C'est le sésame tant attendu par la filière des éleveurs de canards et producteurs de foie gras. Les 2 vaccins expérimentés en France se sont avérés "très efficaces" pour prémunir des canards de la grippe aviaire, selon l'Anses et le ministère de l'Agriculture. Une campagne de vaccination pourrait intervenir dès cet automne en France.
Alors qu'un épisode inédit en cette période touche une fois de plus les éleveurs de canards dans le Gers et dans les Landres, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et le ministère de l'agriculture ont rendue publique l'expérimentation faite en France des 2 vaccins pour lutter contre l'épizootie d'influenza aviaire.
Expérimentation sur quelques miliers de canards
En mai 2022, une expérimentation a été lancée en France, autour de deux candidats vaccins élaborés par les laboratoires allemand Boehringer Ingelheim et le français Ceva Santé Animale basé à Libourne (Aquitaine).
Un test qui porte sur plusieurs miliers de canards, notamment la variété "mulard", principalement utilisée par les producteurs de foie gras.
Le virus circulant en France et dans le monde a été inoculé à une partie de ces canards, préalablement vaccinés, pour mesurer à quel point ils pouvaient faire sortir de leur organisme le virus. Le but bétait aussi de voir s'ils contaminaient ou pas le cheptel.
Les canards vaccinés ou pas ont été euthanasiés à l'issue de l'expérience.
2 vaccins avec des résultats "très similaires" qui ont "presque stoppé la transmission directe"
Les premiers résultats publiés par l'Anses sont très encourageants. Les 2 vaccins ont permis de stopper la transmission directe par contact et la transmission indirecte par les airs. Béatrice Grasland, responsable du laboratoire national de référence de l'Anses pour l'influenza aviaire a été interrogée par l'AFP. Quand les animaux ne sont pas vaccinés, "un animal inoculé infectait un autre animal toutes les deux heures.Au contraire, ceux qui ont reçu le vaccin n'ont pas contaminés les autres, même en contact direct, dans le même parc, avec les fientes infectées."
Et la chercheuse de rajouter : "C'est très efficace. Avec ces vaccins, normalement l'épidémie ne se déclenche pas".
Le laboratoire français Ceva, dont le vaccin est à ARN, a indiqué à nos confrères de l'AFP qu'il avait fait une demande d'autorisation de mise sur le marché auprès de l'Agence nationale du médicament vétérinaire. Il a aussi répondu à l'appel d'offres du ministère de l'Agriculture, qui a annoncé en avril une "pré-commande de 80 millions de doses".
Le laboratoire aquitain est l'un des leadres mondiaux en termes de vaccination animale. Après 2 ans de recxherches, il attend désoramais une commande ferme de l'Etat. Reportage France 3 Aquitaine Guillaume Decaix - Juliette Bisiaux.
Ceva Santé animale assure, que s'il est sélectionné par l'appel d'offre, tout sera mis en œuvre pour pouvoir assurer, dans les délais impartis, la production du vaccin à une aussi grande échelle.
Une profession à l'agonie
Face aux différents épisodes de grippe aviaire, plusieurs éleveurs ont jeté l'éponge. "Je ne pense pas qu’il y ait une profession aujourd’hui en France qui depuis 2 ans ne peux plus travailler. A qui on détruit son travail à chaque fois, assure Lionel Candelon de l'association Canards en colère. On se pose beaucoup de questions : faut il continuer ou arrêter ? Qu’est-ce qu’on fait de nos exploitations car nous avons des emprunts bancaires. Vivre tous les jours en se demandant quand un nouvel épisode de grippe aviaire va nous tomber dessus, c’est épouvantable."
La vaccination représente un espoir réel. Beaucoup d'éleveurs ne veulent plus remettre des canards dans leurs élevages tant qu'il ne sera pas sur le marché.
Jean-Luc Guerin est professeur en aviculture et pathologie aviaire à Toulouse et responsable de l’équipe de virologie de l’UMR INRAE-ENVT IHAP et de la chaire de biosécurité aviaire. "Un plan de vaccination est mis en œuvre et travaillé aujourd’hui pour mettre en place vaccination dès octobre. C’est un élément incontournable dans la palette des outils qui seront nécessaires pour la maîtrise de la pandémie. On ne va pas tout miser sur le vaccin seul. La vaccination doit être associée à un travail sur la biosécurité, la surveillance. On voit bien qu’aujourd’hui, l’intensité du risque est telle que le travail sans le vaccin va être très compliqué."
Plus de 20 millions de volailles ont été abattues en 2021-2022 en France et 250 000 dans le Gers depuis ce nouvel épisode survenu en avril 2023.