Fermées, en raison d'une explosion d'arrêts maladie, les urgences du Centre Hospitalier Ariège Couserans (CHAC) ont rouvert dimanche 21 novembre avec l'arrivée de la Réserve sanitaire. Cette situation exceptionnelle reflète l'épuisement des soignants face aux manques de moyens et à un management qualifié d'autoritaire.
Après quatre jours de fermeture, le service des urgences du Centre Hospitalier Ariège Couserans (CHAC) à Saint-Girons a rouvert ses portes dimanche 21 novembre. Une reprise de l'activité devenue possible grâce à la Réserve sanitaire.
"Huit infirmiers de la Réserve sanitaire sont arrivés samedi 20 novembre et ont pris leur fonction le plus rapidement possible, et ce, jusqu'au 29 novembre" explique Jean-Claude Thieule, directeur du Centre Hospitalier Ariège Couserans.
HUIT MEMBRES DE LA RÉSERVE SANITAIRE
La situation est exceptionnelle. Les missions de la Réserve sanitaire sont, certes, d'assurer un renfort hospitalier pour "prêter main forte à des collègues soumis à une crise sanitaire, de grande ampleur et/ou de longue duré", comme une pandémie, mais n'a pas vocation à permettre le maintien d'un service d'urgence comme celui du CHAC.
Cette solution, trouvée par la direction du Centre Hospitalier et l'Agence régionale de santé, s'est révélée être la plus simple et sûrement la plus rapide pour parer au problème : celui de compenser l'explosion des arrêts maladie du personnel des urgences.
11 INFIRMIÈRES SUR 12 EN ARRÊT MALADIE
Sur les 12 membres du personnel soignant du service, 11 ont stoppé le travail auxquels s'ajoute la cadre de santé des urgences. Dans un courrier adressé aux patients, toutes expriment un véritable mal-être, un sentiment d'abandon, devenu insupportable.
"Sachez que nous sommes profondément désolées. L'équipe de soignantes est arrivée à bout de souffle. Un épuisement global. (...) Nous sommes fières de faire ce métier, avec toutes les valeurs qu'il comprend : le respect, la bienveillance, l'écoute, prendre soin de l'autre... Aujourd'hui, toutes ces valeurs sont bafouées. Nous n'aurions jamais cru, un jour, penser à changer de métier ...et pourtant ! Nous n'aurions jamais cru devoir vous écrire ces mots non plus."
UNE OFFRE DE PROXIMITÉ EN DANGER
Le manque de moyens "pour prendre soin des gens", le manque de temps afin "d'écouter les patients" sont pointés du doigt.
Concerné directement par cette situation, un médecin généraliste du secteur de Saint-Girons, qui souhaite conserver l'anonymat, rapporte que cette fermeture des urgences a eu des conséquences pour ses patients : "En fin de semaine, un personne aurait dû aller aux urgences pour une radiographie. J'ai trouvé un autre moyen. Heureusement, ce n'était pas particulièrement grave, mais ceci c'est du bidouillage. On s'arrange comme on peut."
Il s'avoue navré devant l'emploi de membres de la Réserve sanitaire : "Il n'y a pas de mots. Je suis scandalisé. Nous sommes arrivés à un stade de pallier concernant le manque de moyens. C'est terrifiant et tout cela est le résultat des politiques publiques. Cela remet en cause la continuité des offres de soins de proximité, alors que des patients mettent trois quarts d'heure de route pour venir se faire soigner à Saint-Girons."
Selon le directeur de l'établissement, Jean-Claude Thieule, "une partie des infirmières va reprendre le travail" aux côtés des membres de la réserve sanitaire.
MANIFESTATION DEVANT LES URGENCES
Mais tout n'est pas résolu. Le management de la direction du CHAC, qualifié d"autoritaire" par le syndicat CGT, est lui aussi dénoncé. "Nous attendons que les méthodes de management changent, estime Arnaud Sevin, secrétaire général de la CGT du CHAC. Le personnel de santé de l'établissement subit des pressions permanentes, des injonctions, des réquisition illégales, des rappels sur les jours de repos, de l'agressivité, du mépris. Ce n'est plus acceptable."
"Nous avons demandé à l’Agence Régionale de Santé Occitanie d’accélérer le démarrage du lancement d’un audit de la gouvernance et des pratiques managériales qui avait été acté récemment, répond à ce sujet Jean-Claude Thieule. Cette mission extérieure permettra de réaliser une évaluation de la gouvernance et des pratiques managériales en place au sein du CHAC et d’aider à renforcer la place de chacun dans le pilotage et la gestion de l’établissement ainsi que de définir des actions communes d’amélioration."
Une décision, a priori, insatisfaisante pour la CGT qui appelle à manifester devant les urgences lundi 22 novembre. "Cette situation inédite est une réelle mise en danger de la population et aura des impacts sur les autres hôpitaux. Malgré toutes nos alertes aux autorités depuis des années, nous y sommes : la destruction de l’hôpital public se met en place au CHAC. La santé et la vie de tous les usagers est désormais en danger" dénonce le syndicat dans un tract.