Environ 200 chevaux utilisés chez Sanofi, pour produire des sérums, se seraient retrouvés dans l'assiette du consommateur après falsification des documents vétérinaires. Le géant pharmaceutique a indiqué avoir collaboré à l'enquête et avoir été interrogé en qualité de témoin.
Le site de Sanofi Pasteur, situé à Alba la Romaine en Ardèche, aurait cédés ces chevaux entre 2010 et 2012 à un marchand de chevaux du Gard, qui les aurait ensuite vendus à un négociant de Narbonne, soupçonné d'être l'organisateur du trafic. Aucun de ses collaborateurs n'aurait été mis en cause. L'enquête et les auditions des interpellés au cours de leur garde à vue serviront à établir quand et comment les documents vétérinaires ont été truqués et dans quelle mesure Sanofi ignorait de tels agissements.
Sanofi Pasteur a précisé avoir revendu autour de 200 chevaux depuis trois ans, en général à des écoles vétérinaires, des particuliers et des professionnels. Les bêtes, "identifiées avec des puces électroniques, pour la traçabilité", ne présentent pas de danger pour la consommation humaine, a assuré un porte-parole de Sanofi Pasteur, division vaccins du groupe. Il est précisé dans leur certificat de vente "que ces animaux ne doivent pas intégrer la filière alimentaire, non pas parce qu'il y a un danger mais par mesure de précaution", a-t-il dit.
Les chevaux n'étaient pas utilisés pour des tests de laboratoire mais pour fabriquer des médicaments, des "sérums équins purifiés" servant ensuite d'anticorps antirabiques (rage), antitétaniques (tétanos) et antivenimeux, souligne Sanofi Pasteur.
Au total, vingt-et-une personnes ont été interpellées lundi dans le sud de la France lors d'une vaste opération de gendarmerie visant ce nouveau trafic de viande de chevaux. Un trafic qui concernerait aussi, dans une moindre mesure, des chevaux achetés à des centres équestres ou à des particuliers. Il s'étendrait à l'Espagne où l'abattoir de Gérone a été perquisitionné.
Parmi les personnes interpellées en Languedoc-Roussillon, figurent le négociant de Narbonne et au moins un proche, plusieurs autres négociants en viande, des vétérinaires et un informaticien des Alpes-de-Haute-Provence. Les gendarmes se sont ainsi rendus au petit matin chez le négociant de Narbonne pour l'interpeller, puis se rendre avec lui à l'abattoir municipal, a constaté un photographe de l'AFP. Là, ils ont procédé à des fouilles et emporté des documents. Ils ont ensuite saisi de la viande dans une boucherie de Narbonne, qui pourrait appartenir au mis en cause, avant de la charger dans un camion frigorifique.
"Nous n'y sommes pour rien", a dit à l'AFP la directrice du petit abattoir de Narbonne, Myriam Patrice. Le négociant placé en garde à
vue n'était qu'"un usager de l'abattoir", a-t-elle dit. "Il y louait des bureaux et des frigos et y faisait abattre ses chevaux, sous le contrôle d'inspecteurs
vétérinaires".
Le précédent Spanghero
Cette affaire risque d'éprouver à nouveau la filière de viande de cheval. Celle-ci avait été durement touchée par la révélation, début 2013 qu'une entreprise de l'Aude, Spanghero, revendait de la viande de cheval pour du boeuf. Cette viande avait ensuite servi à la préparation de millions de plats cuisinés, comme des lasagnes, pour des grandes marques ou la grande distribution.
Le ministre de la Consommation Benoît Hamon a distingué la nouvelle affaire du scandale Spanghero. "C'est différent, là il pourrait s'agir d'un problème sanitaire", a-t-il dit sur RTL "Nous avons depuis le début de l'année mis sous surveillance la filière viande et la filière poisson en France" pour rétablir la confiance, a-t-il ajouté. "La France est le premier pays en Europe à avoir inscrit dans sa loi l'étiquetage de l'origine de la viande dans les plats préparés. Nous attendons maintenant de Bruxelles qu'elle nous donne le feu vert, je l'espère en janvier prochain", a dit le ministre.