"C'est pire que tout" : 12 départements d'Occitanie s'attaquent à la Loi immigration du gouvernement

Sur les 13 départements qui composent la région Occitanie, 12 ont clairement affiché leur opposition à la loi immigration. Entre "une mesure cynique", ou un moyen de "s'acoquiner avec le RN", les Présidents de Départements de gauche se rebellent ouvertement. Seul l'Aveyron n'a pas haussé le ton.

L'Occitanie serait-elle une terre de rébellion ? Sur les 32 départements français qui ont officiellement affiché leur opposition à la loi immigration, 12 sont en ex-Midi Pyrénées ou Languedoc-Roussillon. 

Le tout premier à avoir pris la parole, et lancé le "mouvement", c'est Serge Rigal, président du Conseil départemental du Lot. Dans un communiqué, publié mercredi 20 décembre, il assure que son département n'appliquera pas "la préférence nationale" dans le cas du versement des APA (allocations personalisées d'autonomie), spécifié dans l'article 19 de la loi.

Le membre du parti radical de gauche ne s'attendait pas à un tel écho : "Ce n'était pas calculé, c'est un cri du coeur, le cri de la colère. Nos deux députés du Lot ont voté pour cette loi, et cela ne nous honore pas. Ils n'ont pas réfléchi aux conséquences. On ne peut pas s'étonner que la société aille mal si des élus de la République votent des lois comme ça."

Une allocation "universelle" dans le Lot

Face au durcicement des conditions pour percevoir l'APA (il faudra désormais 5 ans de résidence ou 30 mois de cotisation), le président du Département entend mettre en place un fonds pour "une nouvelle allocation d'autonomie universelle."

Il poursuit : " On parle quand même de nos aînés. Personne n'est fier de toucher l'APA. Personne ne vient en France ou dans le Lot pour l'APA. C'est simplement une question de solidarité. Même si on aide qu'une seule personne, je serais fier de mettre en place cette aide dans le Lot, parce que cette loi, c'est pire que tout."

Par sa prise de parole, Serge Rigal a ouvert la brèche, dans laquelle se sont depuis engoufrés 31 autres départments. En Occitanie, seul l'Aveyron, étiqueté à droite, n'a pas suivi. Bertrand Cavalerie, socialiste et membre de l'opposition au Conseil Départemental a d'ailleurs fait parvenir une lettre ouverte à Arnaud Viala, son président.

On peut y lire : "Au nom des valeurs que nous partageons par-delà nos différences politiques, et en fidélité à l’histoire de l’Aveyron qui a toujours mis la solidarité au cœur de ses priorités, je vous invite, Monsieur le Président, à refuser d’appliquer la préférence nationale concernant l’attribution de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA)."

L'espoir du Conseil Constitutionnel

Sébastien Vincini, président du Conseil Départemental de Haute-Garonne confie voir une loi " cynique, injuste, qui rompt le principe d'égalité des droits. L'APA ce n'est pas une allocation comme une autre. C'est sur avis médical, c'est très sérieux." Pour lui le gouvernement se trompe de combat : "Est-ce que vous voyez des hordes d'immigrés qui ont Alzeihmer venir frapper aux portes des Ehpad ? Non ça n'existe pas. On est dans l'amalgame complet."

Lorsqu'on lui demande s'il a échangé avec Monique Iborra, députée Renaissance de Haute-Garonne, il répond par la négative, mais est persuadé "qu'elle n'a pas vu qu'il y avait cette histoire d'APA dans la loi. Les députés Renaissance ont voté le doigt sur la couture, par reflexe partisan.

En revanche, le Président de Haute-Garonne, où l'on compte 33.000 bénéficiaires des APA (français et étrangers compris), est en contact avec ses homologues de la région. "On a un groupe WhatsApp très actif, on échange beaucoup sur ce sujet. Notre action, c'est une mise en garde pour le gouvernement." 

Sébastien Vincini précise : "Je compte sur le Conseil constitutionnel pour censurer les dispositions qui brisent le principe d’égalité."

La censure de certaines mesures par le Conseil Constitutionnel, c'est aussi l'espoir de Christophe Ramond. "Ce sera une étape importante, pour rappeler ce qu'est la France. Je fais confiance au Conseil", assure le président du Département du Tarn.

Cette loi c'est tout ce que l'on déteste, c'est un naufrage idéologique.

Christophe Ramond, Président du Département du Tarn

A l'autre bout du téléphone, le ton du socialiste tarnais est empreint de colère. "Avec cette loi, on est en train d'ouvrir une brèche, où des partis de gouvernement s'acoquinent avec le RN. Cette loi c'est tout ce que l'on déteste, c'est un naufrage idéologique."

Christophe Ramond de conclure : "Quand on voit que le Président de la République lui même n'apprécie pas certaines mesures (par exemple la caution demandée aux étudiants étrangers, ndlr), on ne peut que s'interroger. Ce n'est pas normal de faire une loi et de se dire que le Conseil Constitutionnel corrigera les erreurs." 

Comme son homologue du Lot Serge Rigal, Christophe Ramond ne ferme pas la porte à un éventuel fonds pour pallier à la perte de l'APA pour certains foyers du Tarn.

Même à contre-coeur, tous les présidents de Département que nous avons interrogé confirment qu'ils appliqueront la loi malgré tout : "J'ai des valeurs républicaines et j'y tiens", conclut Serge Rigal.

Le Conseil Constitutionnel a été saisi, à la fois par la gauche et par la majorité présidentielle. Aucune date d'examen de la loi immigration n'a encore été officialisée.

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