Les représentants des différents barreaux de la Cour d'Appel de Poitiers entendent protester ainsi contre la disparition de la chambre civile et d'autres réorganisations. Pour eux, ces changements, conséquence direct du sous-effectif de magistrats, vont allonger les délais pour les justiciables.
Ils ne viendront donc pas écouter la prise de parole du président de la Cour d'Appel de Poitiers. Les bâtonniers de la Vienne, des Deux-Sèvres, de Charente-Maritime et de Vendée ont rédigé une motion où ils préviennent de ce boycott. Ils représentent environ 1500 avocats.
Un sous-effectif jamais atteint
Pour mémoire, en janvier dernier, la cour d'appel annonce la mise en sommeil de la troisième chambre civile (chargée d'examiner les dossiers de succession, de droit de propriété ou de conflit de voisinage). Un argument à l'époque présenté comme conjoncturel, lié à la surcharge des assises.Sauf que fin juillet, les avocats sont informés de la disparition pure et simple de cette chambre. Un projet débattu quelques jours avant, en interne, entre magistrats. Dans son courrier, le premier président de la cour d'Appel, Thierry Hanouët explique sa décision par un important sous-effectif de magistrats. D'ici quelques mois, 20% des postes seront non-pourvus (notamment en raison de départs en retraite non remplacés). Plus précisémment, en décembre, 14 postes seront vacants sur l'ensemble de la cour d'appel de Poitiers.
En France, l'an dernier, il manquait environ 480 magistrats sur un total de 7500, soit un taux de vacance de 5 à 6%. Poitiers se situe donc bien au-dessus de cette tendance.
Des délais d'audience inconnus
Les avocats regrettent profondémment cette décision, prise sans concertation, et surtout ses conséquences. Ce n'est pas seulement la 3e chambre qui disparaît mais les 5 chambres sont remplacées par un mode d'organisation inédit, en pôles (civil, social, familial, pénal, commercial et économique...). Pour le secrétaire général de la Cour d'Appel, David Meleuc, cet arbitrage permet de ventiler les dossiers de la 3e chambre, gelés depuis plusieurs mois, vers d'autres services et de les confier de nouveau à un magistrat. Avec, toutefois, pour conséquence mécanique un allongement moyen des délais de traitement pour tous les dossiers.Me Thomas Drouineau, le bâtonnier de Poitiers, n'hésite pas à qualifier la situation de "flou artistique, de nivellement par le bas insupportable dans un service public". Premières victimes, les justiciables en attente de jugement (qu'ils soient incarcérés ou non) avec pour certains déjà des audiences déprogrammées, et, pour l'immense majorité, des délais qui s'allongent.
Il s'interroge également sur l'opacité entourant ces arbitrages. Emanent-ils directement de la Chancellerie ? Entrent-ils dans un plan déjà convenu de suppression de la Cour d'Appel de Poitiers ? D'un éventuel rattachement à celle de Bordeaux ?