Des riverains se sont mobilisés jeudi matin contre la construction d'un parking à l'emplacement de l'ancien cimetière de Tavel, dans le Gard. Ils dénoncent une atteinte à la mémoire de leurs ancêtres et au patrimoine. En l'attente d'éventuelle fouilles archéologiques, les travaux sont suspendus.
Mardi matin, le maire de Tavel a lancé la construction d'un parking d'une douzaine de places à proximité de la chapelle du village. Or, cette parcelle correspond à l'emplacement de l'ancien cimetière, utilisé jusqu'en 1850. Choqués, des riverains ont demandé l'arrêt des travaux.
Pour exprimer leur colère et matéraliser l'ancien cimetière, des habitants se sont rassemblés jeudi matin pour planter des croix aux noms de leurs familles.
Une offense aux ancêtres
Âgée de 34 ans, Coline Delorme appartient à la dernière génération de la famille Odoyer. Cette famille habite le village de Tavel depuis 1650. Une partie de ses ancêtres est donc inhumée dans ce cimetière.
Les anciens n’ont pas de valeur ! Pour moi c’est un manque de respect, de considération.
En découvrant que les travaux avaient commencé, Coline Delorme a été très choquée. "Quel message on envoie aux nouvelles générations ? Ça veut dire que dans 200 ans, on va construire un centre commercial sur notre cimetière actuel ?"
Pour Coline, ce parking serait une offense à "tous ceux qui ont bâti Tavel."
Un parking sur le "cœur historique du village"
"Tout ça va être oublié, une fois qu’il y aura des voitures dessus", soupire Pascale de Chaunac. Venue elle aussi planter une croix, elle s'inquiète des conséquences des travaux sur la mémoire du village, mais aussi plus concrètement, sur la solidité de la chapelle Saint-Ferréol située en contrebas.
Les travaux créent des vibrations. Ils pourraient fragiliser la chapelle romane, car les fondations des bâtiments anciens ne sont jamais très profondes.
"C'est le plus mauvais endroit pour faire un parking, c'est le cœur historique du village", renchérit Xavier Ternisien, conseiller municipal d'opposition et créateur de l'association Tavel avenir et patrimoine. Le jardin public accueille également un monument aux morts.
Coline Delorme et les autres riverains mobilisés regrettent par ailleurs de voir disparaître un espace vert, où les enfants pouvaient venir jouer. "Toutes les communes cherchent des espaces verts. Là, nous en avons un, et on veut le changer en parking. C'est ça qui est aberrant", s'exclame Pascale De Chaunac.
Le maire en quête d'apaisement
La colère porte également sur la façon de procéder de la mairie. "Personne n'a été mis au courant, il n'y a pas eu d'arrêté municipal. Comme si la mairie avait voulu faire passer ça en catimini", regrette Xavier Ternisien.
"Je n'ai aucune intention de faire un coup de force", se défend Claude Philip, qui entame son second mandat de maire de Tavel. "Toutes les précautions étaient prévues pour respecter le patrimoine", tient-il à souligner.
Pour la mairie, le projet se justifie par "les grosses difficultés de stationnement" que le village connaît. L'objectif : réduire les stationnements "sauvages", et permettre un accès plus sécurisé aux petits commerces.
La commune dispose de très peu de foncier. Nous n'avons pas énormément de possibilités quant à l'emplacement d'un nouveau parking, d'où ce choix.
Le maire rappelle également que les corps ont été exhumés en 1850 et transportés dans le cimetière actuel. "Il reste certes quelques ossements, mais je suis étonné que les précédents chantiers n'aient pas suscité une telle émotion."
Des fouilles archéologiques
Les riverains ont contacté la Direction Régionale des Affaires Culturelles. Un diagnostic archéologique sera formulé par un spécialiste des monuments historiques. En attendant, les travaux sont suspendus.
"Selon les réponses de la DRAC, nous verrons si ce projet doit être mené à terme ou abandonné. Je n'ai pas l'intention de mettre le feu à ce village", rassure le maire.
L'avenir du site est désormais suspendu à l'expertise archéologique.