Deuxième jour de procès devant la cour d'assises de la Haute-Garonne. Benjamin P, 38 ans, doit y répondre de la tentative d'homicide sur son psychanalyste en 2018 à Toulouse. Ce mardi, la personnalité de l'accusé a été décortiquée pour tenter de comprendre son passage à l'acte.
Le regard lointain, les épaules rentrées, dans son jogging crème Benjamin P. a bien du mal à s’exprimer. Il bredouille. Il hésite. Il est quasi-inaudible.
Pourtant la cour d’Assises de la Haute-Garonne aurait beaucoup de questions à lui poser. La principale d’entre elles : qu’est-ce qui l’a poussé en ce mois de juin 2018 à frapper violemment son psychanalyste et lui asséner un ou des coups de couteau, avant de le laisser pour mort devant la porte de son cabinet à Toulouse ?
Un basculement dans des troubles psychotiques
Ce mardi après-midi, plusieurs experts se sont succédés à la barre pour tenter de faire la lumière sur la personnalité et la santé mentale de l’accusé.
« Angoisses grandissantes », « forte dépression », « délires paranoïaques », « état psychotique », « perte de contact avec la réalité » : voilà les termes qui ressortent des expertises psychiatriques et enquêtes de personnalité réalisées auprès de Benjamin P.
Mais l’homme de 38 ans n’a pas toujours présenté ces symptômes.
D'après les rapports d’experts, Benjamin P. bascule en 2011, lorsqu’il démarre sa psychanalyse, parallèlement à des études de psychologie. Études qu'il avait décidé de mener à la suite du décès de son père.
Je ne le reconnaissais plus, il restait dans sa chambre, il se renfermait petit à petit sur lui même.
Benjamin P. nourrit une passion dévorante pour la psychologie et la psychanalyse. De plus en plus dévorante. Une passion qui va virer à la fascination et même à l'obsession d'après les experts.
A tel point qu'il ne va pas supporter son échec d'entrée en Master 2 de psychologie. Premier refus en 2014. Puis il postule à nouveau en 2015, 2016, 2017 et essuie à nouveau des échecs.
Durant ces années, l'accusé s'enfonce dans la paranoïa et les troubles délirants.
"Il avait une importante altération du discernement et de son contrôle des actes mais pas d'abolition" a expliqué ce mardi l'expert psychiatre face à la cour.
En clair, Benjamin P. présente des troubles graves mais il est responsable de ces actes.
Pendant cette période noire, il continue de consulter plusieurs fois par semaine son psychanalyste, sa future victime. Il présente aussi à l'égard de ces professeurs de psychologie des comportements "hors cadre".
"Il voulait des explications sur son échec, il l'a vécu comme une injustice. Il avait un désir de vengeance et pensait que son psychanalyste était de mèche avec ses professeurs" a souligné l'expert psychiatre.
Risque de récidive
Après 5 années d'analyses et plus de 500 consultations, Benjamin se rend au cabinet de son ancien psychanalyste. Quand la porte s'ouvre, il le frappe violemment à coups de poings puis à coups de pieds et enfin il donne au moins un coup de couteau au psychanalyste tombé à terre. Seuls les cris d'une femme, témoin de la scène dans la salle d'attente, le fera arrêter. Il replie alors son couteau et part sans rien dire.
Deux ans plus tard, " il est toujours dans le même système de pensées. Il livre les mêmes explications sur les faits. Sans obligation de soins, il y a un risque de répétition ", ont conclu les différents rapports.
L'accusé risque la réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict est attendu mercredi.