C’est un véritable problème de santé publique. Nous le supposions depuis des années, il a fallu qu’un comité d’experts le confirme pour en prendre toute la mesure. La place des écrans dans le quotidien des jeunes est effarante, effrayante et dangereuse.
Un an après la polémique, deux semaines après le rapport du comité d’experts alarmant sur l’usage des écrans chez les jeunes, l’incompréhension persiste chez les « parents poitevins contre les écrans ».
Que fait-on des tablettes et des tableaux présents dans les salles de classe des maternelles ? Les collégiens vont-ils continuer à étudier sur des manuels numériques ou vont-ils retrouver l’usage des livres et des cahiers ?
Depuis les résultats, rien ! Aucune décision, aucune réaction. J’ai peur que cela soit mauvais signe.
Séverine Deneuilcollectif parents poitevins
À la recherche du temps perdu
Le titre du rapport est parlant… chaque mot est important, tous sont choisis avec minutie. Combien de temps faut-il au gouvernement pour prendre des mesures à la suite de cette commande ? Est-ce un combat perdu d’avance face à industriels, aux lobbies du numérique ? Ces recherches d'experts et de scientifiques auront-elles un impact sur l’éducation de nos enfants ou sur la prochaine génération ?
125 pages de recommandations, préconisations : interdiction absolue d’écran avant trois ans, accès fortement limité et occasionnel entre 3 et 6 ans, pas de téléphone avant 11 ans et de réseaux sociaux avant 15 ans. On parle de « marchandisation des enfants, d’hyperconnexion subie, de conséquences dangereuses sur la santé et le développement »… En bref, il faudrait « reprendre le contrôle des écrans ». Facile à dire, mais est-ce aussi facile à faire ?
Déterminer le bon usage des écrans pour nos enfants, à la maison comme en classe : c’est l'objet du rapport qui m'a été remis par la commission d'experts sur l'impact de l'exposition des jeunes aux écrans que j’avais lancée.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) May 1, 2024
J’ai donné un mois au gouvernement… pic.twitter.com/g45W6wx2o7
« L’impulsion a été lancée depuis plusieurs semaines maintenant et nous n’avons vu aucun signe de vie du président depuis, se désole Severine Denieul. Que va faire le gouvernement ? Quelles actions vont être menées ? Combien de temps devons-nous encore attendre ? »
En d’autres termes : gros coup de communication ou vraie prise de conscience ?
Coup de com ou prise de conscience ?
Ce qui est sûr, c’est que les parents d’élèves ne sont pas les seuls à attendre de savoir sur quel pied danser.
« J’ai pris note, mais cela ne change rien. Tant que l’éducation nationale ne donne pas de préconisations précises, nous gardons la ligne directive que nous nous sommes fixée depuis plusieurs années » explique Hélène Pommier, adjointe à l'éducation de la ville de Poitiers.
À savoir équiper les 45 écoles maternelles et élémentaires de Poitiers avec les chariots numériques.
Aujourd’hui, à Poitiers, on compte :
- 480 tablettes (dont 185 pour les écoles maternelles, il reste six écoles à équiper)
- 68 dalles numériques dont cinq en élémentaire (en remplacement des vidéoprojecteurs obsolètes)
- 250 vidéoprojecteurs
- au moins 400 ordinateurs
« Seules six écoles maternelles ne sont pas encore équipées, mais cela devrait être fait cet été, poursuit Hélène Pommier. Cela représente près de 40 000 euros par an sur notre budget numérique qui tourne au global à près de 200 000 euros. Les trois quarts servent à rattacher les écoles à la fibre ». Et une dalle numérique par classes, pour près de 160 classes.
Le « grand plan numérique à l’école », c’est François Hollande qui l’a lancé, en 2016. À cette époque, Microsoft devient partenaire de l’éducation nationale et l’objectif est de doter un maximum d’élèves et d’enseignants de tablettes et d’ordinateurs.
Huit ans plus tard, le gouvernement d’Emmanuel Macron va-t-il poursuivre ce plan ou faire demi-tour ?
Les associations comme les parents poitevins en colère ont bon espoir d’un retour en arrière.
« Je ne vois pas comment ça peut être autrement, du moins, je l’espère ! se convint Séverine Denuieil. Les experts ont effectué un travail remarquable, ils ont démontré la gravité de la situation ! Maintenant, nous faisons tout pour interpeller les décideurs, à notre échelle ».
Par exemple, l’association Pour un droit à une Scolarité Libre de Numérique s’appuie sur la proposition de loi de Nicole Belloubet pour faire une pause numérique généralisée à tous les outils numériques dans les établissements scolaires jusqu'à un certain âge.
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Quelles conséquences sur la santé de nos enfants ?
Car la question très importante est surtout de savoir si c’est dangereux pour la santé des jeunes.
Et par jeunes, entendez des nouveau-nés aux adolescents car oui, les bébés ont, eux aussi, leur moment geek.
Selon une étude de février 2022, les enfants de moins de deux ans passent en moyenne 3 h 11 chaque jour devant les écrans. En détail, c’est d’autant plus effrayant : 1 h 22 devant la télévision, 44 minutes sur un smartphone, 34 minutes sur une tablette, 17 minutes sur un ordinateur et 14 minutes sur une console… Moins de deux ans, oui. Vous avez bien lu.
Pour les très jeunes, ce sont des conséquences sur le développement cognitif qui est pointé du doigt.
Le gouvernement déclare : « Selon des données scientifiques actuelles, le temps passé devant un écran peut être corrélé à une forme physique moins bonne et à des problèmes de santé mentale et de développement social :
- sur le développement du cerveau et de l’apprentissage des compétences fondamentales : les enfants surexposés aux écrans ont plus de risques de souffrir d’un retard de langage que les autres.
- sur les capacités d’attention et de concentration
- sur le bien-être et l’équilibre des enfants (problèmes émotionnels, mauvaise estime de soi, moins de temps consacré aux activités sportives qui ont un impact positif reconnu)
- sur le comportement (changement d’humeur, agitation, forte fatigue diurne, isolement, agressivité...)
- sur la santé (prise de poids, voire obésité, manque chronique de sommeil)
Quelles alternatives ?
Les livres bien sûr ! Et les animaux de compagnies ! Cela ne vous surprend pas… mais prenons le temps de comprendre les bienfaits de ces deux alternatives (parmi tant d’autres).
Les livres seraient des antidotes, comme dirait Michel Desmurget. Ils favorisent le développement de l’enfant, développe la connaissance et la culture, stimule la créativité, la créativité, l’imagination, stimule notre cerveau finalement. Mais pas seulement. Lorsqu’un jeune lit, il s’endort plus facilement et se sent plus apaisé. Regardez un enfant qui écoute un livre, il sourit, et réagit…
Grandir avec un animal, notamment un chien, motive l’enfant à pratiquer une activité physique. Cela réduit donc les risques associés à la sédentarité et… au temps passé à regarder les écrans (entre autres, car les bienfaits sont bien plus nombreux comme la réduction des problématiques d’allergie, d’asthme ou encore de dépression, mais ça, c’est à découvrir dans d’autres articles.