Quand il y a tout juste 126 ans, Frascuelo réclame une cigarette...
LETTRES DE CAPITALES
Vers 16 heures, cet après-midi, ayez une pensée pour « Frascuelo ». Il y a 126 ans, le 13 novembre 1887, mano à mano entre « Lagartijo » et « Frascuelo » aux arènes madrilènes de la route d’Aragon. Avant le paseo, début d’échanges verbaux puis début d’échauffourées entre les partisans des deux maestros. Rien n’a changé, dimanche dernier, les supporters de Lyon n’ont pu se rendre à Saint-Etienne pour le derby de foot.
Sort « Peluquero », un toro d’Antonio Hernandez, grand, très armé et noble. Il est environ 15h 50, Jeanne Louise Calment, 12 ans, revient d’aller faire une commission pour ses parents, il fait beau mais froid sur Arles. Il pleut à Paris, Van Gogh y achève son autoportrait au chapeau gris et à Autlan de la Grana (Mexique), défile pour la première fois en habit de lumières, le célèbre (tout du moins chez lui à l’heure des repas) Manuel Villareal « El Nene » qui a enterré, huit jours plus tôt, le picador Ricardo Duran, pris dans la capitale aztèque par un toro de Hato de Guanamé.
En capitale d’Espagne et de Castille, « Frascuelo » termine sa faena. Il lève la muleta pour savoir si « Peluquero » est attentif. Il l’est tellement qu’il fonce recta sur le buste de Frascuelo qui se relève ensanglanté et estoque le toro. Au final, cornada dans le ventre plus quatre côtes cassées. A l’infirmerie, avant d’être opéré, l’équipe du docteur Perez Obon lui propose une citronnade : « ça c’est pour les trouillards, donnez-moi une cigarette, réclame Frascuelo ».
Né le 23 décembre 1842 à Churriana de la Vega (Grenade) et mort d’une pneumonie à Madrid le 8 mars 1898, Salvador Sanchez Povedano « Frascuelo », surnommé le « matador de bronze », fait trois paseos, rue Pergolèse, aux arènes de la capitale de France. A la troisième fois, il déclare que « ces taureaux emboulés » ne sont pas dignes de lui. Il n'y chaussera plus jamais les zapatillas.
A Madrid, les soirs où il « force un peu sur le pichet », un de mes copains récite le poème de Garcia Lorca consacré à la mort de Sanchez Mejias. En préambule, il prévient l’assistance : « En raison de ce satané changement horaire, je commencerais ainsi : A la siete de la tarde… »
Zocato