Le 22 décembre 2023, un policier du centre de rétention de Cornebarrieu (Haute-Garonne) a été condamné à quatre mois avec sursis. Il a été reconnu coupable d'avoir "enfoncé les yeux" d'un étranger en situation irrégulière. Le fonctionnaire de police a été confondu par des images de vidéosurveillance.
L'information a été révélée par nos confrères de "StreetPress", qui ont mené une enquête fouillée sur cette histoire. Le 22 décembre 2023, le Tribunal correctionnel de Toulouse a condamné un policier, affecté au Centre de rétention administratif de Cornebarrieu (31), à une peine de prison de quatre mois avec sursis. Il a été reconnu coupable de violence « par personne dépositaire de l’autorité publique ». Le fonctionnaire de police est soupçonné d'avoir violemment agressé Samir (le prénom a été modifié), un libyen de 22 ans, en situation irrégulière.
Tout commence le 24 novembre 2023, comme le racontent nos confrères de "StreetPress". En garde à vue dans une salle du Centre de rétention administrative (Cra) de Toulouse-Cornebarrieu (31), Samir est pris à partie par deux policiers. Voilà 45 jours que cet étranger en situation irrégulière est retenu au Cra.
Les fonctionnaires de police lui reprochent d'avoir perturbé le repas du soir. "Le lendemain, ce jeune Libyen de 22 ans se retrouve accusé de « rébellion » et « menace de crime contre un dépositaire de l’autorité publique » comme l'expliquent nos confrères.
Samir accuse les deux policiers de l'avoir agressé
Samir est auditionné. Il en profite pour donner sa version : les deux gardiens qui l’accusent d’avoir perturbé le repas du soir sont bien ceux qui l’ont frappé. Une version jugée crédible par la justice, car il est relaxé trois jours plus tard. C'est la vidéosurveillance qui accrédite sa version et contredit celle des policiers.
Sur les images consultées par "StreetPress", on voit le demandeur d'asile assis à une table loin de l’interrupteur, pendant que d’autres détenus jouent à éteindre la lumière du réfectoire. C'est ce qui provoque la colère des fonctionnaires chargés de surveiller le dîner à travers un hublot.
Des images d'une rare violence
"Le soir du 24 novembre 2022, la caméra accrochée au plafond de la salle de transit du Cra de Toulouse-Cornebarrieu filme un policier en uniforme et gilet pare-balles qui enfonce ses pouces dans les orbites de Samir alors que ce dernier est allongé et immobilisé sur un banc contre le mur" raconte "Street Presse". Cet acte de violence provoque « une poche hémorragique de 2 millimètres » à l’œil gauche, selon un rapport médical consulté par "StreetPress". Les deux policiers vont contester toute brutalité physique.
Ce qui amène Samir à porter plainte "pour violence par personne dépositaire de l’autorité publique". Plainte qui aboutira finalement à la condamnation d'un des deux policiers par le Tribunal correctionnel de Toulouse.
"Il y a des preuves, les images de la vidéosurveillance parlent d'elles-mêmes, les juges ne pouvaient pas faire autrement que de condamner le policier" commente Maitre Elisabeth Gomez, l'avocate de ce libyen. Et de pointer le dysfonctionnement de ce Centre de rétention administrative. "C'est clair qu'ils sont en sous-effectifs au Cra. Je ne dis pas que leur travail est facile, mais là ils ont clairement pété un plomb" souligne la juriste.
Condamnation très rare
Un jugement exceptionnel. En France, ce n'est que la deuxième condamnation connue d’un policier en centre de rétention. La première date de 2017. Dans le centre de rétention de Coquelles dans le Nord, un étranger avait été giflé par un agent de la police aux frontières sous les yeux d’une greffière dans le Nord.
Quant à Samir, il a été transféré au Cra de Perpignan. Et depuis, plus personne n'a de nouvelles de lui...