Méga-bassines, écologie : l'impossible dialogue entre le monde agricole et les écologistes

En Lot-et-Garonne, les écologistes ne veulent plus soutenir la Chambre d’Agriculture. C’est la demande qu’ils ont formulée, en commission permanente du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, ce lundi 3 avril. Leur requête a cependant été rejetée, par Alain Rousset.

Ne plus subventionner la Chambre d’Agriculture du Lot-et-Garonne. Le message, envoyé ce lundi par le groupe Europe Ecologie-Les Verts du Lot-et-Garonne est clair. Lors de la commission permanente du Conseil régional, les élus EELV ont voté contre le renouvellement des aides versées à la Chambre d’Agriculture du département. 

“C’était symbolique. Passer par des sanctions financières, c'est le seul levier que l’on a en tant qu’élus. C’est notre manière de dire “stop” à cette escalade de violence”, explique Maryse Combres, conseillère régionale EELV, en Lot-et-Garonne.

De Sainte-Soline à Nérac

Cette demande s’inscrit dans un contexte de tensions, entre les élus et militants écologistes et les représentants du monde agricole, particulièrement visible, le 28 mars dernier, lors de la visite en Lot-et-Garonne, de Marine Tondelier, secrétaire nationale d’EELV. L’élue avait été prise à partie, dans un communiqué publié la veille de sa visite, par la Chambre d’Agriculture du Lot-et-Garonne. "Vous n’êtes pas la bienvenue. [...] Ne venez pas chez nous, ça va mal se passer ! ", prévenait le communiqué. 

Relayé sur de nombreux médias, l’événement a surtout été une façon, pour le monde agricole lot-et-garonnais, de manifester leur désaccord face aux manifestations de Sainte-Soline. “On leur a fait ce qu’ils font à Sainte-Soline : nier la loi et imposer sa vision des choses. Ils se sont octroyé le droit de détruire des réserves d’eau légales, on s’est octroyé le droit de refuser la venue de Marine Tondelier en Lot-et-Garonne. S’il n’y avait pas eu ces événements, nous n’aurions jamais fait ce communiqué”, précise Serge Bousquet-Cassagne.

Le président de la Chambre d’Agriculture s’est d’ailleurs dit “stupéfait” de leur requête “farfelue” lors de la séance plénière. “S’il faut interdire les financements de la Chambre d’agriculture, supprimons aussi les financements de toutes ces associations écologistes et ces partis comme la Nupes ou EELV après les violences de Sainte-Soline”, ironise Serge Bousquet-Cassagne.

La demande “symbolique” des écologistes n’a cependant pas abouti. Alain Rousset et les autres partis ont immédiatement rejeté leur requête, expliquant “ne pas confondre la Chambre d’Agriculture du Lot-et-Garonne” et “le président de la Chambre”. “La région ne prend pas en otage les bénéficiaires de ces actions du développement”, précise-t-elle dans un communiqué en références à “tous les agriculteurs et les corps constitués de l’agriculture” qui composent la Chambre d’agriculture.

Purin et échauffements

Depuis plusieurs mois désormais, les tensions entre le monde agricole et les militants écologistes se multiplient, en Charente-Maritime où le domicile d'un militant écologiste a été tagué ainsi qu'un élu menacé, mais aussi en Bretagne ou dans les Deux-Sèvres, théâtre de la manifestation de Sainte-Soline. Plus récemment, en Lot-et-Garonne, ce lundi 3 avril, du purin a été déversé sur le parvis de l’hôtel de ville de Nérac.

Un geste que les écologistes entendent comme des représailles après que le maire de la commune, Nicolas Lacombe, a reçu la secrétaire nationale d’EELV. “Il y a eu les échauffements lors de la visite de Marine Tondelier, certes, mais il n’y a pas que ça. Dernièrement, des élus, pas forcément écologistes, ont reçu des lettres intimidantes alors qu’ils devaient statuer sur l’extension d’une zone Natura 2000”, ajoute Maryse Combres. 

Mais le Lot-et-Garonne est loin d’être le seul territoire où se cristallisent les tensions. En Charente-Maritime ou dans les Deux-Sèvres, à Sainte-Soline, les actes de vandalisme et les affrontements se multiplient, symbole d’un dialogue devenu sourd.

“Nous condamnons fermement, depuis des années, la violence, d’où qu’elle vienne. C’est inscrit dans notre charte. Faire cet amalgame entre les violences et les militants et élus écologistes, que ce soit la région, par leur réponse, mais aussi nos dirigeants, c’est nous mettre une cible dans le dos et attiser les tensions”, regrette Maryse Combres.

Loi du plus fort

Faire la différence, Serge Bousquet-Cassagne assure pourtant la faire. “Je ne mélange évidemment pas les écologistes du Lot-et-Garonne et ceux qu’on a vus à Sainte-Soline. Ils ne prônent pas cette violence, mais ils se font dépasser. Il faut prendre ses responsabilités maintenant. Si on n'est pas en mesure d’organiser une manifestation dans le calme, il ne faut pas ensuite venir dénoncer et se désolidariser des violences qui auraient pu être évitées”, résume le président de la Chambre d’agriculture. 

Aujourd’hui, la conseillère régionale écologiste appelle à un apaisement entre toutes les parties. “Ces tensions ne font que rabaisser le débat public. Là, on est sur “qui criera le plus fort”, avec un usage de la violence. On devrait faire le contraire”, explique Maryse Combres qui s’inquiète “de la suite face à une escalade de violence.

Lors de la visite de Marine Tondelier, la conseillère régionale avait d’ailleurs organisé une table ronde entre élus écologistes et syndicats agricoles pour évoquer les différents dossiers actuels du département. “On n'est pas ressortis en pensant la même chose, on sait que nos opinions divergent, mais aujourd'hui, on sait qu’on veut trouver des solutions communes grâce à un débat apaisé et respectueux”, analyse Maryse Combres. 

Dialogue rompu

Ces débats, Serge Bousquet-Cassagne, lui, n’y croit plus. “À Sainte-Soline, l’État avait organisé des débats en amont, les écologistes sont partis. Vous ne pouvez pas mettre des ayatollahs de l’écologie qui prônent le retour à la nature, la déproduction et la déconstruction face à des paysans qui ne demandent qu’à travailler”, explique le président de la Chambre d’agriculture. 

Le terrain d’entente s’apparente donc aujourd’hui plus à un champ de bataille qu’à une zone neutre où seul l’état, selon les agriculteurs, est en mesure d’instaurer un retour au calme.

Il faut que le gouvernement sache où il va en matière d’eau, d’écologie… Il ne peut pas faire un pas en arrière en faveur des écologistes, un pas de côté pour satisfaire les agriculteurs et en même temps, marcher en avant, tous ensemble. Il faut qu’il se positionne, c’est ce flou qui génère aujourd'hui toutes ces tensions.

Serge Bousquet-Cassagne

président de la Chambre d'agriculture du Lot-et-Garonne

Le 30 mars, lors de son déplacement au lac de Serre-Ponçon dans les Hautes-Alpes, Emmanuel Macron a d’ailleurs présenté un nouveau plan de gestion des ressources d’eau. Ce plan compte 53 mesures qui visent à réduire la consommation d’eau nationale d’au moins 10% d'ici à 2030.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité