Robert Ménard voulait faire l'union, mais ne s'offre pour maigre lot de consolation qu'un programme: la droite dure a quitté Béziers plus divisée qu'en arrivant, ignorée par Les Républicains, et surtout brouillée avec le FN, qui se distancie du maire de Béziers et de son mouvement "Oz ta droite"
Le maire de Béziers, les droitiers hebdomadaire Valeurs Actuelles et site internet Boulevard Voltaire espéraient faire du "Rendez-vous de Béziers" un moment-clé de recomposition politique. L'affiche offrait quelques promesses: l'entrepreneur libéral Arnaud Dassier, deux figures idéologiques majeures de l'extrême droite, Renaud Camus et surtout Alain de Benoist, mais aussi l'éditorialiste du Figaro Ivan Rioufol, le candidat à la primaire des Républicains Jean-Frédéric Poisson, la députée du FN Marion Maréchal-Le Pen, etc.
Au-delà d'une dizaine de tables rondes et de rencontres en coulisses, le week-end a été surtout marqué par un coup d'éclat: le départ théâtral samedi midi de la nièce de Marine Le Pen, mandatée par le FN pour ce "Rendez-vous de Béziers".
Celle-ci s'est fâchée de voir M. Ménard, élu en 2014 notamment avec le soutien du parti d'extrême droite, déclarer que son "mouvement citoyen" appelé "Oz ta droite!" ne servirait "de marchepied à personne" pour 2017, et donc pas au FN, pourtant
"incontournable" d'après elle. Explication de la benjamine du Palais Bourbon: "un blocage sociologique" de cette droite, à qui il "déplaît que les idées auxquelles ils croient soient défendues exclusivement par le FN". Après son départ, et celui du vice-président du FN Louis Aliot dès vendredi soir, ne restaient que quelques cadres FN de second rang, et plusieurs centaines de personnes, 2.000 d'après M. Ménard, pour des débats qui ont parfois opposé partisans de Thatcher et ceux de Colbert en économie samedi matin, ou pris une tournure très radicale, comme celui de samedi après-midi, trois heures de rejet virulent de l'islam et de l'immigration.
Adoption de 51 "marqueurs de droite" ce dimanche
Cette mouvance positionnée sur un créneau identitaire, qui juge le FN trop étatiste et Les Républicains trop "européistes", a adopté dimanche 51 "marqueurs de droite", finalement plus proches du programme du FN que ce qui avait fuité dans la semaine, particulièrement sur le domaine régalien (droit du sang, préférence nationale, suppression ou conditionnalisation des "pompes aspirantes" que seraient les allocations, rétablissement de la double peine, fin du regroupement familial), mais des mesures plus libérales en économie (retraite à 65 ans, fin des 35 heures, réduction de l'État-providence). En revanche, pas de sortie de l'UE en tant que telle, ni de l'euro, clé de voûte du projet de Mme Le Pen.
Reste que si M. Ménard a convoqué son expérience "d'agit-prop" à la tête de Reporters sans frontières pour promettre de "pourrir la vie" des candidats de droite qui s'affranchiraient de ces mesures, son satisfecit devant un amphithéâtre plein a pu sonner creux en l'absence de têtes d'affiche.
Le maire de Béziers a rendu Florian Philippot responsable, via des pressions, du départ de Mme Maréchal-Le Pen, donnant lieu à un échange acrimonieux sur Twitter, le premier s'auto-proclamant porte-voix d'une supposée majorité silencieuse frontiste qui rejetterait le bras droit de Mme Le Pen, celui-ci et ses partisans renvoyant le maire de Béziers à son "juppéisme" supposé.
La députée du Vaucluse avait pourtant samedi, comme M. Ménard dimanche matin,rejeté toute "rupture". Le FN risque en effet de perdre l'un de ses rares alliés extérieurs, notamment sous la poussée de M. Philippot, qui se sent renforcé à l'issue de ce week-end et qui n'est guère adepte du positionnement "à droite" toute de M. Ménard.
Les Républicains, eux, ont stratégiquement ignoré le rassemblement, le circonscrivant à un forum entre droite de la droite et extrême droite.
Deux autres figures de cette "droite hors les murs" étaient aussi bruyamment absents: Nicolas Dupont-Aignan, candidat de Debout la France pour la présidentielle, et Philippe de Villiers, qui semble hésiter à revenir dans le champ politique.Commentaire d'un acteur de la mouvance: "Le degré d'amateurisme de l'extrême droite est juste dingue. Tout est foireux."