Ce matin, le tribunal administratif de Poitiers, sollicité par des associations environnementales, devait statuer sur la légalité d'un arrêté préfectoral autorisant la création de six réserves d'irrigation dans la Vienne. Le rapporteur public a préconisé son annulation. Même conclusion pour un second dossier examiné par le tribunal et concernant neuf réserves en Deux-Sèvres et Charente.
En ce mardi matin, le rapporteur public avait révisé ses classiques de philosophie grecque et ses mathématiques ! Après une introduction très historique sur les enjeux de l’eau, conflictuels depuis l’Antiquité et à travers les siècles, il a soulevé deux arguments de droit en défaveur du projet des irrigants, calculette à l'appui.
Un projet surdimensionné
En premier lieu, les calculs présentés par les services de l'État (le BRGM, Bureau de recherches géologiques et minières) ne prendraient pas en compte les prélèvements hivernaux.
En second lieu, l'État autorise ses projets à la condition qu'ils permettent de maintenir l'équilibre des usages de l'eau. Or, toujours en détaillant les données transmises par le BRGM, le rapporteur a évalué que le projet, tel que présenté, aboutirait à une augmentation de 15 à 30 % des volumes d’irrigation.
"Certes, l'idée est de transférer les volumes vers la période des hautes eaux, mais pas de déséquilibrer les usages de l’eau. Or, le sous-bassin de La Pallu est déjà en déficit", argumente le rapporteur public.
Le projet nous paraît largement surdimensionné.
Le rapporteur publicTribunal administratif de Poitiers
"Le projet nous paraît largement surdimensionné, d’autant que le BRGM l’admet, l’impact du changement climatique n’a pas été pris en compte", note également le rapporteur public.
Il a donc conclu à l’annulation de l’arrêté. Dans un second dossier, également examiné par le tribunal ce mardi 19 septembre, il a développé les mêmes arguments et abouti à une préconisation identique pour neuf autres réserves envisagées sur le territoire des Deux-Sèvres et de la Charente.
Quinze bassines en projet pourraient ainsi être retoquées, car les juges suivent souvent les avis du rapporteur public.
Le tribunal rendra ses décisions dans 15 jours.
Satisfaction des plaignants
Me Samuel Delalande, avocat au barreau de Rennes, représentait les associations de défense de l'environnement qui avaient saisi le tribunal. Il a, lui aussi, développé dans ses conclusions la non-prise en compte de tous les prélèvements.
C'est du bricolage ! Maintenant, on essaie de faire un processus pour légitimer [les volumes]. Evidemment, ça ne marche pas.
Me Samuel DelalandeAvocat des associations environnementales
Et de souligner : "Les protocoles attaqués aujourd'hui au tribunal n'ont pas été signés par les personnes qui participent aux établissements publics, notamment en charge de l’eau potable, ni par les associations de pêche et de protection de la nature. Donc on n'a pas du tout de consensus sur l’usage des eaux aujourd’hui."
L'avocat représentant les irrigants de la Scage de La Pallu, et présent à l'audience, n'a pas souhaité s'exprimer.