Lors de son procès devant le tribunal correctionnel pour "provocation à la haine raciale", l'imam de la grande mosquée de Toulouse, Mohamed Tataiat, s'est défendu de tout antisémitisme. Le parquet de Toulouse a requis, mardi 29 juin en fin d'après-midi, six mois de prison avec sursis.
Les mots sont au coeur du procès, de ce mardi 29 juin, devant le tribunal correctionnel de Toulouse. Jugé pour "provocation à la haine raciale", l'imam de la grande mosquée de Toulouse se veut d'ailleurs précis. C'est en arabe et assisté d'un traducteur que Mohamed Tataiat s'exprime à la barre.
Il lui est reproché d'avoir lors d'un prêche, daté du 15 décembre 2017, fait référence en arabe à un hadith (une parole du prophète Mohamed) qui appellerait les Musulmans à tuer les Juifs.
"Les juifs se cacheront derrière les rochers et les arbres et les rochers et les arbres diront : "musulman, serviteur d’Allah, il y a un juif qui se cache derrière moi, viens le tuer". (traduction en anglais du Memri).
Le sens des propos déformés ?
"Les propos sont sortis du contexte, se défend le religieux musulman devant la cour. Le sens est différent de celui qui a été compris. Il s'agit d'une prophétie présente dans la littérature apocalyptique et il faut tenir compte de l'actualité de l'époque : l'ambassade des Etats-Unis a été déplacée de Tel Aviv à Jérusalem. (...) Je ne cite pas le Juif en tant que religion. Il y a plus de choses qui me relient à cette religion que de choses qui m'en séparent. (...) Depuis 1987, je suis en guerre intellectuelle contre l'extrémisme.".
Le président le questionne : "reconnaissez-vous une maladresse ?". La réponse de l'imam est sans détour : "Aucun Musulman ne reconnaîtra le sens, la signification que vous avez donné à mes propos."
"Pas devant n'importe quel auditoire" pour les parties civiles
Pour Maître Simon Cohen, avocat du Crif, partie civile dans cette affaire, cette défense ne tient pas : "quelque soit la traduction, les mots restent les mêmes. Et l’interprétation, sauf à déformer les mots, peut les nuancer, peut les présenter de manière plus ou moins flatteuse. De manière, donc, plus ou moins belliqueuse mais ne peut en changer la substance. « si tu vois un Juif derrière moi, tue le » est-ce que cela mérite d’être interprété ? Non." Et de rajouter : "Que l’on se réfère à des hadith, on peut ! Qu'on se réfère à des pensées doctorales, provocatrices, voire belliqueuses, on peut ! Mais pas devant n’importe quel auditoire."
Dans ses réquisitions rendues en fin d'après-midi, le parquet de Toulouse a estimé que Mohamed Tataiat "a opéré un glissement sémantique qui conduit à une stigmatisation des Juifs. Il ne se borne pas à critiquer l’Etat d’Israël. Les propos antisionistes concernent la totalité de la communauté juive. Cet argument est un prétexte. C’est l’élément constituant à l’exhortation à l’appel à la haine. Les mots ont un sens et sa parole a une portée importante vis-à-vis de son auditoire. Nous sommes à Toulouse où des enfants ont été tués parce que Juifs. La provocation à la haine raciale à l’égard de la communauté juive est caractérisée. Il n'y a pas eu de réponse claire. Il n'y a pas eu de regrets lors de cette audience. Je doute de sa capacité à se remettre en question."
Six mois de prison avec sursis ont été requis contre Mohamed Tataiat, ainsi que l'affichage du jugement sur la mosquée de Toulouse pour une durée à déterminer.