décider en 2018, selon une source spécialisée au Pays basque.