Claude Raynal, sénateur socialiste de Haute-Garonne et président de la commission des finances au Sénat, a demandé vendredi 14 avril les documents relatifs à l'utilisation de l'enveloppe attribuée au Fonds Marianne contre le séparatisme, sur l'utilisation suspectes de ces subventions allouées.
Le Ministère de l'Intérieur n'a que quelques jours pour répondre à sa demande. Vendredi dernier, le sénateur socialiste de la Haute-Garonne Claude Raynal, qui occupe également le poste de président de la commission des finances au Sénat, a demandé dans un courrier adressé au ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et à la secrétaire d’État chargée de la Citoyenneté Sonia Backès, un accès à l'ensemble des documents concernant le Fonds Marianne. "Dans les prérogatives des présidents de commission de finances et des rapporteurs généraux au Sénat et à l'Assemblée, on a la possibilité d'obtenir immédiatement sur simple demande tout document relatif à une utilisation de fonds publics", indique Claude Raynal.
Gestion opaque de subventions
A l'heure actuelle, c'est la gestion opaque, révélée par une enquête conjointe de Marianne et de France 2, du Fonds Marianne contre le séparatisme créé en 2021 après l'assassinat de Samuel Paty par Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté à l'époque, qui pose question. Voici cette enquête menée par l'Oeil du 20 heures.
Selon cette enquête, puis des révélations de Médiapart, l'enveloppe attribuée, de plus de 2 millions d'euros, aurait en partie bénéficié à deux associations en particulier. L'une d'elle, l'Union des sociétés d'éducation physique et de préparation au service militaire (USEPPM) aurait utilisé ces subventions pour son site internet et salarier deux personnes. L'autre, " Reconstruire le commun", aurait diffusé des vidéos dénigrant des opposants à Emmanuel Macron, parmi lesquels Anne Hidalgo, lors des campagnes présidentielle et législative.
Selon Médiapart, ces structures ont une proximité avec le mouvement politique, le Printemps Républicain. Plusieurs de leurs membres ont collectivement cosigné une tribune dans Marianne, le 24 mars 2022, pour remettre leur conception de la laïcité au cœur de la campagne présidentielle. Selon le site internet d'informations "l’autre initiateur de cette tribune était l’ancien socialiste Pierre Juston, lui aussi très proche du mouvement présidé par Amine El Khatmi."
Ce doctorant de l'université Toulouse 1 Capitole, ancien candidat de la liste Archipel Citoyen aux dernières élections municipales toulousaine et rédacteur pour le magazine Franc-Tireur, est spécialisé sur les questions de laïcité. Sollicité par France 3 Occitanie, il a indiqué ne pas être disponible pour répondre à nos questions.
"Un élément moral" important
"Le rôle des parlementaires est de lever ces suspicions. Soit pour la transformer en problématique réelle, soit pour dire que "les fonds ont été utilisés de façon normale" déclare Claude Raynal, qui assure que la demande "est traditionnelle." "Nous faisons régulièrement des demandes, notamment au ministère de l'Economie et des Finances, pour obtenir des détails d'utilisation de tel ou tel fonds", explique-t-il.
Financièrement, "le Fonds Marianne ne pèse pas énormément par rapport à ce que nous voyons à la Commission de finances" continue le sénateur, qui souligne toutefois "un élément moral" important. "Il touche à un sujet très important après l'assassinat de M. Paty."
Selon le JDD, ce sont "les 47 dossiers "ayant répondu aux critères d’éligibilité" du fonds Marianne" ou encore "des copies de notification d’attribution des subventions accordées aux projets qui ont été retenus" et "la composition, le compte rendu et le relevé de conclusions du ou des comités de sélection du CIPDR [comité interministériel de prévention et de la délinquance et de la radicalisation]" qui ont été demandés.
L'examen des documents pourra prendre "quelques jours" en fonction de leur nombre. Concrètement, "on va regarder si les associations qui ont été attributaires ont pignon sur rue, ce qu'elles font, comment l'Etat a contrôlé l'utilisation des fonds", développe Claude Raynal. "Je vais les lire, regarder effectivement si le bruit, l'idée de suspicion de fraude est avérée ou pas selon moi. Si cela n'est pas avéré, fin de l'histoire en ce qui me concerne, mais si je considère qu'il y a des éléments qui prêtent à confusion, ou à demander des explications complémentaires, je transmettrai des éléments généraux vers le président du Sénat pour qu'il prenne une décision, favorable ou défavorable, à la création de la commission d'enquête."
Une réponse avant le 19 avril
Parallèlement, Me Virginie Le Roy, avocate de la famille de Samuel Paty, souhaite que des enquêtes judiciaires et parlementaires soient ouvertes pour "faire la lumière sur des faits très graves", concernant l’utilisation de ce fonds créé après la mort du professeur assassiné en octobre 2020.
Les députés RN ont demandé ce jeudi 13 avril la création d’une commission d’enquête parlementaire. Selon le JDD, le groupe socialiste au Sénat, emmené par Patrick Kanner, a également réclamé la création d’une commission d’enquête flash.
Le Ministère de l'Intérieur a jusqu'au mercredi 19 avril pour fournir les documents demandés. "Si nous n'avons pas les documents, ce qui est rarissime, il m'est possible de me rendre au ministère pour demander l'ensemble des documents en consultation directement sur place", indique Claude Raynal.