Crachats, injures : 400 avocats du Gard réduits au silence après des incidents très graves aux assises de Nîmes

Me Khadija Aoudia, bâtonnier de l'ordre des avocats de Nîmes a frappé la barre d'interdit, ce qui signifie qu'aucun avocat du Gard n'a plus eu droit de plaider cette semaine. Une mesure rarissime dans les prétoires pour protester contre "une violation des droits de la défense".

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Le ton de Khadija Aoudia est solennel. Grave. Comme les incidents à l'origine de la décision, -rarissime-, prise par celle qui a été élue à la tête de l'Ordre des avocats de Nîmes : frapper d'interdit la barre. Cela veut dire qu'aucun avocat de la juridiction n'a plus le doit de plaider. C'est la première fois qu'elle a lieu dans le Gard.

Droits de la défense bafoués

Le bâtonnier a pris cette décision car elle a estimé que les droits de la défense avaient été bafoués lors d'un procès aux assises qui avait débuté à Nîmes la semaine dernière. Une affaire d' extorsion avec arme, vol avec violence, en récidive et association de malfaiteurs. Sept accusés étaient renvoyés devant les assises, six seulement étaient présents, cinq hommes et une femme, le septième en fuite.

Le gang originaire de Marseille était soupçonné de plusieurs agressions très violentes, de home-jacking dans les Bouches-du-Rhône et dans le Gard à Meynes notamment au cours de l'été 2020. 

Crachat et insultes envers un avocat 

A l'ouverture du procès, un avocat commis d'office après le désistement d'une consœur s'est fait cracher dessus et insulter par l'un des accusés. 

Il était en état de sidération.

Khadija Aoudia, bâtonnier de l'ordre des avocats de Nîmes

A propos de l'avocat agressé à l'audience

Alertée, le bâtonnier se désigne pour remplacer l'avocat molesté et demande un renvoi du procès. Demande refusée par le président des assises qui décide de la poursuite de l'audience, conformément aux demandes de l'avocat général, "pour les victimes et pour éviter qu'à l'avenir d'autres s'en servent comme prétexte pour demander un renvoi".

Interdit de plaider

"En raison de la violation des droits fondamentaux de la défense, j'ai été dans l'obligation de frapper la barre de la cour d'assises de l'interdit de plaider", précise-t-elle lundi. Aucun avocat en défense ou partie civile présent n'a plus alors le droit de plaider. "Des avocats muets lors d'une audience pénale, une méthode utilisée à quatre reprises durant ces dernières décennies" rapportent nos confrères d'Objectif Gard.

Le barreau de Corse-du-Sud détient le record d'interdits de barre prononcés en 2000, 2008, 2010 et la dernière fois à Ajaccio en 2021.

L'interdit élargi au Gard

La tension est encore montée d'un cran en milieu de semaine. Une soixantaine d'avocats a investi la salle d'audience des assises en soutien au bâtonnier. Après le refus réitéré de reporter le procès, Me Aoudia a décidé d'élargir l'interdit aux 400 avocats du Gard et à toutes les juridictions ( cour d'appel et tribunal judiciaire).

"C'est une mesure exceptionnelle car substantiellement, les juges sont les garants des droits et libertés fondamentaux. 

Exceptionnellement, des magistrats peuvent être amenés à violer ces droits fondamentaux de la défense ce qui a été le cas en l'espèce.

Me Khadija Aoudia

Bâtonnier de l'ordre des avocats de Nîmes

La composition de la cour et la décision prise ne doivent pas contaminer l'ensemble du corps judiciaire. Les chefs de cour ont toujours eu un comportement exemplaire", poursuit le bâtonnier, interrogé par France 3 Occitanie.

La décision d'interdit de barre a été soutenue par la conférence des bâtonniers car "un accusé devant une cour d'assises doit toujours pouvoir être défendu et son avocat doit toujours pouvoir prendre connaissance du dossier avant d'intervenir", souligne la conférence dans un communiqué.  "Toute personne en accusation doit être défendue dans un état de droit", renchérit Me Aoudia. "Cette atteinte très rare à l'état de droit ne doit pas jeter l'opprobre sur la famille judiciaire", conclut le bâtonnier de Nîmes

Peine maximale

Le principal accusé avait à l'audience reconnu les faits : "Je sais ce que j'ai fait, je sais que c'est mal. Je m'excuse auprès des victimes. 

Condamnez-moi à 20, 30 ans mais permettez que mon avocat plaide pour moi.

Principal accusé

A la cour

Devant le refus de renvoi il avait ajouté : "A ce stade coupez-moi la tête". Réponse du président : " Je ne peux pas".

Il a été condamné à  la peine la plus lourde : la réclusion criminelle à perpétuité assortie de sûreté des deux tiers. Bien au delà des réquisitions de l'avocat général qui avait demandé 20 ans.

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