A Toulouse, la clinique spatiale étudie l'effet de l'apesanteur sur les femmes pour les futurs vols habités

Pour combler l’absence de données scientifiques sur les femmes, l’Institut de Médecine et Physiologies Spatiales de Toulouse s'est vu confier une étude sur les effets des vols spatiaux sur les astronautes féminines. Une première en Europe.

A la fin de l'année 2021, le MEDES (l'institut de Médecine et Physiologies Spatiales de Toulouse) a accueilli 18 femmes âgées de 20 à 40 ans pour une étude insolite dite "d'immersion sèche". Des volontaires en parfaite santé ont dû rester allongées dans des baignoires remplie d'eau pour recréer la sensation d'apesanteur. Le but était de calculer certains effets des vols spatiaux sur le corps humain et plus particulièrement sur les femmes. Une demande de l'Agence Spatiale Européenne pour combler l’absence de données scientifiques sur un public féminin.

Si les données finales ne sont pas encore connues, cette étude a déjà permis de relever quelques effets notables sur le corps de ces volontaires. 

Changement dans la quantité de muscles, dans le volume sanguin

Placées dans des bassins et recouvertes d’un tissu imperméable pour les garder au sec, les volontaires ont ainsi passé cinq jours et cinq nuits complètement alitées.

Une position inconfortable qui permet de recréer ce que vivent les astronautes dans la Station Spatiale Internationale. La tête légèrement plus basse que le reste du corps, les "cobayes" ont très vite ressenti les effets de l’apesanteur sur leurs systèmes sensori-moteur, cardiovasculaire et oculaire.  

On s'aperçoit que l'apesanteur a des effets sur la quantité de muscles donc la capacité à l'exercice physique et sur le volume sanguin. Pour comparer avec la même étude menée chez les hommes, on remarque que les femmes ont une perte de volume plasmatique (eau dans le sang) plus importante.

Rebecca Billette, responsable médicale de l'étude

Les volontaires (étudiantes, journalistes, ingénieurs et infirmières) se sont pliées à des protocoles journaliers rythmés par des mesures scientifiques (prise de tension, rythme cardiaque, test ophtalmique, test d'équilibre...) De la toilette aux repas en passant par les besoins naturels, elles ont dû rester alitées pour ne pas fausser les données. Une contrainte bien vécue par Tania, 24 ans, ingénieure système chez Thalès Alenia Space :

C'était marrant de ressentir ce que les astronautes vivent là-haut ! C'est spécial. Au début c'est très agréable, mais après on a vite mal au dos.

Tania, volontaire de l'expérience

Hormis ce mal de dos, la jeune femme a aussi ressenti quelques changements physiques sur son corps : un essoufflement plus important, une vision moins nette et des problèmes d'équilibre. 

Passionnée par la conquête spatiale, Tania a souhaité participer à l'étude pour "se rendre utile" et "donner son corps à la science" afin de renforcer les données scientifiques sur les femmes. Car seules 11% des astronautes féminines ont participé à des vols habités.

Absence de données sur les femmes

Les données scientifiques sur les femmes sont trop faibles. Les deux-tiers des astronautes sont des hommes, la Nasa a donc décidé d'accélérer le recueil de données chez les femmes. Selon le MEDES, les résultats de ce type de recherche profitent non seulement aux astronautes pour étudier les effets néfastes des vols spatiaux sur l’organisme et trouver des moyens de prévention adaptés, mais ils sont aussi bénéfiques pour les patients sur Terre atteints de troubles similaires. 

Dans ce domaine de recherche, il n’y a presque aucune connaissance sur les effets physiologiques et psychologiques sur les femmes. Une étude d’immersion sèche portant exclusivement sur des femmes s’ajoutera aux études précédentes portant sur des hommes, menées en Europe et en Russie

Angélique Van Ombergen, responsable des sciences de la vie à l’ESA

Pour plus de parité dans l'espace

Selon Rebecca Billette, médecin responsable de l'étude : "la Nasa souhaite désormais la parité dans les vols habités. Les dernières études montrent que ça se passe mieux quand l'équipage est constitué d'hommes et de femmes. Il est donc nécessaire de multiplier ces données pour les prochains vols."

D'autres études en projet

Les données de l'étude ont été envoyées à l'ESAT, elles sont en train d'être décortiquées par des équipes de scientifiques du monde entier. En attendant leurs conclusions, la clinique spatiale de Toulouse travaille déjà sur d'autres études et recherche des volontaires pour tester notamment les effets de la centrifugation sur le corps humain.

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