Chargé de la lutte contre la cabanisation dans une commune près de Toulouse, l'élu est pourtant condamné pour constructions illégales

Depuis plusieurs années, le maire de la commune de Seysses (Haute-Garonne) est confronté à la cabanisation, des constructions illégales. Quand le correspondant suppléant en charge de la charte de lutte contre ce phénomène est condamné pour des constructions sans permis, cela fait mouche.

Société
De la vie quotidienne aux grands enjeux, découvrez les sujets qui font la société locale, comme la justice, l’éducation, la santé et la famille.
France Télévisions utilise votre adresse e-mail afin de vous envoyer la newsletter "Société". Vous pouvez vous désinscrire à tout moment via le lien en bas de cette newsletter. Notre politique de confidentialité

Un phénomène de plus en plus courant. La cabanisation représente la construction sans permis d'habitations permanentes ou provisoires qui, une fois construites, sont difficiles à démanteler.

A Seysses, en Haute-Garonne (31), le maire Jérôme Bouteloup est confronté depuis plusieurs années à cette problématique dans la commune, où plus d'une cinquantaine de constructions illégales ont vu le jour, formant aujourd'hui un lotissement entier.

Un élu qui pratique la cabanisation qu'il est censé combattre

Pour lutter contre la cabanisation, le maire de Seysses a désigné Sébastien Chauderon comme correspondant suppléant en charge de la charte de lutte contre la cabanisation. Mais, il se trouve que ce dernier a été condamné en avril 2022 pour des constructions illégales sur le terrain mitoyen de ses voisins, Pierre et Suzanne Friscia : un garage avec appentis, des terrasses béton, un abri de jardin, une cabane pour chiens et un abri en bois au niveau du mur de clôture... Soit pour des faits qu'il est censé combattre à travers sa nomination à la mairie.

Faisant valoir un empiétement de leur propriété, le couple Friscia s'est tourné vers les services d'urbanisme et a déposé plainte. Le 4 juin 2015, ils ont, par acte d'huissier, fait assigner Sébastien Chauderon et Elisabeth Calas Bonnerie devant le tribunal d'instance de Muret (31), qui s'est déclaré incompétent en faveur du tribunal de grande instance de Toulouse.

Ce dernier a ordonné par jugement du 31 mai 2018 une expertise judiciaire pour obtenir tout élément permettant de déterminer "l'existence ou non d'un empiètement sur le fonds des demandeurs". Rapport déposé par l'expert le 12 février 2020.

Parmi les demandes des Friscia au tribunal : condamner S. Chauderon et E. Calas Bonnerie à procéder à la démolition ou à l'éloignement à une distance minimale de trois mètres de toute construction prenant appui sur leur clôture et à payer une somme de 46 000 euros en réparation des préjudices moral, économique et matériel subis.

De l'autre côté, le couple demande à ce que les Friscia paient 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral.

Le tribunal rend son jugement en avril 2022

Suite aux questionnements d'habitants et membres de l'opposition municipale, le tribunal a tranché et donné son jugement le 7 avril 2022 : la propriété du mur-clôture, objet du litige, est la propriété exclusive des Friscia. L'instance ordonne ainsi "la démolition de la niche à chiens ainsi que de tous les ouvrages prenant appui sur ce mur-clôture, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du premier jour du quatrième mois suivant la signification de la présente décision".

Les consorts Chauderon et Calas Bonnerie sont également condamnés à payer la somme de 7 464 euros aux Friscia au titre du préjudice matériel, ainsi que 4 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, qui oblige la partie perdante, au profit de l'autre, à une somme d'argent destinée à couvrir l'ensemble des frais non compris dans les dépens.

Le maire de Seysses averti à plusieurs reprises

Un mois après le jugement, dans une lettre adressée au maire de Seysses, l'avocate des Friscia, Vanessa Brunet-Ducot, rappelle que "la réalisation de travaux en méconnaissance des autorisations constitue une infraction pénale punie d'une amende comprise entre 1 200 et 6 000 euros par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable. En cas de récidive, un emprisonnement de six mois peut être prononcé. Lorsque le Maire a connaissance d’une infraction, il est dans l’obligation de dresser un procès-verbal d’infraction. Par conséquent je vous remercie de dresser un procès-verbal d’infraction et le transmettre immédiatement au procureur de la République".

Gilles Duret, conseiller municipal à l'opposition de la mairie de Seysses, affirme que de nombreux signalements ont été rapportés au maire, "qui n'a rien fait alors qu'il avait tout l'arsenal juridique nécessaire pour bloquer une construction".

L'élu a contacté la sous-préfète de Muret, Cécile Lenglet, qui leur a répondu par courrier le 22 août dernier : "D'un point de vue réglementaire, ces désignations, qui ont été acceptées par délibération du conseil municipal de Seysses, ne peuvent pas être remises en cause. En effet, à ce stade, aucun des deux élus n'a été condamné à un peine d'inéligibilité", une peine prononcée par un tribunal interdisant la possibilité d'être élu.

Quatre mois plus tard, nouveau constat effectué

Le 12 septembre dernier, un procès verbal de constat a ainsi été effectué par Maîtres Joël Bontaz et Arnaud Phalip, huissiers de justice, à la requête des Friscia, afin de dresser des constations complémentaires au précédent procès verbal de constat effectué par le ministère le 24 novembre 2021.

Le constat indique : "Entre la propriété de nos requérants et celle de Monsieur Chauderon et de Madame Calas-Bonnery, nous constatons la présence d'une clôture consistant en un muret maçonné surmonté d'un grillage. Il nous est indiqué par nos requérants que cette clôture est implantée sur leur fonds et leur appartient."

Le maire de Seysses invoque des erreurs

Malgré le jugement rendu, le maire de la commune de Seysses, Jérôme Bouteloup, invoque des erreurs de relevés topographiques par les géomètres : "Sébastien Chauderon est en procès contre eux car à cause de ces relevés, il a été obligé de détruire ses constructions", indique-t-il. Relancé à plusieurs reprises pour un entretien téléphonique prolongé, il n'a pas donné suite à nos sollicitations.

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Veuillez choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité
Je veux en savoir plus sur
le sujet
Veuillez choisir une région
en region
Veuillez choisir une région
sélectionner une région ou un sujet pour confirmer
Toute l'information