Coronavirus : alors que Rodez ferme son marché, faut-il tous les interdire ?

Lieu de rencontre, de convivialité et d’échange, les marchés de plein vent participent à l’économie locale. A Rodez, ce rendez-vous bihebdomadaire est désormais fermé sur décision de la municipalité. Face à l'épidémie de Covid-19, faut-il suivre cet exemple et fermer tous les marchés ?
 

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La municipalité ruthénoise a été la première à prendre la décision de fermer son marché de plein vent. Finie l’ambiance colorée et animée si caractéristique aux marchés. Jusqu’à nouvel ordre, la place du Bourg ne bruissera plus, comme c’était le cas deux fois par semaine, des appels entre étaliers et des bavardages entre clients.
  

C’est après avoir pris avis auprès de la cellule de crise de l’hôpital de Rodez qui lui a signifié qu’il serait préférable de fermer le marché pour limiter les risques de propagation du virus Covid-19 que j'ai pris la décision

précise Christian Teyssèdre, maire de Rodez.
 


Entre colère et incompréhension

La décision du maire de Rodez a du mal à passer chez les commerçants habitués du marché. Beaucoup ne comprennent pas cette fermeture alors que depuis le début de l’épidémie, tous se sont attachés à respecter les gestes barrières préconisées par les autorités sanitaires : port de gants et de masque et distanciation sociale.

C’est une honte de fermer le marché, d’autant que le maire est passé nous voir samedi pour nous assurer qu’il resterait ouvert, comme tous les commerces alimentaires. Je fais quoi des 80 volailles que j’ai abattues en prévision du marché de samedi ? Et pourquoi fermer Rodez alors que Villefranche-de-Rouergue reste ouvert ? On voudrait tuer les petits producteurs qu’on ne s’y prendrait pas autrement.

Catherine Lagarrigue - Volaillère
 

Samedi, Catherine Lagarrigues ira livrer les clients qui lui ont passé commande mercredi dernier. Pas question dit-elle de laisser tomber cette clientèle, majoritairement âgée, au prétexte que le marché ne se tiendra pas.
 

Christian Bec, lui, s’attend à perdre une grande part de sa production maraîchère… et de ses revenus. Depuis un siècle que l’exploitation se transmet de père en fils, c’est la première fois qu’elle est confrontée à un tel cataclysme. Il ne sait pas s’il doit semer au risque de devoir jeter sa production si le confinement dure, ou s’il doit reporter ses semis au risque de manquer de marchandise si le confinement est rapidement levé. « Les radis seront prêts dans un mois. Si le marché n’a pas repris, je serai bon pour tout jeter » dit-il d’un ton désabusé.

J’ai une toute petite production que j’écoule uniquement sur le marché de Rodez. Je vais devoir puiser dans mes économies pour faire face. Ma chance est d’être toujours resté petit et de ne pas avoir de salarié. Je suis un vrai Aveyronais donc je vais m’en sortir mais c’est tout de même catastrophique

Christian Bec – Maraîcher
 

Maraîchers, fromagers, boulangers, volaillers, primeurs, les habitués du marché de Rodez s’interrogent. Pourquoi fermer les marchés de plein vent qui respectent les consignes de sécurité et autoriser l’ouverture des grandes surfaces à la porte desquelles s’agglutinent des dizaines de clients avant l’ouverture.
 

Des voix s’élèvent contre la fermeture des marchés

Des structures comme Erables 31 (le bio en Haute-Garonne) ou Saveurs Commerce se sont elles aussi étonnées du choix fait par la municipalité ruthénoise. Saveur Commerce, fédération des spécialistes du commerce de proximité, invite ses adhérents à adresser au maire de Rodez un courrier lui demandant de revoir sa position. Même action chez Erables 31 qui exige des maires le maintien des marchés de plein vent dans les règles d’hygiène et de sécurité nécessaires à la santé de tous, rappelant au passage que « les marchés de plein vent sont autorisés par l’arrêté ministériel du 15 mars 2020 »

En Ariège, la Confédération paysanne et le groupement des agriculteurs bio attirent eux aussi l'attention des responsables politiques et des citoyens sur la question des marchés qui sont le lieu de vente privilégié d'un grand nombre de petits producteurs. Ils expliquent que les marchés permettent de vendre des produits frais directement entre le producteur et le consommateur, sans autre intermédiaire, limitant ainsi les risques de contamination à condition que les consignes de sécurité soient étroitement respectées.

Le maintien des marchés revêt un double enjeu. Poursuivre la distribution alimentaire auprès des citoyens et assurer la pérennité des petites exploitations. L'annulation des marchés met en péril l'agriculture de proximité à laquelle beaucoup de Français restent attachés.

Angel Alègre – Co porte-parole Confédération Paysanne 09

 


Vers une fermeture généralisée des marchés de plein vent

A l’instar de Rodez, d’autres municipalités d’Occitanie ont décidé la fermeture des marchés de plein vent. Alors, faut-il décréter une fermeture de tous les marchés ? Le ministre de la santé Olivier Véran n’y est pas favorable. Dans une interview donnée à une chaine de télévision le 18 mars, il a assuré que les marchés alimentaires ont vocation à rester ouverts sauf si les conditions de fréquentation ne permettent pas de garantir la santé des personnes face au coronavirus. Ainsi, les marchés « où l’on voit des foules » et « avec beaucoup d’étals » seront fermés sur autorité des préfets.
 

A Tarbes, le marché est maintenu sous la halle avec des étals très espacés. En images le reportage de Régis Cothias et Emmanuel Fillon

 
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