Le col de Lizarrieta est-il plombé par la chasse au fusil ?

La chasse au fusil est une pratique encore très présente en France. Peu réglementée en matière de tirs, elle pose question notamment par l’utilisation de ses cartouches faites de plomb. Au Pays-Basque, l’association C PAL (comptage protection et animation à Lizarrieta) alerte sur la forte présence du métal sur le col de Lizarrieta et des dangers qui peuvent en découler.

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À plus de 400 m d’altitude, à la frontière franco-espagnole, les plaines du col de Lizarrieta s’étendent à perte de vue pour le plus grand plaisir des curieux venus apprécier les paysages. Mais au milieu des champs recouverts d’herbe, des billes de plomb se mélangent désormais au décor.

Une présence étonnante dans la forêt de Sare et le col de Lizarrieta, tout deux situés sur une zone Natura 2000. Ce label incite en effet à la préservation de son patrimoine naturel et à la quiétude des organismes vivants qui s’y trouvent. 

1,6 tonne de plomb

Selon l'association de protection environnementale C PAL, ces résidus de plomb seraient causés par les chasseurs qui profitent de la forte densité d’oiseaux présents sur le col pour s’adonner à la pratique du tir au vol. Le col de Lizarrieta est l’un des passages les plus importants en France pour les migrations d’oiseaux, avec plus de 160 espèces recensées sur place.

C PAL (comptage protection et animation à Lizarrieta), indique qu'entre 2022 et 2023, il y aurait eu en moyenne plus de 50 000 tirs par an sur le col de Lizarrieta. Chaque cartouche utilisée dans les fusils contenant 32 g de plomb, plus de 1,6 tonne de plomb y serait ainsi répandue chaque année.

Un travail de longue haleine

Alertés par ces chiffres, l’association C PAL a décidé de mesurer et d’analyser la concentration de plomb dans le sol. Adrien de Montaudouin en est le président : “À la base, on fait du comptage d’animaux migrateurs et on s’inquiétait du nombre de coups de feu qui étaient entendus chaque année”, justifie-t-il. Le projet débute en 2021.“On a prélevé quelques échantillons et on a fait nos propres analyses pour réaliser un état des lieux”, explique le président.

Entre 2021 et 2022, 29 échantillons ont été prélevés. Parmi eux, des extraits de sol (potager, sol forestier), de matières organiques (champignons, courges) et un échantillon de sédiments issu d'un abreuvoir. Ces prélèvements ont ensuite été envoyés pour analyse à une plateforme spécialisée de l'Université de Bordeaux-CNRS.

Une zone dangereuse ?

Les résultats des analyses, publiés dans un rapport en septembre 2023, confirment cette pollution au plomb. Le sol de la forêt de Sare présente des taux de plomb de 820 Mg/kg, soit le double de la limite, fixée à 400 Mg/kg, par le bureau des recherches géologiques et minières (BRGM). Cette concentration en plomb est également supérieure à la moyenne nationale. 

Une forte concentration problématique :  ce métal peut avoir de graves conséquences notamment sur la santé. Selon l’OMS, “l’exposition au plomb peut avoir une incidence sur plusieurs systèmes de l’organisme et il n’existe pas de seuil au-dessous duquel l’exposition au plomb n’aurait pas d’effets nocifs”.

Le plomb ayant été retrouvé sur le sol, mais aussi sur les champignons ou même dans l’eau, il pourrait aussi toucher le bétail présent sur place, selon le rapport. Le COPIL (comité de pilotage des sites Natura 2000) a pour sa part indiqué, dans le compte-rendu d'une réunion du 12 décembre, que l'eau en aval du col est excellente au regard des résultats de la qualité physico-chimique. Le comité confirme cependant la concentration anormale de plomb et estime que cette étude devrait être approfondie. 

Une situation complexe

Si le rapport publié par l’association pointe très clairement la chasse comme étant la cause de cette pollution au plomb, la FDC 64 (fédération départementale des chasseurs des Pyrénées-Atlantiques) n’est pas du même avis. Selon elle, le rapport ne prouve pas que la présence de plomb sur la zone soit le fait de chasseurs."Il peut y avoir d'autres sources qui expliquent cette présence, il faut faire des analyses comparatives pour vérifier tout ça", explique Christian Peboscq, le directeur de la FDC 64.

La situation semble encore plus complexe. Le col étant transfrontalier, la FDC 64 dément être à l’origine des tirs sur le col de Lizarrieta. "Il n'y a aucun chasseur de Sare qui tire là-bas, 90 % des chasseurs sur place sont des Espagnols et c'est la mairie d'Etxalar qui loue les postes de chasse". Les chasseurs locaux "vivent très mal" cette situation qui les met " indirectement en cause" selon le directeur. La fédération se dit même prête à coopérer.

On est prêts à participer à cette étude et voir ce qu'il en est.

Christian Peboscq

Directeur de la FDC 64

 

"Des lanceurs d’alerte"

Avec l’obtention de tels résultats, C PAL espère une prise de conscience et des actions, comme l’explique Aurélien André, membre de l’association : “On se positionne comme des lanceurs d’alerte, ce qu’on attend maintenant, c’est que les pouvoirs publics s’emparent de ça et fassent des études plus poussées pour connaître l’ampleur du problème et alerter les populations.”

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L’association C PAL (comptage protection et animation à Lizarrieta) alerte sur la forte présence de plomb sur le col de Lizarrieta. ©Laurianne De Casanove France 3 Aquitaine


En attendant d’autres analyses plus complètes, l’association invite la population locale à être vigilante sur place. De son côté, la mairie de Sare n’a pour l’instant déployé aucun dispositif spécifique sur place, et aucune étude complémentaire n’est à ce jour prévue.

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