L'avocate toulousaine France Charruyer vient de déposer deux recours contre le pass sanitaire devant le Conseil d'Etat, au nom de l'association Data Ring. Elle lui demande de se prononcer sur sa légalité.
Au nom de l'association Data Ring dont elle est la présidente, l'avocate toulousaine France Charruyer, spécialiste en droit du numérique, vient de déposer deux recours contre le pass sanitaire devant le Conseil d'Etat. Un premier en référé, le second sur le fond.
Elle lui demande de se prononcer sur la légalité du pass sanitaire au regard, notamment, des droits fondamentaux des citoyens.
Une association qui défend la protection des données
Forte d'une cinquantaine d'adhérents, avocats, chefs d'entreprises ou ingénieurs en cybersécurité, l'association Data Ring se veut surtout un think tank sur le numérique, ses usages et la protection de ses usagers avec l'objectif de promouvoir des hauts standards de protection des données. Et c'est au nom de cette sensibilité qu'elle s'interroge sur la légalité du pass sanitaire, explique sa présidente.
Nous ne sommes pas dans une démarche politique, pas davantage dans une démarche militante. Nous nous sommes inquiétés de la démesure et de la disproportion du pass sanitaire. On saisit le juge modestement pour lui demander une grille de lecture sur ce qu'il est possible de faire ou non avec le contrôle sanitaire de la population.
"On est dans une logique pédagogique" insiste encore l'avocate. "On veut qu'on s'assure du respect des règles qui sont applicables à tous. Il faut que les mesures et les dispositions technologiques prises soient proportionnées et ne créent pas de nouvelles vulnérabilités au sein de la population. C'est très important dans un état de droit".
Deux recours au nom des libertés publiques
L'avocate a déposé deux recours contre le décret adopté le 19 juillet. Le premier en référé, donc en urgence. Le second sur le fond. Mais dans les deux cas, les questions posées sont les mêmes : le pass sanitaire tel qu'il a été décidé par le gouvernement attente-t-il aux libertés publiques, à la vie privée des Français et à la protection de leurs données médicales ?
On attend du Conseil d'Etat qu'il vérifie si le pass sanitaire est compatible avec l'état de notre droit : la protection de nos données, la protection de nos libertés publiques et fondamentales.
"Ce qui nous pose problème, c'est l'extension du pass sanitaire à l'intégralité de notre vie quotidienne" explique France Charruyer. "Il n'y a pas eu d'analyse d'impact."
"Si véritablement on a besoin d'un pass sanitaire, ce n'est peut-être pas celui-là" renchérit-elle. Car si elle dit comprendre le caractère d'urgence qui peut conduire à décider de l'appliquer, elle s'inquiète de "l'atteinte qu'il porte à nos libertés d'aller et venir."
Les conditions d'applications du pass sanitaire sont trop larges, elles touchent toutes nos activités quotidiennes. Il y a des données qui ne concernent que nous dans le QR Code, il faut qu'elles soient complètement anonymisées et chiffrées. Sans compter le fait qu'on va demander à des cafetiers ou des ouvreurs de cinéma de devenir des auxiliaires de police...
"Le droit doit être un outil de compréhension au service du justiciable" conclut France Charruyer. Au juge de se prononcer. Selon elle, son recours en référé pourrait être examiné par le Conseil d'Etat en fin de semaine ou en début de semaine prochaine.
Déjà saisi en référé pour demander l'annulation de l'extension du pass sanitaire aux lieux de culture et de loisir accueillant au moins 50 personnes, le Conseil d'État a rejeté lundi ces demandes, estimant que la reprise épidémique justifiait de telles mesures.