Le versement mobilité des 40 communes de Grand Poitiers passe de 1,3% à 2% à l'horizon 2023. La nouvelle hausse de la fiscalité passe mal au sein d'un certain nombre de communes de Grand Poitiers. Pour la majorité, c'est pourtant le moment d'offrir une "politique ambitieuse".
Les mesures d’augmentation de la fiscalité communautaire impulsées par la majorité de Florence Jardin à Grand Poitiers ont suscité l’ire d’une partie de l’opposition, dès l’ouverture de la séance du conseil communautaire de Grand Poitiers, vendredi 24 septembre. Après l’augmentation de 300% de la part communautaire de la taxe foncière, l’augmentation du tarif des parkings et des bus à l'unité, l’équipe communautaire met au vote un relèvement du taux du versement mobilité versé par les 40 communes de Grand Poitiers de 1,5% à 1,8%, au 1er janvier 2022 et à 2% au 1er janvier 2023.
Quand il faut taxer, cela concerne tout le monde, quand il faut aider, vous filtrez !
Élu du groupe Notre priorité, c’est vous ! (LREM), Anthony Brottier, s’exclame d'emblée : "Quand il faut taxer, cela concerne tout le monde, quand il faut aider, vous filtrez !", faisant référence au refus de la majorité "de considérer la rénovation des équipements sportifs publics comme une priorité pour nos associations".
Plus généralement l’intervention de l’ancien vice-président de Grand Poitiers fustige la méthode de la présidente, faisant état de "menaces" précédant "les délibérations importantes".
"Le premier de vos engagements était (de faire) de la politique autrement, (…) c’est réussi ! (…) Ceux qui expriment des désaccords sont écartés et vous avez réussi, ce qui n’était pas évident, à accentuer la fracture entre les communes rurales et celles urbaines", lance l'ancien vice-président aux sports, évincé de son poste le 2 juillet dernier.
À Grand Poitiers, le transport est responsable de 56% des émissions de gaz à effet de serre.
Alors qu’elle prend la parole pour la présentation de la révision du plan mobilité, Sylvie Aubert, vice-présidente de Grand Poitiers, indique que "sur notre communauté urbaine, le transport est responsable de 56% des émissions de gaz à effet de serre" et avance le chiffre de "752 kt équivalent de CO2".
Frankie Angebault, vice-président, également rapporteur sur ce dossier, ajoute que le territoire de Grand Poitiers "est soumis régulièrement aux alertes à la sécheresse". Il estime qu’il faut "proposer d’autres usages que la voiture : le vélo, la marche, la voiture partagée…"
Nous voulons aller vers une politique ambitieuse pour offrir à nos citoyens et à nos entreprises de vraies solutions de mobilité.
L’élu rappelle que le taux actuel du versement mobilité à 1,30% n’a pas augmenté depuis dix ans "alors qu’il a ailleurs régulièrement augmenté". L’augmentation proposée jusqu'à 2% doit permettre de récolter 5,2 millions d’euros supplémentaires.
Son objectif, dit-il, est "d’aller vers une politique ambitieuse pour offrir à nos citoyens et à nos entreprises de vraies solutions de mobilité". Il dessine trois axes de travail, sur le transport public, un plan vélo, et sur les mobilités dans l’agglomération.
33% Vitalis encore au diesel
Il note que 33% des bus de Vitalis circulent encore au diesel et envisage d’accélérer le renouvellement du parc avec des véhicules circulant au carburant décarboné BioGNV. En ce qui concerne le vélo, il entend accélérer la politique d’accès au vélo (Cap vélo, chèque vélo électrique, vélos en libre service) et l’aménagement de nouveaux axes cyclables en ville et entre communes.
L’annonce suscite un réel agacement parmi les élus. Certains annoncent qu'ils vont s'abstenir sur le vote. Le maire de Vouneuil-sous-Biard, par exemple, Jean-Charles Auzanneau, explique sa position : "Le travail, je le salue. Je dis juste que ce n’est pas le bon tempo. (…) Il faut faire attention à ce que l’impôt ne tue pas l’impôt ! Attention à ne pas surtaxer !"
A Jaunay-Marigny, Jérôme Neveu, lance : "L’urgence climatique n’est pas une urgence fiscale !" Il ajoute : "Les attentes sont trop fortes au vu de nos moyens. Il faut renoncer à une fuite en avant jusqu’à épuiser nos ressources économiques locales."
On n’affiche pas la force d’une politique par la seule arme fiscale !
Pierre-Étienne Rouet, du groupe Notre priorité, c’est vous ! (LREM), estime que la présidente et sa majorité font "peser sur les entreprises et les services publics une charge financière supplémentaire". Le versement mobilité est basé sur la masse salariale des entreprises.
François Blanchard, de la précédente majorité socialiste d’Alain Claeys, chiffre cette augmentation. Pour le CHU de Poitiers, qui jusqu’à aujourd’hui "versait 2.456.000 euros de versement mobilité versera désormais 1.322.000 euros supplémentaires". Pour lui, c’est autant d’argent qui n’ira pas "au renforcement des soins, à la recherche". Pour l’université, le montant est évalué par l’élu "à 650.000 euros supplémentaire".
Alain Claeys, président sortant de Grand Poitiers (et maire sortant), saisit l’occasion pour adresser un message à la maire de Poitiers, Léonore Moncond’huy. "On n’affiche pas la force d’une politique par la seule arme fiscale. Avec cette seule arme, vous allez susciter un certain nombre de réactions contraires à l’effet recherché. Seule 19 villes de 100.000 habitants en France sont passées à un taux à 2% et elles ont toutes un tram ! Poitiers non !", lance-t-il. S’il reconnaît que l’ambition est "légitime", "l’arme fiscale n’est pas la solution".
De leurs côtés, les élus communistes annoncent qu’ils voteront la délibération.
En clôture des échanges, Franckie Angebault, cite, "ça va vous surprendre, Emmanuel Macron. Il disait il y a peu sur Twitter : 'La prise de conscience est derrière nous, il faut agir maintenant'".
La mesure a finalement été adoptée par 46 voix pour, 22 contre et 15 abstentions.