Alors que le premier confinement s'est bien passé, la campagne d'hiver qui démarre le 24 novembre, voit d’ores et déjà ses inscriptions à la hausse, et un nouveau public fragilisé par la crise sanitaire, vient désormais rejoindre les personnes traditionnellement accueillies.
La crise sanitaire, en s’installant dans la durée, pousse les plus fragiles, qui jusqu’ici avaient péniblement réussi à joindre les deux bouts, à basculer dans la précarité. Les Restos du cœur, pourtant en première ligne pour assurer les moyens de subsistance des personnes en décrochage, n’ont eux pas eu à souffrir du premier confinement. Au moins dans la Vienne.
On a eu 87% de nos bénévoles habituels qui se sont mis en retrait pour des raisons de santé. Mais dans le même temps il y eu un très grand élan de solidarité, et on a eu énormément de ce qu’on appelle des « bénévoles d’un jour », qui se sont proposées pour nous aider. Et comme en plus on venait juste de faire notre collecte nationale au mois de mars, on a clairement tapé dedans et on a pu faire face. On a respecté la distanciation en adaptant notre système de distribution en préparant des colis pour chaque famille en fonction des habitudes alimentaires de chacune, et ça s’est super bien passé. Vraiment.
Les personnes accueillies ont modifié leurs habitudes
De leur côté, les bénéficiaires ont dû eux aussi s’adapter au confinement, en venant s’approvisionner quand ils arrivaient au bout de leurs réserves. "Certaines semaines on avait un monde fou, et celle d’après les gens ne venaient pas. Les personnes accueillies m’ont fait penser à des écureuils".Une fois lissée et moyennée, l’augmentation des bénéficiaires se révèle à la marge. 4%. "Par contre pour cet hiver nous savons déjà que c’est pas du 4% qu’on va faire. Ça va être problématique".
Les inscriptions pour la campagne d’hiver qui ont débuté depuis deux semaines trahissent d'ores et déjà une augmentation franche, notamment d’étudiants. La crise sanitaire les ayant privé de leurs habituels jobs d’été, et bien que le CROUS les oriente prioritairement vers les épiceries solidaires de Poitiers, un nombre grandissant n’a plus d’autre recours que de se tourner vers les Restos.
Les Restos de la Vienne, devant l’appréhension de ces nouveaux bénéficiaires à devoir se tourner vers eux, ont décidé de mettre en place chaque semaine une distribution qui leur sera dédiée.Leurs familles qui d’habitude les aidaient financièrement, se retrouvent pour certaines en chômage partiel, quand ce n’est pas total, et ne peuvent plus rien leur donner. On commence aussi à voir arriver des personnes qui étaient en intérim, et ceux qui avaient des petits contrats qui n’ont pas été renouvelés. Et nous avons même malheureusement des commerçants que nous commençons à aider aussi.
On a choisi de faire comme ça pour leur laisser le temps de découvrir notre fonctionnement et qu’on apprenne tous à se connaître. Parce qu’ils ont tous la même réaction. Psychologiquement c’est extrêmement difficile et c’est compliqué pour eux de venir en même temps que nos bénéficiaires habituels.
"Le dernier bébé des restos 86"
Autre innovation, un centre itinérant qui va partir sillonner les routes du département à partir de février. « On a identifié des zones blanches où rien n’existe pour aider les gens, donc on va y aller ». Le parcours est d’ores et déjà établi, et les mairies sont sollicitées pour obtenir la mise à disposition d’une salle « même petite, mais on a besoin de pouvoir brancher frigo et congélateur, et avoir un accès internet ». Une cagnotte en ligne a été lancée et quelques chèques, « même petits », commencent à arriver.Les gens aiment bien cette idée, parce que c’est un beau projet. Mais on est encore loin d’avoir bouclé le budget. Et tant que j’y suis, on cherche aussi des « bénévoles hommes » pour notre entrepôt départemental de la Demi-Lune. On a essentiellement des dames dans nos centres, mais on manque de bras vigoureux.
"De la bienveillance les uns envers les autres"
Des dons, des bras, et ? « De la bienveillance les uns envers les autres. Parce que les gens ne vivent pas le deuxième confinement comme le premier. Autant il y a eu beaucoup de solidarité au printemps, autant il y a un repli sur soi très net aujourd’hui ».Une bonne nouvelle cependant, et pour aller à contre courant de la tendance constatée, les Restos devraient bientôt déménager deux de ses trois centres de Poitiers.
Ce sont les centres de la Demi-Lune et de Grand maison qui seraient concernés.Jusqu’à présent on louait nos locaux à des bailleurs privés. Et autant l’ancienne municipalité ne voulait pas entendre parler de nous, autant là, la porte s’est tout simplement ouverte. Il y a clairement une volonté de nous aider. La nouvelle municipalité devrait nous mettre à disposition un local à titre gratuit. Et probablement un deuxième. Cest encore en pourparlers, mais ça devrait aboutir. Et ça, ça va vraiment faire du bien.