Le bon bilan des entreprises de la Haute-Garonne en 2020, observé par le tribunal de commerce de Toulouse, ne constituerait que le calme avant une tempête de licenciements pour nombre d'entreprises sous perfusion d'aides publiques accordées en raison de la crise sanitaire.
Une baisse spectaculaire de 56% du nombre de redressements judiciaires en Haure-Garonne en 2020 par rapport à l'année précédente, une chute de 35% des liquidations judiciaires par rapport à 2019, un effondrement de 42% des procédures collectives (qui placent les entreprises en difficulté sous contrôle judiciaire pour payer leur créances), tels sont les excellents chiffres dévoilés par le tribunal de commerce de Toulouse lors de sa récente rentrée solennelle.
Un bilan en trompe l'oeil
Mais ce bilan de santé de l'économie de la Haute-Garonne constitue un trompe l'oeil. Nombre d'entreprises ne sauvent les meubles que grâce aux aides publiques accordées pour faire face à la crise sanitaire. "L'Etat a fait des efforts d'une grande ampleur pour soutenir l'économie. La Région, le département, la ville, l'URSSAF et la Banque de France ont suivi", explique le président du tribunal de commerce de Toulouse Laurent Granel. Tout cela a convergé pour que les entreprises ne sombrent pas. Mais elles bénéficient d'un ballon d'oxygène. Elles sont sous respirateur artificiel. Il faut faire attention le jour où on va débrancher, parce que ces aides ne sont pas éternelles".
Le calme avant la tempête
Pour Laurent Granel, l'économie de la Haute-garonne connaît donc une période de "calme avant la tempête". "A un moment donné, il va falloir rembourser les Prêts garantis par l'Etat (PGE) et payer les charges pour lesquelles des moratoires ont été accordés. Ça risque de faire mal. D'autant que beaucoup d'entreprises ont fermé et n'ont pas généré de trésorerie pendant cette période. Or, la trésorerie perdue ne se rattrape pas".
Le président du tribunal de commerce de Toulouse ne s'estime pas "pessimiste", mais "réaliste". Laurent Granel prévoit de grosses difficultés dans la construction, la réparation automobile et l'hôtellerie-restauration. Ces branches devraient, selon lui, être les plus touchées, avec les sous-traitants aéronautiques. "C'est un secteur qui connaît une crise d'une telle ampleur qu'il y aura forcément des regroupements", pronostique-t-il. "Ceux qui restent isolés risquent d'avoir du mal à faire face".
Les Prud'hommes s'attendent eux aussi à "une très importante vague de licenciements"
Son collègue qui préside la juridiction des Prud'hommes de Toulouse ressent les mêmes craintes. "Pour l'heure, indique Bernard Cazabou, nous ne ressentons que très peu d'incidences sur les licenciements économiques. Mais dès que la mise sous perfusion de l'Etat va cesser, nous nous attendons à une très importante vague de licenciements, notamment dans le secteur aéronautique. Ça va commencer au tribunal de commerce et nous nous attendons à récupérer beaucoup de dossiers". En attendant, les Prud'hommes tentent de résorber l'important stock d'affaires à traiter engendré par cinq mois d'inactivités en 2020 en raison de la grève des avocats suivie du premier confinement.