Les deux plus gros producteurs de foie, Euralis et Maïsadour, souhaitent former une seule et même entreprise. L'Autorité de la Concurrence craint une "atteinte à la concurrence" et ouvre une enquête approfondie.
L'Autorité de la Concurrence lance mercredi 14 décembre une enquête approfondie dans le cadre du projet de création d'une entreprise commune par les deux producteurs de foie, Euralis et Maïsadour.
Au cours d'une première phase d'examen, l'autorité indépendante a considéré qu'il existait un "doute sérieux d'atteinte à la concurrence". En effet, les deux groupes occupent une grande place dans les rayons de supermarché. Maïsadour possède notamment les marques Delpeyrat et Comtesse du Barry, Euralis les marques Rougié et Montfort. A eux deux, les deux groupes représentent 50% de la production de foie gras. «Ce renforcement entraînerait un risque d'augmentation des tarifs de plusieurs produits proposés, de même qu'un risque de diminution de la qualité et de la diversité des produits proposés», a également indiqué l'administration.
Une fusion "mauvaise pour le bien-être de la société"
L'Agence de la Concurrence craint que le rapprochement de ces deux entreprises les place en situation de monopole, c'est-à-dire une situation où elles seules seraient maître sur le marché. Cette position est la bête noire des économistes, comme l'explique Emmanuelle Auriol, professeur d'économie à Toulouse School of Economics.
Un monopole a la capacité d'augmenter les prix à un niveau non souhaitable socialement.
Emmanuelle Auriol, professeur d'économie
L'entreprise est seule ou quasiment seule sur le marché, elle peut donc fixer son prix librement. Mais une augmentation des prix aurait des conséquences sur les échanges. "Si les prix augmentent, les gens achèteront moins. Les entreprises produiront devront donc produire moins. Mais produire moins, ça se traduit par moins d'emploi, moins de taxes payées. Au final, le bien-être de la société diminue".
Une filière en péril
La filière du canard gras est toutefois menacée. Avec les épisodes de grippe aviaire à répétition, la production de foie gras s'effondre. Le comité interprofessionnel estime qu'en 2022, cette baisse est estimée entre 30 et 35 %. "C'est aussi pour ça qu'il est intéressant pour les deux entreprises de fusionner. L'Autorité de la concurrence le sait. Pour qu'elles puissent survivre, tout en respectant les règles du marché, l'autorité peut être amenée à leur demander de se séparer d'une de leur branche".
Depuis le dernier épisode, plus de 20 millions de volatiles ont été abattus en France, dont près de quatre millions de canards destinés à la production de foie gras. Les prix seront donc plus élevés pour les fêtes de fin d'année, par rapport à l'année dernière.