Pour le début des vacances de février, les stations de Laguiole et de Brameloup situées sur le plateau de l'Aubrac peuvent compter sur un beau manteau blanc. Elles sont ouvertes tous les jours. Mais avec le réchauffement climatique, ces stations de moyenne montagne sont en sursis.
Aux dernières vacances de Noël, le thermomètre affichait plus de 20 degrés sur le plateau de l'Aubrac. Les prairies étaient vertes et les vaches paissaient tranquillement. Finalement, la neige est tombée en masse. A la mi-janvier, le paysage a basculé dans le blanc. Une aubaine pour les petites stations aveyronnaises de Laguiole et de Brameloup situées à 1400 mètres d'altitude.
Brameloup : tributaire de la neige naturelle
Créée dans les années 60, Brameloup a rarement connu des hivers aussi atypiques. La station, qui n'a plus de canons à neige depuis une trentaine d'années, est tributaire de la neige naturelle. Les conditions météorologiques de ce début d'année sont donc providentielles. En haut des pistes, il est tombé 90cm de poudreuse. Pas question de rater l'occasion d'ouvrir le domaine.
La dameuse reprend ses tours de piste. Mais avec l'explosion du coût de l'énergie, les pisteurs ont ordre "de faire attention". Leur défi : faire preuve de rigueur et d'ingéniosité pour diminuer la facture sans faire gonfler le prix des forfaits.
Pour damer tout le domaine de ski de piste, il faut environ 4 heures. Notre vieille dameuse roule au GNR (Gazole non routier). Son coût a flambé : plus d'1,58 euros le litre. On essaye d'avoir une conduite écoresponsable, de pas trop tirer sur la machine et on optimise le damage.
Gonzalo Diaz, directeur de la station de Brameloup
Même état d'esprit à une vingtaine de kilomètres. A la station du Bouyssou à Laguiole, l'enjeu de cet hiver 2023 est bien de ne pas trop dépenser.
A Laguiole : des canons indispensables
La grande sœur de Brameloup possède 18 canons à neige. Une production indispensable pour maintenir ouvert le domaine. Mais une neige artificielle qui coûte cher. La facture d'électricité sur une saison s'élève à 50.000 euros. Avec l'explosion du coût de l'énergie, elle pourrait doubler.
Alors, pour ne pas tomber dans le rouge, Brameloup et Laguiole mutualisent le personnel, font des achats groupés de matériel et se sont même entendues pour ne pas ouvrir en même temps hors vacances scolaires.
Sur les dix remontées mécaniques, trois ne fonctionneront pas ou très peu. Pendant les vacances, on les fera tourner en fonction du flux des skieurs.
Christophe Rançon, directeur de la station de Laguiole
Sans neige : ce sera VTT et bob luge
Heureusement, l'Aubrac n'est pas une destination 100% ski. Le territoire s'est forgé une solide image de destination nature. Eté comme hiver, les touristes y viennent pour la contemplation des paysages, les randonnées, la gastronomie.
Les collectivités misent donc beaucoup sur le concept de "quatre saisons". Le syndicat mixte des stations de l'Aubrac réfléchit à plusieurs scénarios. Si la neige fait défaut, Brameloup deviendrait un pôle VTT. Laguiole serait le secteur glisse de l'Aubrac avec l'installation d'une luge sur rails. Un projet à plus de 2 millions d'euros qui est loin de faire l'unanimité. Le président du syndicat mixte des stations de l'Aubrac y croit.
Il faut qu'on imagine un projet qui nous permette, s'il n'y a pas de neige, de glisser tout au long de l'année. On a profité de l'aubaine du plan "Avenir montagne" qui donne la possibilité de travailler sur cette transition. On a déjà obtenu 30% de financement de l'État et si on ajoute la région et les autres partenaires, on est à 80% de subvention.
Vincent Alazar, maire de Laguiole et président du syndicat mixte des stations de l'Aubrac
Mais ces investissements coûteux suffiront-ils à maintenir une économie locale ? Le réchauffement climatique aura t'il raison de ces petites stations de moyenne montagne ? Pour Gonzalo Diaz, la belle époque du ski est clairement terminée.
On ne se fait pas trop d'illusion. On est bien conscient que l'on est arrivé au bout de quelque chose. On aura des hivers extrêmement contrastés, avec soit beaucoup de neige ou pas du tout. Et si la neige fait défaut, il va bien falloir faire autre chose. Mais ça va être quand même très compliqué...
Gonzalo Diaz, directeur de la station de Brameloup
Les projections d'enneigement dans les années à venir ne sont pas optimistes. De nombreuses études montrent que la limite pluie-neige, qui détermine l’enneigement d’une station, est passée de 1200 mètres d’altitude dans les années 1960 à environ 1500 mètres aujourd’hui.
Reportage complet à voir dans l'émission Enquêtes de Région ce mercredi 8 février à 23 h sur France 3 Occitanie.