C’est la période de récolte du safran. En Poitou-Charentes, deux régions ont eu une production très importante, l’Angoumois et le Poitou, avant de disparaître au 18ᵉ siècle. En Charente, une association souhaite redonner vie à cette épice. Une dizaine de safraniers professionnels est désormais installée dans le département.
Elles poussent au compte-goutte. Des petites fleurs de crocus discrètes apparaissent sur ces mottes de terre. Guillaume Bouyer, safranier et vice-président de l’association "Safran de l’Angoumois" les récolte à la main une à une. "C’est une fleur très éphémère. On a environ 12 heures une fois qu’elle est sortie pour la traiter : la cueillir, la faire sécher et la conditionner. Elle est très délicate."
Derrière ce violet intense se cache ce que l’on appelle l’or rouge. Vendu en moyenne 40 000 euros le kilo. Aavant de devenir une épice, il y a l’émondage qui consiste à prélever le pistil, puis un séchage précis, température, hygrométrie… Le reste est une histoire de temps. Guillaume est l’un des rares à pratiquer la maturation du safran.
On fait vieillir, donc on met dans des bocaux en verre avec des bouchons en liège. Cela permet une maturation lente. Comme un bon vin en cave. Les arômes sont donc complètement différents : très floraux. Plus le safran vieillit, plus il sera amer, fort, profond… Un peu moins léger.
Guillaume BouyerSafranier professionnel, vice-président de l’association "Safran de l’Angoumois"
Une épice cultivée ancestralement dans le département
On compte une dizaine de producteurs professionnels en Charente. Au 16ᵉ siècle, le safran était déjà cultivé dans l’Angoumois. Une association souhaite même lui redonner ses lettres de noblesse en se replongeant dans l’histoire locale.
"Chaque seigneur fait sa petite culture, mais très confidentielle, qu’ils baptiseront salon de l’Angoumois ici en Charente, à La Rochefoucauld, Champniers, Vars, Brie. Il sera exporté au 17ᵉ siècle à Port L'houmeau, ça partira par Gabard pour aller jusqu’à La Rochelle", explique Pamela de Montleau, vice-président de l’association "Safran de l’Angoumois".
Pour le remettre au goût du jour, de nombreux chefs cuisiniers l’utilisent, passionnés par les goûts et saveurs qu’il procure. "C’est une épice tellement puissante, le safran, que l’on ne trouve nulle part ailleurs. C’est une épice très spéciale qu’il faut travailler avec parcimonie. On n’a pas besoin de mettre des grammes et des grammes pour que ça sente", évoque Baptiste Laurent, chef cuisinier à l’Intemporelle à La Rochefoucauld.
Prochaine étape pour l’association Safran de l’Angoumois, la constitution d’un dossier pour l’obtention d’une indication géographique protégée