Le Conseil des prud'hommes de Poitiers a condamné SFR et SFR-Service clients à verser 5 000 euros de dommages et intérêts aux 251 ex-salariés de SFR devenus Aquitel sur le site de Chasseneuil-du-Poitou.
Les 251 salariés du centre d'appel avaient entamé une procédure devant les Prud'hommes pour contester les licenciements intervenus en 2007 et 2008 et réclamer des compensations financières. En 2007, 590 employés du site de Chasseneuil-du-Poitou étaient passés sous le contrôle d'Aquitel. Les salariés estiment qu'ils ont alors perdu de nombreux avantages et qu'un accord interdisant tout licenciement pendant trois ans n'a pas été respecté.
"Collusion frauduleuse" pour pousser les salariés au départ
A l'audience de Poitiers en décembre, les salariés du centre de Chasseneuil-du-Poitou avaient plaidé que l'ensemble des opérations de transfert revenaient à une "collusion frauduleuse", dans le but d'éviter à SFR un plan social coûteux et de contourner des obligations d'un accord de 2006 de garantie de l'emploi, en déléguant le "sale boulot" au sous-traitant.SFR et SFR-Clients soulignaient pour leur défense que l'accord ne contenait en réalité pas d'engagement Elles plaidaient aussi que
les salariés avaient quitté leur emploi de leur plein gré, et sans faire valoir "leur droit à la priorité de réembauchage". Les salariés répliquaient que les bas salaires proposés dans les nouveaux contrats ne leur laissaient pas d'autre choix.
Seul SFR a été condamné
Ce matin, seul SFR a été condamné et non pas la société Aquitel a qui le site de Chasseneuil avait été revendu. Le conseil des prud'hommes a estimé que "le contrat de sous-traitance a mis Aquitel dans un état de subordination économique à l'égard de SFR envers laquelle elle avait une obligation de résultat" "Le seul but avoué de l'opération était la recherche d'économie pour SFR" ajoutent les prud'hommes qui jugent également que "la société SFR n'a pas respecté ses engagements conventionnels".Le conseil des Prud'hommes a alloué ce matin à chacun des 251 salariés la somme de 5 000 euros et le remboursement des frais de justice engagés estimés à 150 euros.
Me Geoffroy, l'avocat des ex-SFR s'est dit "très content" du jugement de fond, qui démontre peu à peu que "l'ensemble des juridictions porte le même regard sur le comportement social de SFR". Il a toutefois indiqué qu'un appel était vraisemblable sur le montant des dommages, très en-deçà des 15 à 20.000 euros réclamés par les salariés.
D'autres procédures similaires en France
Le jugement du conseil de Prud'hommes de Poitiers s'inscrit dans un ensemble de procédures engagées à Toulouse et Lyon, concernant au total près de 1.500 salariés d'ex-centres d'appel SFR, transférés en 2006 et 2007 à des sous-traitants: c'est "le plus gros dossier de destruction délibérée d'emploi par fraude, par des entreprises qui vont bien", a estimé leur avocat Romain Geoffroy.Dans des arrêts en février et en 2012 (ce dernier confirmé par la Cour de cassation), la cour d'appel de Toulouse avait déjà octroyé à 321 ex-salariés de SFR des indemnités dans des procédures similaires. Un arrêt de la cour d'appel de Lyon est attendu le 4 mai, pour une autre vague de plaignants, et 500 autres cas doivent y être plaidées en novembre.
Retour sur le combat des ex-SFR avec le reportage de Tanguy Scoazec et Stéphane Bourin . Ils ont rencontré Franck Berne, un ancien délégué CFDT.
Reportage de Tanguy Scoazec, Stéphane Bourin et Bnédicte Biraud