Les familles d'enfants et d'orphelins de djihadistes détenus en Syrie et en Irak appellent le gouvernement à accepter leur retour en France. Ils seraient 200 enfants français, dont 70% ont moins de 5 ans. Une grand-mère de Narbonne lance un appel au gouvernement pour sauver ces enfants.
Christine Morin, 60 ans, habite Narbonne. Sa petite-fille est détenue à Al-Hol en Syrie avec sa mère, une Turque. Son fils, Thomas, le père de la fillette aurait péri fin février dernier, pendant la bataille de Baghouz.
L'enfant n'est donc pas orpheline. Et pour qu'elle puisse revenir en France, il faut déjà que sa mère, détenue avec sa fille en Syrie, accepte son départ.
L'enfant "va avoir 2 ans cet été, je veux la tirer de là-bas avant que sa mémoire ne se forme", explique cette grand-mère, en montrant sur son téléphone des photos de cette petite rousse dans une robe blanche à froufrous.
"L'été se profile, ils sont sous des tentes, il va faire chaud. Ils attendent que tous nos petits soient morts ?" s'exclame-t-elle entre larmes et colère.
Pour les familles, laisser ces enfants là-bas, ils seraient 200 Français environ, revient à risquer de "les laisser grandir dans une haine de leur pays".
Christine Morin en est certaine : "S'ils grandissent en baignant dans cette idéologie, on n'en sortira jamais. C'est là-bas qu'ils seront des bombes à retardement".
A Al-Hol, le plus grand camp, la situation sanitaire est "critique", a confirmé fin mai Médecins sans frontières. Fin avril, l'Organisation mondiale de la Santé y recensait 286 morts depuis le début de l'année, victimes notamment de déshydratation et de diarrhées aigües.
Ce lundi matin, 12 enfants de djihadistes ont été rapatriés en France. Ils ont atterri à l’aéroport de Villacoublay. Parmi eux, les 2 enfants de Yassine Sakkam originaire de Lunel. Ce djihadiste présumé de 29 ans a été condamné à mort en Irak le 29 mai dernier. Leur mère est prisonnière.
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"Ils attendent que tous nos petits soient morts?"
Après les rapatriements d'orphelins de jihadistes détenus en Syrie, les familles françaises des quelque 200 autres enfants dénoncent "un cas par cas insupportable", "contraire aux valeurs de la France".
Après 5 premiers orphelins en mars, Paris a rapatrié lundi de Syrie 12 autres enfants, 10 orphelins et 2 dont la mère originaire de l'Hérault a accepté de se séparer.
"C'est une bonne nouvelle, mais il faut aller bien plus loin et rapatrier tout le monde rapidement", a aussitôt déclaré à l'AFP Thierry Roy, membre du Collectif Famille Unies qui regroupe plus d'une cinquantaine de familles de jeunes partis en Syrie et Irak après 2011.
Selon les familles et leurs avocats, une centaine de mères et environ 200 enfants français, aux trois quarts âgés de moins de 5 ans, survivent "dans des conditions sanitaires déplorables" dans les camps syriens où sont détenues des centaines de familles étrangères qui avaient suivi l'Etat islamique.
Mais selon un sondage publié fin février, deux tiers des Français ne veulent pas voir revenir en France les enfants de jihadistes, par crainte notamment qu'ils le deviennent à leur tour en France. "Une aberration" pour les familles qui soulignent, entre autres, que la plupart sont encore tout petits.
"Radicalisation croissante"
Selon des témoignages concordants, à Roj comme à Al-Hol, certaines détenues étrangères fondamentalistes imposent leur loi à d'autres, parfois avec violence (tentes incendiées, agressions...). L'OMS a elle aussi noté la "radicalisation et les tensions croissantes" entre détenues à Al-Hol.
La France continue de refuser catégoriquement tout rapatriement des adultes qui doivent, selon elle, être jugés "là où ils ont commis des crimes".
Onze Français détenus en Syrie ont été transférés en Irak, un Etat souverain au contraire du Kurdistan du nord syrien, et condamnés à mort tout récemment, dont Yassine Sakkam, 29 ans, un Héraultais originaire de Saint-Just, près de Lunel, dont le fils a été rapatrié en France avant-hier.