Violences et déchirement familial seront au coeur du procès qui s'est ouvert ce mardi matin aux Assises du Gard à Nîmes. Catarina, Michaël et Jordan Castro sont dans le box des accusés pour l'assassinat de Badre Fakir, leur mari et père. Verdict vendredi, ils encourent la réclusion à perpétuité.
L'audience s'est ouverte par la description détaillée des faits et du drame qui se sont produits dans la nuit du 31 août au 1er septembre 2015 à Nîmes.
C'est un garde forestier qui a découvert le cadavre partiellement carbonisé, le lendemain matin, sous un pont ferroviaire situé sur les hauteurs de Nîmes, dans un tunnel, un endroit isolé.
Des actes atroces et d'une rare violence
Catarina Castro, l'ex compagne, a reconnu avoir étranglé Badre Fakir, après l'avoir drogué à son domicile. Les 2 fils, Michaël et Jordan Castro avouent avoir transporté le corps de leur père sous un pont et avoir mis le feu au cadavre dans un tunnel.
Selon les aveux de Catarina Castro, le soir des faits, dans la villa familiale à Milhaud, près de Nîmes, elle aurait préparé un cocktail à base de médicaments, de lait et de menthe pour endormir son compagnon qu'elle aurait ensuite étranglé alors qu'il dormait. La mère de famille affirmait rapidement qu'elle avait agi seule, évoquant des violences répétées de la part du père de ses 4 enfants, qu'elle avait connu dès l'âge de 14 ans.
L'autopsie évoque des coups de couteau, mais l'accusée a assuré pendant l'instruction ne pas se souvenir de l'avoir agressé à l'arme blanche.
Les 3 accusés comparaissent libres. Ils expliquent leur geste horrible par "la volonté de mettre fin à des années de violences physiques et psychologiques infligées par Badre Fakir". La victime avait 44 ans.
Badre Fakir, un escroc, alcoolique, drogué et violent menant une double vie ?
C'est l'enquêteur de personnalité qui ouvre les débats. Il revient sur le passé de Badre Fakir. Aîné de 7 enfants, il est né au Maroc et arrive en bas âge en France. Il effectue une scolarité médiocre et n'a aucune qualification... Il ne prendra jamais la nationalité française et ne reconnaîtra pas tous ses enfants pour recevoir les allocations de mère isolée.
Ce premier témoin dépeint la victime avec rigueur : "consommateur de drogue et d'alcool, violent, il multipliait les combines et les escroqueries pour subvenir à ses besoins, il menait aussi une double vie avec une autre femme".
Cette dernière, Lila, accuse également la victime de violences. Partie civile au procès, elle doit témoigner à la barre ce mardi.
L'homme est décrit comme "un caïd de cité" qui se "pliait en quatre" pour les siens, mais aussi un homme "violent" qui n'hésitait pas à extorquer et à se battre. Un père qui battait sa compagne.
Lila, maîtresse de Fakir, "je ne sais pas"
Précise dans sa déposition, Lila Boutarane, le dernière compagne de Fakir, est comme absente à la barre, ce mardi matin. Totalement dépassée...
Elle dit avoir été escroquée par lui. Elle l'employait dans son commerce mais "il ne travaillait pas beaucoup. Même pas 2 heures par jour!" Surtout, elle confirme les violences, principalement les 2 dernières années. "Il était agressif, malheureux et dépressif".
Il me frappait mais il regrettait à chaque fois (...) Il m'a pris de l'argent. (...) La première grossesse, j'ai avorté, pour le seconde, j'ai perdu l'enfant car il me battait.
Le médecin de famille des Castro se rétracte à la barre
L'homme qui témoigne est Eric Barrois, le médecin de famille des Castro pendant 20 ans. Il décrit Catarina comme une personnalité fragile s'occupant bien de ses enfants.
Badre Fakir le consultait peu, mais il a été suivi pour un burn out après un braquage. "Il était très poli, trop poli !".
Lors de son audition par la police, le médecin indiquait avoir constaté des traces de violences sur le visage de Catarina et il disait la trouver terrorisée. Mais ce mardi, devant la cour, l'homme se rétracte, il revient sur ses déclarations "de peur que ce soit des souvenirs induits".
Oui, il a constaté des traces de coups et de violence mais le médecin se refuse à les imputer à l'ex compagon Badre Fakir.
Un peu plus tard, la femme de Michaël Castro, l'un des 3 accusés, confirme avoir été témoin de violences envers Catarina et envers son mari Michaël.
9 avocats et plus de 40 témoins et experts
4 jours d'audience. Ce procès mobilise beaucoup de monde et entendra une quarantaine de personnes à la barre, témoins et experts.
La réclusion criminelle à perpétuité ?
Catarina Castro, aujourd'hui âgée de 49 ans et ses deux fils aînés Mickaël, 30 ans et Jordan, 24 ans, qui auraient transporté le corps avant de l'abandonner sous un pont, encourent la réclusion criminelle à perpétuité pour assassinat. Reste à savoir si la préméditation avancée par les enquêteurs sera retenue par les jurés.
Le procès va durer 4 jours, le verdict est attendu vendredi soir dans cette affaire comportant de nombreuses zones d'ombre, notamment sur la répartition des rôles entre la compagne et les deux fils pour éliminer la victime.
Découvrez le témoignage de Catarina Castro enregistré le 2 avril 2021, chez son avocate, par France 3 Occitanie, dans ce reportage de J.Paul et O.Brachard.