En Occitanie et plus largement en France, éleveurs de plein air comme associations de défense des animaux dénoncent la gestion de la grippe aviaire. Ils remettent en cause l'efficacité de la claustration des volailles notamment. Plusieurs mobilisations auront lieu ce jeudi 7 avril.
En France, de nombreuses voix s'élèvent contre la gestion de la grippe aviaire par le gouvernement. Le 5 novembre 2021, l'ensemble du territoire métropolitain a été placé en risque "élevé" par le ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation. Depuis, toutes les volailles sont en claustration, alors que les petits élevages de plein air avaient obtenu des dérogations jusqu'alors.
Des mesures de prévention que de nombreux syndicats et organisations jugent inadaptées et inefficaces. Huit d'entre eux, dont la Confédération paysanne et le Mouvement de défenses des exploitants familiaux (Modef), ont déposé trois recours auprès du Conseil d'Etat pour demander l'annulation des arrêtés généralisant la claustration sur tout le territoire. Mais l'institution publique a rejeté ces recours ce mardi 5 avril.
A l'échelle nationale, de nombreuses manifestations sont prévues dans les jours à venir. En Midi-Pyrénées, la Confédération paysanne de l'Ariège et du Gers appellent également à la mobilisation devant leurs préfectures respectives ce jeudi 7 avril. Pour eux, c'est "toute la production fermière traditionnelle de qualité qui disparaît".
Nouvelle vidéo choc publiée par L214
La Confédération paysanne de l'Ariège qualifie la généralisation de la claustration de "véritable scandale". "Ce confinement induit forcément un mal-être pour les volailles", déplore Angel Alegre, son porte-parole.
Dans l'Est de la France, les éleveurs sont contraints d'étouffer leurs animaux dans les bâtiments et de creuser des trous pour les enterrer.
Angel Alegre, porte-parole de la Confédération paysanne en Ariège
De fait, comme les services d'équarrissage n'arrivent pas à suivre, l'Etat demande aux éleveurs de ramasser et d'enfouir eux-mêmes les cadavres sur leurs fermes, voire de couper les systèmes de ventilation pour laisser mourir les animaux à éliminer.
Des faits que dénonce également L214. Ce 5 avril, l'association de défense des animaux a publié une vidéo attestant du gazage d'un élevage intensif de poulets en Vendée.
"Nous demandons l'annulation totale de la claustration pour le bien-être animal et pour maintenir la qualité que recherche le consommateur. Et que dire des éleveurs : comment peuvent-ils reprendre leur activité après un choc pareil ?", interroge Angel Alegre.
"La claustration est un échec"
D'autant que la claustration de tous les élevages de France se révèle inefficace, selon les associations et syndicats qui ont sollicité le Conseil d'Etat. D'après la Confédération paysanne, environ 15 millions de volailles ont été abattues en France depuis novembre 2021 (14 millions selon L214), contre 4,5 millions l'année précédente. "C'est bien la preuve que la claustration est un échec", souligne Sylvie Colas, porte-parole du syndicat dans le Gers.
De même, selon les chiffres du ministère de l'Agriculture, la France recensait 1160 foyers de contamination, soit trois fois plus qu'à la même période en 2021. "Cette politique de lutte a échoué face au risque d’introduction par la faune sauvage : tous les primo-foyers sont des élevages en claustration. Les ventilations dynamiques, les personnes, matériel ou animaux infectés ont fait entrer le virus dans les exploitations", peut-on lire dans un communiqué commun aux huit associations et organisations, publié ce samedi 6 avril.
Le modèle de la filière avicole à revoir
Toujours selon le ministère, la Vendée recense 510 foyers de contamination en élevage, contre 46 dans le Gers. "Comme par hasard, c'est le département où il y a le plus d'élevages intensifs qu'il y a le plus de cas de grippe aviaire", pointe Sylvie Colas. Car selon elle, c'est le "produire plus" auquel la filière avicole française est soumise depuis des années qui est à l'origine du problème.
"Cette année, on a demandé aux petits et moyens éleveurs, bio et de plein air, de confiner leurs animaux, alors qu'on sait très bien que ce sont les élevages industriels qui posent problème, abonde son homologue ariégeois. Et rien n'est fait pour désindustrialiser le secteur de la volaille."
Un avis que partagent les associations et organisations qui appellent à la mobilisation ce jeudi 7 avril. "Une forte segmentation des différentes étapes de production, une très forte concentration des élevages dans certaines régions, une importante densité animale par élevage et une génétique industrielle. Les effets de cette dérive productiviste explosent aujourd'hui", dit le communiqué commun.
"On est présentés comme des boucs émissaires"
Dans le Gers, les éleveurs de plein air se sentent comme des "boucs émissaires", désignés pour responsable de la propagation de la grippe aviaire. "Par cette décision du Conseil d'Etat, c'est le maintien de notre activité de plein air qui est remis en cause", regrette la porte-parole de la Confédération paysanne du département. "Ca va finir qu'on va arrêter l'élevage, poursuit Angel Alegre. Déjà, il n'y a plus beaucoup de jeunes qui veulent s'installer dans ces conditions-là."
Ce jeudi 7 avril, la Confédération agricole ariégeoise appelle à manifester devant la préfecture de Foix à 9 heures. Dans le Gers, le syndicat agricole sera reçu à Auch par le préfet à partir de 18 heures.