Élections régionales et départementales : la question de leur maintien source de polémiques en Occitanie

L’ensemble des maires de France a reçu un message leur demandant de se positionner pour le maintien ou non des prochaines élections départementales et régionales qui doivent se tenir les 13 et 20 juin prochain. Un questionnaire source de nombreuses polémiques. 

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Les élections régionales et départementales pourront-elles avoir lieu en juin prochain ? Déjà déplacées une première fois, l’Etat prévoit toujours d’organiser ces scrutins les 13 et 20 juin prochain mais sa position pourrait changer cette semaine. Les débats parlementaires débutent ce mardi et le gouvernement a souhaité auparavant connaître la position des maires de France. Vendredi soir, les 35 000 édiles du pays ont reçu un courriel leur demandant de répondre par oui ou par non et avant ce lundi, “si les conditions préconisées par le comité scientifique semblent réunies pour tenir les deux scrutins”. Un acte qui passe mal auprès des maires d’Occitanie.

Du vendredi pour lundi

Reçu vendredi à 21h, pour une réponse lundi avant 11h...Le questionnaire envoyé par la préfecture a déclenché la colère des élus. “On traite ça comme si ce n’était pas important. Mais ce sont les fondements de la République, les élections !” s’insurge Daniel Calas, le maire PS de Gragnague en Haute-Garonne. 

Le délai est jugé trop court pour étudier le rapport du Conseil scientifique et pour consulter leurs services techniques. Le président de l’Association des Maires de France dans l’Hérault, Frédéric Roig, dénonce un manque de courage de la part de l’Etat, une volonté de fuir ses responsabilités : “Demander l’avis de chaque maire, pourquoi pas ? Mais il fallait le faire il y a un mois ou deux. Le faire dans la précipitation, et en utilisant les moyens habituellement utilisés pour des crises climatiques, c’est inacceptable. Le gouvernement recherche simplement la caution des élus, mais qu’il prenne ses responsabilités !”

Le gouvernement recherche simplement la caution des élus, mais qu’il prenne ses responsabilités !

Frédéric Roig, Président de l’Association des Maires de France dans l’Hérault

Une position partagée par la Présidente de Région Carole Delga. “Cette concertation, c’est une fausse concertation”, dénonce l’actuelle candidate à sa réélection. Elle accuse le gouvernement de chercher à reporter ces élections sans en avoir le courage : “C’est une manipulation politicienne et c’est une tentative de transfert de responsabilités d’une décision importante qui relève du gouvernement”.

Appel au boycott et accusation de manipulation 

Une manipulation politicienne c’est aussi le ressenti de nombreux maires et de sénateurs de la région. D’autant plus que les groupes parlementaires et les associations d’élus ont déjà été consultés sur le sujet. Une mission a même été confiée à l’ancien président du Conseil constitutionnel, Jean-Louis Debré qui s’est positionné en faveur de la tenue de ces élections en juin. “Le gouvernement sait que ces élections ne lui seront pas favorables et il souhaite éviter une nouvelle claque électorale”, analyse le sénateur socialiste de l’Hérault, Hussein  Bourgi. “Mais dans un pays démocratique comme la France, on ne joue pas avec les scrutins. L’intérêt partisan du président ne doit pas dicter le calendrier électoral. Comment pourra-t-on expliquer à la mi-mai la réouverture des commerces et des terrasses si elle a lieu et un mois plus tard le report des élections ? Il faut être logique.”

Le gouvernement sait que ces élections ne lui seront pas favorables et il souhaite éviter une nouvelle claque électorale

Hussein Bourgi, sénateur PS de l'Hérault

Dans l’Hérault et le Gard, le questionnaire est vécu comme une provocation après des mois à demander davantage de considération pour les élus locaux dans les décisions gouvernementales. “Nous, nous considérons que nous ne sommes pas compétents en la matière. Nous ne sommes pas compétents d’un point de vue légal, et nous ne sommes surtout pas compétents d’un point de vue technique”, s’offusque le président des maires ruraux de France dans le Gard, Sylvain André. “Bien sûr que l’on veut être consulté, mais sur des questions pour lesquelles nous pouvons apporter une plue-value. Cette question là, relève purement des experts sanitaires.” 

