Trop de charges, de travail administratif, et pas assez de temps pour soigner les patients. Les médecins sont en grève et dénoncent leurs conditions de travail. Parmi leurs revendications : l'augmentation du tarif de la consultation, une demande pas toujours comprise par les patients.
Ils étaient plusieurs milliers à battre le pavé jeudi à Paris. En colère, les médecins généralistes dénoncent leurs conditions de travail et réclament une revalorisation du tarif de leur consultation.
Installé à Bizanos en Béarn, Vonnick Corvest, 47 ans, est membre du collectif Médecins pour demain, à l'origine de la mobilisation. Il avait, lui aussi, décidé de se mettre en grève et de fermer son cabinet. Brassard rouge autour du bras, il n'a vu aucun patient ce jeudi. Un choix de fermeture ponctuelle, qu'il justifie.
Manque d'attractivité
"Notre métier, c'est une relation entre des patients et des médecins. Pour certains, on fait quasiment partie de la famille, c'est pour ça qu'on est rarement en grève", explique-t-il.
"Notre problème, c'est le manque d'attractivité de notre profession qui entraine des désertifications médicales. Seuls dix pour cent des internes en médecine générale, lorsqu'ils sortent de leurs études, font le choix de se s'installer en tant que médecins généralistes en ville", rappelle le docteur Corvest.
Pour les médecins, la lourdeur des charges joue pour beaucoup. D'où cette requête d'une consultation à 50 euros, prise en charge par la Sécurité sociale et les mutuelles, afin notamment de pouvoir recruter du personnel. " On veut rester dans la société pour offrir aux gens du soin. Ces demandes d'urgence sont pour améliorer l'accès au soin : les gens n'arrivent plus à voir leur médecin généraliste suffisamment vite. Sur Pau, les médecins refusent des nouveaux patients", poursuit-il. Entre les départs à la retraite et les médecins qui retirent leur plaque, les médecins viennent à manquer. Conséquence, poursuit Vonnick Corvets, ils se réorientent vers des cabinets déjà pleins à craquer.
Certains patients doivent patienter jusqu'à quinze jours pour venir nous voir. Cette situation est intenable. Cela fait vingt ans qu'on tire le signal d'alarme, et il ne se passe rien.
Dr Vonnick Corvest, médecin à Bizanos (64)à France 3 Pau Aquitaine
Selon le médecin béarnais, 20 % du temps des médecins libéraux est consacré à des tâches administratives. "Si on enlève ce temps-là, ça nous permettra de voir plus de patients, ou de les voir "mieux". On est obligés pour pouvoir faire face aux charges et à l'inflation de voir de plus en plus de patients. Et ça, c'est au détriment de la qualité du soin", déplore-t-il.
Trop de certificats médicaux
Autre motif d'insatisfaction : la multiplication des certificats médicaux. "On en a pour tout : quand vous êtes malades, il faut qu'on fasse un arrêt de travail. Si vous avez une gastro pendant trois jours et que vous parvenez à nous voir quinze jours après, la gastro est finie. On doit donc faire un certificat sur la bonne foi du patient. Nous demandons que pour les arrêts de moins de trois jours, les patients fassent la déclaration sur Internet, comme ça a été le cas avec le Covid."
SOS Médecins débordé, mais solidaire du mouvement
Conséquence de ce manque de médecins libéraux : SOS médecins est débordé. Sébastien Uyttewaal, président de SOS médecin à Pau le constate chaque jour. "On a fait plus de 200 appels hier. Mais c'est le quotidien, qu'il y ait grève ou pas. Il y a de toute façon un manque de médecins sur Pau. L'an dernier, plus de 10 000 Palois n'avaient pas de médecin traitant", souligne-t-il. Lui-même assure "être solidaire de cette grève".
"Il faut un choc d'attractivité pour rendre plus attractif le métier de médecin généraliste. Augmenter l'acte, et arrêter tout ce qui prend du temps médical au médecin et lui faciliter l'exercice", estime-t-il. Pour autant, il constate que le mouvement n'est pas compris des patients. "On n'est pas très aimés, ni soutenus en ce moment", admet-il. Les gens n'ont plus de solution pour se faire soigner, et se font de plus en plus agressifs", poursuit-il, alors que trois médecins de l'association ont été agressés sur les six derniers mois.