Témoignage. Fin de vie. "Je n'ai plus à être là", "Je ne sers plus à rien". L'aide active à mourir pour mettre un terme aux souffrances inutiles

Publié le Écrit par Céline Serrano
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Atteinte d'une maladie incurable et invalidante, Annick Redon aurait aimé pouvoir bénéficier d'une aide active à mourir, afin d'éviter des mois de souffrance inutile, pour elle et ses proches. Son époux témoigne de sa fin de vie, courageuse et douloureuse.

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"Je n'ai plus à être là", "Je ne sers plus à rien". Les trois derniers mois de sa vie, Annick Redon exprimait de la révolte, et de la tristesse à se voir refuser la mort qu'elle souhaitait. Atteinte de sclérose latérale amyotrophique (maladie de Charcot), elle écrivait sur une tablette ou des morceaux de papier.

Combien de fois, elle m'a écrit : Va chercher un marteau et tue-moi !

Thierry Redon

époux d'Annick

"Le jour-même où le diagnostic a été posé sur sa maladie, le 16 février 2022, elle a reçu la visite des soignants du service de soins palliatifs, se souvient Thierry, son époux. Parce qu'on sait que c'est une maladie irréversible."

Et c'est dans ce service de soins palliatifs du CHU de Poitiers qu'Annick décèdera effectivement moins d'un an plus tard, le 1er janvier 2023, d'une "sédation profonde et continue jusqu'au décès" telle que le prévoit la loi Claeys-Leonetti de 2016, qui encadre aujourd'hui la fin de vie en France.

"Ça a été beaucoup trop long" regrette Thierry. "Son état de santé s'est dégradé rapidement. Elle ne pouvait plus se déplacer, parler, puis s'alimenter. Elle avait juste encore un peu de mobilité dans la main pour écrire. Et elle avait toute sa tête. C'était terrible. Combien de fois, elle m'a écrit : Va chercher un marteau et tue-moi !", se souvient-il au bord des larmes.

Leurs souhaits respectifs pour leur fin de vie, Annick et Thierry en avaient parlé bien avant qu'Annick ne déclare sa maladie : "Depuis longtemps, on avait abordé le sujet, et on était d'accord. Quand on est rendu au bout, on est rendu au bout, ce n'est pas la peine de faire souffrir les gens. On avait tous les deux rédigé nos directives anticipées, notre fils connaissait notre point de vue, c'est important d'en parler en famille.", explique Thierry.

Les limites de la loi actuelle

"Ses directives anticipées ont été données dans tous les services où elle est passée. La plupart ont accepté le principe : se garantir d'une mort sans devoir subir d'acharnement, sans être grabataire. Mais la loi n'est pas faite dans ce sens-là. Les deux derniers mois en soins palliatifs, elle était grabataire, et elle a dû attendre.", poursuit-il.

Thierry Redon tient à rendre hommage à l'ensemble des personnels du service des soins palliatifs : "Ils ont été très humains, très à l'écoute, aux petits soins", et regrette que la loi actuelle ne leur ait pas permis de mettre un terme plus rapidement aux souffrances de son épouse.

"Elle a été sédatée à sa demande, la mienne et celle de notre fils. Mais avant de prendre la décision, ils lui ont posé la question deux, trois fois par semaine, pendant un mois. Ça a été beaucoup trop long.", répète-t-il.

"Déjà en juin, elle envisageait d'aller en Belgique, ou en Suisse. Mais ce n'était pas possible. Au mois d'août, tout était prêt, le cercueil était commandé, elle avait tout préparé, tout organisé. Si elle avait pu, l'euthanasie, elle l'aurait fait elle-même, elle se serait injecté le produit toute seule, c'est sûr."

L'espoir d'une nouvelle loi

Si Thierry Redon surmonte son chagrin pour témoigner, c'est qu'il espère que parler, faire connaître des situations telles que celle qu'il a vécue avec Annick, permettra de faire évoluer la loi.

Les conclusions de la convention citoyenne sur la fin de vie qui s'est prononcée en faveur de l'aide active à mourir, dans un parcours encadré, sont pour lui une avancée encourageante. "J'espère que la loi va passer, mais j'attends de voir, parce que les oppositions sont très virulentes. En Belgique, la loi qui autorise l'euthanasie a 20 ans, ils la révisent régulièrement et il n'y a aucun problème."

Pour faire avancer cette cause qui lui est chère, Thierry participe régulièrement à des opérations de sensibilisation menées par Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), qui a des antennes sur tout le territoire.

À l'issue des travaux de la convention citoyenne, le chef de l'État a annoncé ce 3 avril un projet de loi d'ici à la fin de l'été.

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