"Ça peut "détruire" les armuriers locaux", la vente des munitions dans les bureaux de tabac, une mesure toujours pas appliquée et qui divise

Annoncée initialement au 1er janvier 2024, la vente de munitions dans les bureaux de tabac n'est pas encore appliquée. En Ariège, sept magasins sont habilités à vendre des munitions en comptant le magasin Décathlon. Mais dans certaines zones, il faut faire plus de 40 km pour s'approvisionner en attendant que la mesure soit applicable.

À Auzat, commune ariégeoise de 531 habitants située entre Foix et l'Andorre, ce bureau de tabac pourrait bien vendre des munitions pour armes à feu. En plus, des cigarettes, le commerce s'apparente à une véritable petite épicerie qui vend de quoi dépanner les Auzatois. Cette diversification apporte un complément de revenu pour le buraliste.

"Mon but n'est pas de créer de la concurrence, c'est de rendre service aux villageois d'ici et aux chasseurs, car il y a énormément de chasseurs ici. Il n'y a pas d'armurier, il faut aller à Foix ou en Andorre", explique le gérant, Romain Moulis. Intéressé pour vendre des munitions, il n'a pas d'information sur les démarches à accomplir. 

À 70 km de là, Pierre Saludas est le responsable de l'une des sept armureries du département.

Pierre a passé un diplôme spécialisé d'armurier à Saint-Etienne qui l'habilite à vendre des armes, les réparer et aussi vendre des munitions. L'armurier doit respecter des normes de sécurité, les munitions ne doivent pas être directement accessibles aux clients. Derrière son comptoir, le professionnel vérifie le permis du chasseur et son renouvellement. Avec cette nouvelle mesure favorable aux buralistes, il craint surtout pour l'avenir économique des armureries. 

 "On vend déjà de moins en moins d'armes et de munitions, surtout avec la concurrence d'internet. Avec le Covid, les chasseurs ont pris l'habitude de commander chez eux, derrière leur écran. Avoir les bureaux de tabac qui vendent des munitions en plus, ça peut "détruire" les armuriers locaux"

Pierre Saludas, armurier

Jean-Claude, chasseur, a déjà fait son choix. Il restera fidèle à son armurier : "Je n'irai jamais chez un buraliste acheter des cartouches. Je trouve ça lamentable. Parce que c'est la porte ouverte à n'importe quoi. Les gens avec un permis vont acheter des cartouches chez les buralistes et nous les pauvres chasseurs, on est obligé de passer chez l'armurier et de déclarer toutes les armes et tout".

Pour Gérard Maury, le président de la Fédération des buralistes d'Ariège, cette mesure présente deux avantages : "Elle permet de conforter la diversification déjà amorcée chez les buralistes. Et pour les chasseurs eux-mêmes, et les personnes amenées à faire du tri de ball-trap ou autre qui n'auront plus à faire 40 à 50 km et courent pour s'approvisionner en munitions. Je pense que c'est du gagnant-gagnant sachant que l'armurier reste le professionnel." L'armurier pourra d'ailleurs fournir les armes aux buralistes.

Une mesure qui s'accompagne de contraintes

À ce jour, aucun buraliste en Ariège n'est encore apte à vendre des munitions. Tous ne sont pas favorables à ce genre de dispositif et ses contraintes. Selon les premières informations annoncées par le gouvernement, les buralistes devront suivre deux jours de formation validée par un certificat fourni par la préfecture et disposer d'une armoire fermée où les munitions seront entreposées. 

D'abord annoncée au 1er janvier, la vente de munitions dans les bureaux de tabac est testée dans les Pyrénées-Atlantiques durant ce premier semestre 2024, comme le rapportent nos confrères de France inter.

En novembre 2023, le ministère de l’Intérieur précisait à l’AFP que la mesure concerne "la seule vente de munitions de catégorie C (pour la chasse principalement) et D (munitions variées dont l'acquisition est libre aux majeurs)", a spécifié le ministère.

(Avec Sarah Marty)

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