Unique en France, une étude est menée par une pharmacologue pour observer les effets de la musique face à la dépendance au tabac

Le docteur Claire Lafay-Chebassier, pharmacologue et pharmacienne déléguée au sein du Centre d’intervention clinique (CIC), coordonne une étude au CHU de Poitiers. Son objectif est d'étudier les effets de la musique sur des étudiants fumeurs, âgés entre 18 et 25 ans.

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C'est une étude unique en France. Accompagnée de plusieurs infirmières et du service de santé universitaire de Poitiers, le docteur Claire Lafay-Chebassier, pharmacologue au sein du service pharmacologie clinique et vigilance, souhaite observer les effets de la musique sur des jeunes fumeurs en quête de sevrage.

Le principal objectif de cette étude est de "modifier les trajectoires de consommation chez les jeunes, pour les prévenir des années avant que ce ne soit trop tard", indique le docteur Claire Lafay-Chebassier. Selon Santé Publique France, plus de 75 000 décès étaient attribuables au tabagisme, correspondant à environ 13 % des décès survenus en France métropolitaine en 2015.

Niveau de stress, anxiété, qualité de la séance... Chacune d'entre elles est jugée par le ou la volontaire.

Carole David

Infirmière

Toutes les séances musicales s'effectuent au centre hospitalier de Poitiers. Avant de commencer la séance, l'infirmière Carole David "leur demandent si certains sons ou bruits les dérangent particulièrement, comme le crépitement du feu ou le chant des oiseaux". Les volontaires ont le choix entre de la musique classique, de la musique actuelle ou de la musique du monde, un dispositif développé par une entreprise française.

Masque sur les yeux, casque anti-bruit sur les oreilles, la séance peut débuter. Pendant vingt minutes, la personne volontaire est allongée sur un brancard. Le but, atteindre un état de relaxation. À l'approche de l'hiver, une couverture ou un drap peut être fourni "afin que la personne ait un maximum de confort, ajoute cette infirmière. Chaque séance est jugée par le volontaire entre 0 et 10 : niveau de stress, envie de fumer, anxiété et qualité de la séance".

Des années de travail de recherche en amont

Cette enseignante à la faculté de médecine de Poitiers travaille au sein du laboratoire de neurosciences expérimentales et cliniques (LNEC). Cette unité de recherche s'intéresse aux désordres psychiatriques. "Pendant de nombreuses années, les études ont été effectuées sur des animaux, comme des souris et des rats, afin d’étudier les effets préventifs et curatifs sur la dépendance de l’enrichissement de l’environnement des animaux", explique le docteur Claire Lafay-Chebassier.

Un travail de longue haleine qui a débuté il y a une quinzaine d'années, effectué, entre autres, par Marcello Solinas, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Ce docteur a mené des travaux sur la relation entre l’environnement dans lequel vivent ses rongeurs et le risque d’addiction aux drogues.

Écouter une musique agréable va activer des régions cérébrales qui sont impliquées dans la gestion d’émotion et du plaisir, associé à la dopamine.

Dr Claire Lafay-Chebassier

Coordinatrice de l'étude

Le docteur Claire Lafay-Chebassier précise qu'avec "la présence de jouets et d'objets ayant des textures et des couleurs différentes, le docteur Marcello Solinas a observé, au travers des stimulations visuels, motrices, cognitives et sensorielles, une diminution du risque de rechute aux drogues".

La musique comme remède ?

En analysant plusieurs études, son équipe du LNEC s'est rendu compte que la musique apparaissait comme une forme d'enrichissement de l’environnement, stimulant certaines régions du cerveau. "Il a été montré, via des études, qu’un sujet dépendant qui écoute une musique agréable, personnalisée (ce qu’il aime), diminue le craving - traduction littérale de désir ardent- c'est-à-dire, une envie irrépressible de reprendre de la substance, de consommer", développe-t-elle.

Le docteur Claire Lafay-Chebassier révèle que "le fait d’écouter une musique agréable va activer des régions cérébrales qui sont impliquées dans la gestion d’émotion et du plaisir, associé à la dopamine. On sert de la musique comme moyen de substitution, pour jouer sur la dépendance psychique, permettant de mieux gérer le stress et l’anxiété liée à l’arrêt au tabac".

Des séances d'intervention musicale

Nommée "MuSTOPSmok", cette étude a connu son premier volontaire en décembre 2022. Elle se base uniquement sur des jeunes étudiants fumeurs, de 18 à 25 ans, motivés pour arrêter de fumer. En plus d'un traitement substitutif nicotinique, des séances d'intervention musicale sont organisées sur trois mois. Elles ont lieu deux fois par semaine le premier mois, puis une fois tous les quinze jours à partir du dernier mois.

Avant de devenir volontaire, une pré-sélection est effectuée. "Une visite d’information, obligatoire dans le cadre d’une recherche clinique, et une présentation de l’étude sont faites aux volontaires, déclare l'infirmière Carole David. Ils peuvent poser toutes les questions qu’ils souhaitent".

Après cela, les participants effectuent une visite médicale en revenant "sur leur parcours tabagique, leur statut tabagique actuel et répondent à un questionnaire lié aux dépendances. Les médecins du service de santé universitaire leur demandent quelles sont leurs motivations liées à l’arrêt, ainsi que leur taux d’anxiété", ajoute Carole David.

Une étude toujours en cours

Les équipes de recherche espèrent avoir 120 étudiants fumeurs et recherchent toujours des volontaires. Si vous êtes motivés à l'idée d'arrêter de fumer et à participer à cette étude, contacter le 05.16.60.42.41 ou le 05.49.44.46.89 ou en envoyant un mail à carole.david@chu-poitiers.fr.

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