À la réserve naturelle du Pinail, près de Poitiers, les observations de l'équipe scientifique sont une mine d'informations précieuses sur la qualité des sols et le retour d'une plus grande biodiversité. L'analyse des champignons y est centrale.
Dans la réserve naturelle du Pinail, près de Poitiers, les chemins conduisent parfois à de très belles surprises. Ce jour-là, Yann Sellier, responsable scientifique du site, tombe sur un hygrocybe miniata, un champignon à la chair jaune à rouge orangé.
"Quand ils sont présents, on sait que le sol n'a pas été perturbé physiquement ou chimiquement, explique Yann Sellier. Ça veut dire : zéro engrais, zéro pesticide, depuis au moins cinquante ou soixante-dix ans, parfois plus de cent ans pour certaines espèces qui sont vraiment dans le top des espèces bio-indicatrices de la stabilité physique et chimique des sols."
Ces variétés modèles comptent parmi les plus recherchées au moment du recensement des champignons dans la réserve du Pinail. Elles sont d'une "rareté absolue" car elles figurent parmi ces "champignons qui ont disparu à 95 % ces 75 dernières années en Europe de l'Ouest".
Les champignons nous ouvrent une fenêtre sur un monde que l'on connaît très peu
Yann SellierResponsable scientifique de la réserve du Pinail
Yann Sellier explique "que l'on ne voit rien dans le sol". Impossible à première vue d'en évaluer la qualité ? Sauf que l'étude des champignons localisés sur nos terres se révèle "particulièrement intéressante". "Ils vont nous ouvrir une fenêtre sur un monde que l'on connaît très peu et pour lesquels on a un niveau de compréhension qui est très faible actuellement. Leur présence ou leur absence va nous permettre de dire : ici, ça se passe bien ou, ici, ça se passe mal."
La réserve naturelle du Pinail constitue l'exemple "parfait" de la "reconquête de la biodiversité après le passage de l'homme". Ancienne friche industrielle, sur laquelle, pendant 1000 ans, l'homme a exploité la pierre de meule pour les moulins, elle est devenue une zone laissée à la nature. L'homme continue d'y faire "du pâturage" et de "la fauche". Les observations des scientifiques sur l'état de la terre du Pinail tendent ainsi à montrer que "lorsque l'on a une pratique dynamique de respect de l'environnement, on peut retrouver de la biodiversité".
À l'heure où les champignons sont désormais classifiés parmi les espèces menacées en France, l'exemple poitevin suggère que tout n'est pas perdu. À condition d'adopter de nouvelles pratiques au plus vite.