9 dossiers viennent d'être déposés sur le bureau du procureur de Poitiers, une dizaine d'autres devrait suivre. Ces prisonniers, logés dans le bâtiment incendié, déposent plainte contre X pour non assistance à personne en danger. Ils décrivent une nuit dans les fumées de leurs cellules, sans soins.
Le 12 septembre dernier, durant plusieurs heures, le centre de détention pour hommes de Poitiers Vivonne est le théâtre d'un incendie provoqué par des prisonniers. Toute l'attention médiatique est alors concentrée sur cette mutinerie spectaculaire et son dénouement.
En parallèle à l'action des pompiers et des forces de sécurité spéciales dépêchées sur place, une centaine de prisonniers enfermés à des étages différents aurait été laissée sur place, dans les fumées et sans information.
Des témoignages concordants
Déjà chargée de la défense d'un certain nombre de détenus de Poitiers Vivonne, l'avocate Patricia Coutant récolte depuis plusieurs semaines leurs récits de la nuit du 12 au 13 septembre dernier. Tous décrivent l'épaisse fumée noire qui s'insinue dans les cellules où ils ont été contraints de retourner dès le début de la mutinerie. Ils expliquent s'y confiner comme ils peuvent et espèrer leur évacuation.
Mais, vers 20h, le courant est coupé. Impossible pour eux de suivre l'évolution de la situation grâce aux informations télévisées. Toujours d'après ces témoignages, les surveillants quittent les lieux. Comme cela est précisé dans le texte de la plainte dont nous disposons : "Une fois le personnel pénitentiaire évacué et les interphones hors services, il était radicalement impossible d'alerter qui que ce soit"
Vers minuit, ils racontent avoir été rapidement ravitaillés et laissés seuls de nouveau. A ce moment-là, la soixantaine de détenus présents à l'étage de la mutinerie (et de l'incendie) a été évacuée vers un gymnase. Les pompiers et le SAMU, avec leur poste médical avancé installé dans l'enceinte de la prison, ont reçu une cinquantaine de victimes pour soins ou contrôle, personne ni du premier étage, ni du rez-de-chaussée.
Ceux-là précisent qu'ils ne retrouveront l'air libre que le lendemain après-midi, sans la moindre vérification de leur état de santé.
L'administration dément formellement
Outre la mise en examen des deux détenus à l'origine de la mutinerie, une nouvelle procédure débute donc au pénal, visant cette fois l'administration pénitentiaire. Elle sera complétée très prochainement de plaintes similaires devant le tribunal administratif.
Sollicitée pour interview, la direction interrégionale des services pénitentiaires de Bordeaux dément l'ensemble de ces allégations. Jean-Michel Camu, directeur adjoint, explique que les détenus enfermés au premier et au rez-de-chaussée n'ont pas souffert des fumées, que du personnel pénitentiaire est constamment resté à portée de voix et que l'hôpital de campagne était prêt à les recevoir en cas de besoin.
Il souligne également le comportement exemplaire des pompiers et du personnel pénitentiaire dans la gestion de cette soirée rocambolesque. Pour mémoire, le bilan humain de cette mutinerie ne sera que d'une dizaine de blessés.