Le procès de Catarina Castro et ses fils, Michaël et Jordan, accusés d'avoir assassiné le père de famille se poursuit ce vendredi 9 avril devant la cour d’assises du Gard avec l’audition des 3 accusés.
9h ce vendredi matin, l’audience reprend. Catarina s’avance à la barre. Tremblante, nerveuse. Elle demande au président de la cour d'assises si elle peut s’asseoir pour la suite de son audition qui a débuté jeudi.
L’audition reprend avec les questions des avocats des parties civiles. A toutes les questions que posent maître Darrigade, un des avocats de la partie civile, l’accusée répond qu’elle est la seule responsable.
J’ai dit que je prendrai tout sur moi, je ne veux pas que mes deux fils aillent en prison.
Droit au silence
Les questions à Catarina se poursuivent. "Je pense que vous n’avez pas porté les coups de couteaux. Avez-vous porté les coups de couteau ? demande maître El Bouroumi, l'avocate de la partie civile.
"Je ne m’en souviens pas", répond Catarina. "Et pourquoi avez-vous attendu le lendemain, la pause de midi, pour dire à votre fils que vous aviez tué votre compagnon ?" renchérit l'avocate.
A ce moment-là, l’avocate de Catarina, demande à sa cliente de faire valoir son droit au silence et de ne plus répondre aux questions. Pendant quelques minutes, l’avocate de la partie civile continue de poser des questions qui resteront donc... sans réponses.
«Une enfance normale, à part les coups»
C’est au tour de Michaël Castro, le fils aîné, d’être appelé à la barre pour être entendu et répondre aux questions du président et des avocats. Il commence son audition par parler de son enfance : "Jusqu’à l’âge de mes 12 ans tout allait bien dans ma vie, mon père me frappait mais ce qui me manquait le plus c’était de l’affection. On peut dire que j’ai eu une enfance normale à part les coups.".
Puis il enchaîne en parlant de sa relation avec son père : « Des moments avec mon père j’en ai eu beaucoup, des mauvais mais des bons aussi. Je faisais du moto cross avec lui. »
Sur la relation qu’entretiennent Catarina et Badre, Michaël Castro ajoute.
Vous savez pourquoi je n’ai jamais voulu partir loin de chez moi ? Parce que j’avais peur que mon frère m’appelle et qu’il me dise papa a tué maman.
C’est l’inverse qui s’est passé : "Le midi du 31 août 2015, ma mère m'annonce qu’elle a tué Badre. Je n’y croyais pas, mon père fait plus de 120 kilos, ma mère en fait à peine 50. Dans ma tête c’était impossible. Quand je réalise, je n’ai plus qu’un seul but, sauver ma mère. J’ai pris les deux pieds, ma mère et mon petit frère ont pris les bras. Au début, il ne rentrait pas dans le coffre, le corps était lourd, très lourd. Mais j’ai quand même chargé le corps dans le coffre, le bidon d’essence était déjà dans la Berlingot de ma mère. Puis arrivé au tunnel, j’ai allumé du papier et je l’ai jeté par terre. J’avais vidé le bidon d’essence sur mon père.".
Pour son avocat, maître Fahd Mihih, Michaël a agit pour sauver sa mère : "Il agit parce qu’il a entendu le cri de désespoir de sa mère. Il n’avait plus son père, il lui reste sa mère et ses deux frères et soeurs encore petits. Pour eux, il n’avait pas d’autres choix que d’aider sa mère."
Toujours au coeur des questions, les coups de couteau. Car Badre Fakir a été drogué avec du Zolpidem grâce à une boisson préparée pour l'occasion avant d'être étranglé et étouffé puis brûlé et abandonné dans un tunnel. Mais Badre a reçu des coups de couteau aussi. Qui en est le responsable ? "Cette famille attend une vérité, poursuit maître Darrigade, avocat de la partie civile, personne dans cette salle n’ignore que des coups de couteau ont été donnés. Nous, on veut savoir qui les a donnés.".
"Je ne sais pas", répond Michaël.
Avant de terminer, Michaël s'adresse à la famille de Badre, effondré, en larmes à la barre, il s'excuse et demande pardon.
"Vous ne pouvez pas comprendre ce qu'est la peur, la vraie peur"
Début d'après-midi, l'audience reprend. C'est au tour de Jordan de témoigner devant la cour d'assises. Pas facile pour le jeune homme d'une vingtaine d'années. Il s'excuse sans cesse. "Je suis désolé, je ne suis pas habitué à parler, je n'utilise pas les bons mots."
Décrit comme très discret et renfermé sur lui-même par les experts, il commence par dire quelques mots avant les questions du président de la cour, des avocats et des jurés : "La vie pour moi a été compliquée, il y a eu des violences, je n’aime pas parler, je me suis reclus, je n’ai pas participé à la vie de famille. C’est compliqué pour moi."
Très vite, les questions s'orientent sur les faits. "Ce soir là, je jouais en ligne, et ma mère est venu me taper sur l'épaule, en paniquant elle m’a dit j’ai fait une connerie, j’ai tué ton père, vient voir si il est encore vivant. J’ai mis ma main sur son coeur puis j'ai mis l’oreille, et je n’ai pas entendu son coeur. Il était mort. Après je suis reparti jouer. Ce n’est que le lendemain que l’on s’est débarrassé du corps," raconte Jordan à la barre.
Sur son rôle, il répond qu'il n'a fait qu'exécuter ce qu'on lui a demandé : transporter le corps. "Quand son corps a brûlé, j'ai regardé les flammes, comme pour dire adieu à mon père.".
D'autres questions des avocats de la partie civile vont se succéder : Comment vous allez vivre le mois qui va suivre la mort de votre père ? "Je vais être comme libéré, je ne vais pas vous mentir. C’est dur mais ça enlève un poids. La mort de mon père m’a soulagé. Pour la famille de mon père, c’est compliqué mais pour moi ça a été un soulagement."
Dernière question de la partie civile : "Quand vous entendez parler de projet criminel, de guet à pens, qu’est-ce que vous ressentez ?".
Après un long silence, Jordan finit par répondre : "vous ne pouvez pas comprendre la peur, la vraie peur."
Les trois accusés nient toujours le projet criminel.
Ils encourent tous les trois la réclusion criminelle à perpétuité pour l'assassinat de Badre Fakir, le père de famille. Verdict ce samedi.