Une association catholique intégriste en séminaire à Béruges : "La nature est au service de l'homme et non l'inverse"

Renaissance Catholique, association traditionnaliste composée de laïcs, organise sa 29e université d'été dans la Vienne. Son crédo ? Dénoncer "l'écolo-hygiénisme" ambiant. Ce séminaire est peu enclin à accueillir les journalistes. Nous y sommes allés au débotté.

Les journalistes font partie du « clergé de nouvelles religions séculières qui annoncent la fin du monde, l’Apocalypse, la Rédemption après le péché. »

Au vue de cette phrase extraite du texte de présentation de l’université d’été de l’association Renaissance catholique, je me doute que les journalistes sont peu appréciés.

Cette université d’été se déroule à Béruges, dans la Vienne, à l’Abbaye du Pin, propriété du traiteur Tardivon. Nuités et couverts sont prévus sur place, mon pass sanitaire est logiquement demandé à l’entrée. Le lieu est magnifique sous le soleil. Je croise quelques personnes, un prêtre en soutane me salue en passant.

Je rentre ainsi tranquillement à l’arrière du bâtiment. Des tivolis blancs sont installés sur la pelouse où une trentaine de personnes discutent. Il y a là des parents entourés d’une ribambelle d’enfants, des personnes plus âgées. J’entends qu’elles sont venues de toute la France pour passer le week-end ici.

Je me présente donc à la table d’inscription, persuadée d’être immédiatement refusée car je ne suis pas inscrite. Je tente ma chance et demande si je peux assister à la conférence. La réponse est positive, avec le sourire, à condition de payer la somme de 10 euros.

150 personnes sont attendues pendant les trois jours, elles ne sont visiblement pas toutes arrivées pour cette première intervention.

En préambule de la conférence, Jean-Pierre Maugendre, le co-fondateur et directeur général de l’association Renaissance Catholique, propose de chanter l’hymne grégorien Veni Creator. Les participants posent un genou, ou les deux, par terre et entonnent immédiatement ce chant.

Je suis repérable dans les rangs de l’assemblée, car je suis la seule à porter un masque. Personne ne m’en fait la remarque.

Le directeur général rappelle le thème de ces trois jours : « Naissance d’une religion : l’écolo-hygiénisme. » Pas de mystère sur le programme, annoncé en toutes lettres sur le site Internet : « Après le temps des religions transcendantes semble venu celui des religions séculières : nazisme, communisme, écologisme puis maintenant hygiénisme. (...) Une dictature implacable a succédé à un totalitarisme plus sournois. C’est à la découverte des origines et des principes, mais aussi des modes d’action et des pratiques de ces nouvelles religions que nous vous convions. »

La conférence à laquelle j’assiste, assise dans le public, est celle menée par Gérard-François Dumont. Son Curriculum Vitae est particulièrement notable : il est économiste, démographe, professeur à la Sorbonne, auteur de nombreux ouvrages. Le titre de son intervention est : "La terre est-elle surpeuplée ?"

L'inculture démographique des scientifiques

Pendant une heure, ce conférencier va tenter de démontrer une chose : dire qu’il y a trop de monde sur terre est une aberration. Il oppose ceux qui comme Platon, Aristote ou plus proche au 19^e siècle, l’économiste anglais Malthus, prônaient la réduction du nombre d’enfants au vu de la pauvreté… aux schémas démographiques. « Ces schémas que l’on trouve dans les manuels scolaires des enfants sont faux. » Gérard-François Dumont en profite pour glisser une « anecdote » : « La famine en Ethiopie a été organisée par le gouvernement de l’époque pour faire venir des journalistes, déclencher des aides financières immédiatement détournées pour acheter des armes ».

Selon Gérard-François Dumont, il faut une politique de natalité forte, bien loin de cette tendance à vouloir moins peupler la planète. Dans la salle, des questions circulent sur des bouts de papier, posées au conférencier après sélection. Un auditeur ose écrire : « Pourquoi n’êtes-vous pas écouté, pourquoi ce consensus scientifique sur le néo malthusianisme ? ». La question est pertinente, la réponse est édifiante : « Cela est dû à l’inculture démographique des scientifiques ». Le conférencier rajoute qu’il a quand même l’oreille de certains hommes politiques. Lionel Jospin qui avait eu l’idée de supprimer les allocations familiales en 1998, les aurait bien vite remises, sur ses conseils… dixit.

Interview avec Jean-Pierre Maugendre

La conférence se termine sur le bénédicité d’avant le repas. J’échange quelques mots avec le conférencier, papier et crayon en main, ce qui interpelle Jean-Pierre Maudenge, le maître de cérémonie du séminaire. Je l’informe de mon métier et lui propose de faire une interview. Malgré sa très grande surprise de me voir dans ses rangs, il accepte l'entretien quelques minutes plus tard.

Jean-Pierre Maugendre n’aime pas beaucoup les journalistes, il ne s’en cache pas. Mais la question n’est pas là, la question est de comprendre ce qu’est l’écolo-hygiénisme qu’il souhaite dénoncer pendant trois jours.

Il y a un changement de religion, l’écologie organise toute notre vie maintenant. L’écologie, oui mais pas au détriment de l’homme. La nature est faite pour être au service de l’homme et non l’inverse 

Jean-Pierre Maugendre-directeur général de l'association Renaissance catholique

Il répète plusieurs fois ce crédo, inspiré de la Genèse dans la Bible, précise-t-il. « Nous, on cherche des faits et non des idéologies », même s’il admet qu’appliquer la Génèse est aussi une forme d’idéologie.

Dans son texte de présentation de ce séminaire, Renaissance Catholique fustige « les nouveaux prophètes que sont Al Gore, Greta Thunberg et… Jean-François Delfraissy (président du Conseil scientifique sur le Covid 19). « Greta Thunberg, est une gamine manipulée, elle est l’un des éléments mis en place pour établir cette nouvelle religion qu’est l’écologie et l’hygiénisme », conclut J-P Maudenge.

Je le laisse retourner à la table de son déjeuner. Pendant ces trois jours, Patrick Buisson, Philippe de Villiers ou l’abbé Guillaume de Tanoüarn, prêtre traditionnaliste, sont aussi invités pour des conférences.

Pour Patrick Buisson, c’est un avant-goût d’un autre événement « thématique » de ce genre : les 51^e journées chouannes à Chiré-en-Montreuil (86), les 4 et 5 septembre prochain. Cette fois, c'est  « Diffusion de la pensée française », l’éditeur d’auteurs catholiques traditionnalistes intégristes, ou d’extrême droite, qui en est l’organisateur.