Suite à la décision de l'OMS lundi de suspendre les essais cliniques de l'hydroxychloroquine sur les patients Covid-19, l'hôpital de Toulouse a arrêté l'administration du Plaquenil aux malades hospitalisés dans le cadre de l'étude européenne "Discovery".
Depuis le 28 mars dernier, le CHU de Toulouse participe à l'étude européenne Discovery qui teste plusieurs traitements contre le coronavirus dont l'hydroxychloroquine.
Suite à une étude internationale publiée vendredi ne prouvant pas son efficacité et aux alertes lancées par l'OMS lundi, l'hôpital de Toulouse n'administre plus de Plaquenil aux patients covid-19 hospitalisés.
Trop de risques
"Depuis 3 mois, le corpus de connaissances s'accumule sur le coronavirus. L'hydroxychloroquine a été utilisée sur des patients avec des symptômes de gravité du covid dans les milieux hospitaliers, explique le professeur Guillaume Martin-Blondel, infectiologue au CHU de Toulouse et impliqué dans la recherche des essais cliniques sur le Covid.Aujourd'hui ces essais permettent d'émettre un signal d'alerte en terme de tolérance de ce médicament pour les patients, notamment lorsqu'il est associé à l'Azithromycine. Les études montrent la survenue de troubles du rythme cardiaque voire des arrêts cardiaques".
Du coup au regard de ses effets indésirables, on est dans une situation où pour le moment, sur des patients gravement atteints et hospitalisés, le bénéfice n'est pas prouvé. Dans ce contexte, l'hydroxychloroquine ne sera plus proposée aux patients hospitalisés hors essais cliniques, poursuit l'infectiologue.
Etude sur 9 000 patients
Cette décision de suspendre l'administration de la chloroquine en milieu hospitalier fait suite à la publication d'une étude dans la revue médicale The Lancet jugeant inefficace voire néfaste le recours à la chloroquine ou à ses dérivés comme l'hydroxychloroquine contre le Covid-19.Cette étude porte sur un total de plus de 90 000 patients hospitalisés dans le monde entier dont 9 000 ayant reçu ce traitement contre le paludisme associé ou non à l'Azithromycine.
Le professeur Guillaume Martin-Blondel mesure tout de même ces propos.
"Pour l'instant nous n'avons pas encore de résultats d'essais cliniques randomisés sur la chloroquine, qui sont les études les plus robustes scientifiquement. L'étude Lancet est une étude observationnelle.
Mais sa méthodologie est précise et claire, suffisamment en tout cas pour ne pas prendre de risque. Il faut attendre avant d'administrer de la chloroquine aux patients atteints du Covid-19 avec des symptômes de gravité", nous précise-t-il.
Niveau de preuve trop faible
Il y a en effet eu un emballement très important sur des données virologiques de l'équipe de Marseille du professeur Raoult sur le traitement du Covid par le Plaquenil mais le niveau de preuve était faible, selon de nombreux scientifiques.Mais le professeur marseillais conteste la valeur de l'étude publiée par la revue Lancet et défend toujours son traitement.
Article de Tang et al, suppression de données favorables à l'hydroxychloroquine : pourquoi cette discordance entre la version preprint et la version publiée dans le journal BMJ ?
— Didier Raoult (@raoult_didier) May 26, 2020
Exemple en image :https://t.co/52VYir8T9g pic.twitter.com/NuAYqRWO0X
Nous n'avons actuellement aucune donnée qui nous permette de conseiller l'utilisation ou pas d'hydroxychloroquine sur des patients non hospitalisés, précise le professeur Guillaume Martin-Blondel. Chez les patients hospitalisés, une chose est sûre, le rapport bénéfice-risque est dans l'ensemble défavorable.
Au total le CHU de Toulouse a accueilli plusieurs centaines de patients atteints du Covid-19. Une trentaine a reçu de l'hydroxychloroquine pendant son séjour dans le cadre d'essais cliniques. Certains résultats sont encore attendus.
Ce mardi le Haut conseil de la Santé publique a enfoncé le clou. Il recommande de ne pas utiliser l'hydroxychloroquine dans le traitement du Covid-19 hors essais cliniques.
Et dans les essais cliniques randomisés, en cours et à venir, il faut réevaluer le rapport bénéfice-risque dans l'attente des résultats. Un véritable stop à ce traitement.
La poursuite des autres essais en cours utilisant l'hydroxychloroquine est donc en cours de discussion.