Le sénateur Hussein Bourgi a été en contact avec une cinquantaine de maires héraultais au cours du week-end, tous partage cette position et ont décidé de boycotter la consultation : “le gouvernement qui est le mieux placé pour trancher. C’est lui qui est en contact quotidien avec l’Agence de santé et le conseil scientifique. Lui seul peut faire des projections sur le mois de juin concernant l’épidémie et la vaccination. C’est donc à lui de nous dire si le scrutin peut avoir lieu ou non”. 

Au niveau national, 35% des maires n’ont pas répondu à la consultation. Les autres se sont déclarés favorables à la tenue des élections en juin prochain à hauteur de 56%.

Des maires partagés entre maintien et report des élections

Si la plupart des maires sont favorables au maintien de ce double scrutin qui permettra aux électeurs de renouveler leurs conseillers départementaux et régionaux, d’autres s’inquiètent des nombreuses préconisations du conseil scientifique et de comment ils vont pouvoir les mettre en œuvre.

Tous craignent ne pas trouver suffisamment de personnel pour assurer l’accueil dans les bureaux de vote comme l’explique Philippe Ribot, le président de l’association des maires de France dans le Gard : “Ces personnes vont être au contact de la population durant toute la journée, et malgré les protections que l’on mettra en place, ça va être compliqué de trouver des volontaires”.

Au-delà du respect des gestes barrières, le conseil scientifique préconise de faire appel à des personnes vaccinées pour tenir les bureaux de vote. Si le bureau n’est pas tenu uniquement par des personnes vaccinées, alors les membres de ces bureaux devront réaliser des tests de dépistage deux jours avant le vote et 5 jours après, puis 8 jours plus tard en cas de symptômes. Un protocole jugé “tout simplement surréaliste" par Frédéric Roig, le maire de Pégairolles-de-l’Escalette dans l’Hérault et difficile à mettre en place par Sylvain André, le maire de Cendras (dans le Gard) : “C’est déjà très difficile de trouver des assesseurs pour compléter nos bureaux. Dans une mairie rurale, l’équipe municipale travaillent tous, ça semble compliqué de trouver du temps sur notre travail pour aller réaliser ces tests”.

Un protocole tout simplement surréaliste

Frédéric Roig, maire de Pégairolles-de-l'Escalette

Polémique autour du débat démocratique

La Présidente de Région Carole Delga est favorable au maintien de cette double élection les 13 et 20 juin prochain. Dans une lettre adressée aux maires d’Occitanie, elle les a d’ailleurs invité à se déclarer disposés à organiser ce vote. 

Mais maintenir un scrutin peu de temps après la sortie du confinement pose de nombreuses questions, notamment au sujet de la campagne électorale. 

“Où est le débat démocratique si on reste confiné jusqu’au 15 mai par exemple ? Qu’en est-il de la campagne ?", s’interroge le maire de Pégairolles-de-l’Escalette, Frédéric Roig. Une position partagée par les adversaires de Carole Delga dans la course à la tête de la Région, à l’image de Vincent Terrail-Novès : “Le vrai hold-up démocratique c’est de ne pas permettre à tous les candidats de faire campagne équitablement”, dénonce le maire de Balma. “Aujourd’hui, ce que j’observe c’est que les présidents de région continuent de faire campagne  dans le cadre de leur mandat, alors que nous, les challengers, les petits candidats, on ne peut pas car, comme tous les français, nous sommes assignés à résidence et limités limité à un périmètre en termes de rayon de déplacement.”

En cas de maintien des élections en juin, il semble en effet difficilement imaginable qu’une véritable campagne électorale avec meetings et rencontres sur les marchés puisse se tenir. 

Le conseil scientifique refuse de trancher

Le conseil scientifique, dans son rapport du 29 mars dernier, envisage les différents scénarios possibles et les risques inhérents à chacun. Mais il refuse de trancher la question, arguant qu’“il incombe aux seules autorités politiques de procéder en toute légitimité démocratique aux appréciations générales, qui dépassent les seuls aspects sanitaires, ainsi qu’aux arbitrages nécessaires, qui sont éminemment politiques s’agissant  de l’organisation d'élections".

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