Rien ne va plus dans le monde de la cagouille ou du luma, à vous de choisir. La filière de l'héliciculture déjà pénalisée par les sécheresses et les canicules est mise à mal par la crise sanitaire. Les producteurs d'escargots ne bénéficient ni des aides de la PAC, ni de celles du gouvernement.
Ils sont peu nombreux en France, environ 400, répartis sur tout le territoire national, et à peine une dizaine en Poitou-Charentes. Leur profession est largement méconnue et passe aujourd'hui sous les radars de toutes formes d'aides destinées à surmonter la crise sanitaire, qu'elles viennent de l'Europe ou du gouvernement français.
L'année 2020 a été très difficile pour les éleveurs d'escargots qui ont été confrontés au confinement, à la fermeture des restaurants et à l'absence des marchés de Noël. Ces difficultés liées à la crise sanitaire de la Covid-19 s'ajoutent à celles provoquées par les dernières périodes de sécheresse et de canicule qui ont entraîné des surmortalités importantes dans les élevages.
Les producteurs pénalisés par la fermeture des restaurants
Corinne Lhoste est installée à Senillé-St-Sauveur dans la Vienne. Elle est à la tête d'un élevage de 250.000 escargots qu'elle espère agrandir mais aujourd'hui avant de penser à agrandir son cheptel elle doit faire face aux incertitudes financières provoquées par la baisse de ses ventes. Les fêtes de fin d'année, qui représentent environ 80% du chiffre d'affaires des héliciculteurs, ont été réduites à la portion congrue cette année, notamment en raison de la fermeture des restaurants à cette période.
J'ai presque 60% de pertes de chiffre d'affaires sur les premiers mois du confinement. En juillet et août, la reprise a été compliquée parce qu'on n'avait pas le droit de faire des marchés et puis après la saison a redémarré mais les restaurants n'étant pas ouverts, ils n'ont pas passé commande. Ça a été très difficile de passer le cap.
Leur statut les écarte des aides gouvernementales
Des difficultés que les producteurs d'escargots ont d'autant plus de mal à surmonter qu'ils n'ont droit à aucune aide contrairement à d'autres filières agricoles, comme celles du foie gras, de l'aquaculture ou de la production de pommes à cidre. Leur activité, qui ne concerne qu'un très faible nombre de professionnels et qui n'entre pas dans le dispositif de la Politique Agricole Commune (PAC), ne bénéficie pas non plus des aides gouvernementales liées à la crise sanitaire. Une double peine, en quelque sorte, que les héliciculteurs dénoncent.
Pour alerter sur leur situation, ils ont écrit un courrier, en novembre dernier, au Premier ministre et au ministre de l'Agriculture pour demander une meilleure reconnaissance de la filière française de production d'escargots. Ils souhaitent ne plus être les grands oubliés des aides gouvernementales, en raison de leur classification. Leur métier n'est pas reconnu au même titre que ceux d'autres éleveurs, spécialisés dans des domaines plus répandus.
Le code de leur profession désignant "l’élevage d’autres animaux" les a écarté des aides d'Etat liées à la Covid-19. Cette nomenclature regroupe des secteurs d'activités très divers comme les élevages d'insectes, d'oiseaux autres que les volailles, de lombrics ou d'animaux de compagnie et même de l'apiculture. Certains ont cependant obtenu des aides exceptionnelles, c'est ce que demandent aussi les héliciculteurs. Ils ont obtenu le soutien de plusieurs parlementaires qui, à l'Assemblée Nationale comme au Sénat, ont relayé leurs inquiétudes et ont demandé au ministre de l'Agriculture de leur permettre d'avoir accès aux aides exceptionnelles liées à la crise sanitaire. A la fin du mois de décembre, le gouvernement a fait un premier pas et a assuré que ces professionnels pourront bénéficier des aides attribuées à la“filière festive”.
Ces dispositions seront-elles rétroactives et pourront-elles réellement sauver toutes les fermes d'élevage d'escargots français confrontés à une concurrence venue de l'étranger très puissante. C'est le paradoxe relevé par Corinne Lhoste, l'hélicicultrice de Senillé-St-Sauveur.
Aujourd'hui, nous sommes les premiers consommateurs d'escargots et 80 à 90% des escargots que nous mangeons viennent de l'étranger et notamment des pays de l'Est.
Anne-Marie Baillargé, Thomas Chapuzot et Alexia Rouy ont rencontré Corinne Lhoste à Senillé-St-Sauveur, voici son témoignage sur les difficultés qu'elle rencontre :